Une histoire de genre…

Publié le 29 mars 2012 par Wilntonga

Je vous propose l’histoire d’un responsable de projet qui a pris du recul sur une option idéologique et stratégique. C’est toujours délicat lorsque l’on est dans une organisation de se positionner sur les questions idéologiques. suivons.

Je me suis toujours demandé si elle n’avait pas quelques frustrations. Mais bon, c’était sa vie privée. On prenait un pot dans une capitales africaines et discutions des femmes et du genre. Le ton est monté, la discussion a durcit…et je lui ai clairement dit que je n’étais pas d’accord et que si son point de vue était absolu, elle pouvait compter sur moi pour déposer ma démission.
Elle pensait que les questions de genre étaient importantes : moi aussi. Le travail sur le terrain m’a enseigné qu’il y’a bien une véritable nuance dans une vie de femme par rapport à celle d’un homme. Les questions d’égalité ne sont pas vaines. Elles sont complètement pertinentes. Mais je suis convaincu qu’il ne faut pas les confondre.
Le genre c’est quoi ? C’est simplement ce qui est non biologique et qui distingue un homme d’une femme. Ce que le genre nous enseigne, c’est l’égalité dans une perspective claire : celle de l’équité. C’est à dire, redonner à chacun, homme et femme, sa place, ses droits, tout ce qui lui revient, de manière juste. Il ne s’agit pas de demander à une femme de faire ce qu’un homme fait…il s’agit qu’une femme fait TOUT ce qui est à son abord en tant que femme…Et non que cela soit circonscrit par les hommes pour aucune autre raison que le sexe féminin.
Mais les problèmes de genre doivent être les problèmes de société et non pas les problèmes d’autres personnes qui pensent que leurs réflexions doivent devenir les problèmes de tout le monde.
Elle me disait par exemple qu’il fallait mettre l’accent sur la question de la polygamie en me faisant pour un groupe de femmes particulier, une description apocalyptique….basée sur ses histoires quelque part en Asie.
Ma colère était grande. Parce qu’elle ne connaissait pas ces femmes avec qui je travaillais tous les jours. Et jamais, je n’avais senti pour celles qui étaient polygames, que c’était là le problème de leur vie. Je trouvais extraordinaire de devoir mettre de côté toutes les préoccupations de fond posées par ces femmes pour devoir “tester” les théories occidentalisées d’une partenaire qui ne les connaissait même pas. Elle m’a rappelé qu’elle était le financier du projet sur lequel nous travaillions…et je lui ai signifié que je démissionnerais sans aucune hésitation si j’étais obligé de travailler à sensibiliser contre la polygamie. C’était absurde, inutile et impertinent. Ces femmes avaient des soucis liés au genre plus réels.
Elle a mordu les lèvres devant ma fermeté et nous ne sommes plus jamais entendu sur ce sujet. Plusieurs fois, depuis Paris, elle a essayé d’orienter notre travail sur ce genre de thématique. Je reste carré. Avec mon équipe sur le terrain, nous restons attentifs à ce qui émane réellement du terrain et non pas à des théories auxquelles nous ne croyons pas. Nous avons réussi à obtenir des résultats sur l’auto gestion des revenus des femmes, le raffermissement des dialogues dans les familles avec des maris qui étaient souvent totalement fermés, l’appui des maris dans les travaux ménagers….la polygamie, elles s’en foutent. Au contraire, la plupart en veulent parce qu’elles peuvent l’utiliser pour développer leurs activités. Pourquoi deviendrais-je l’outil des théories occidentales auxquelles je ne crois pas au lieu de grandir dans mon rôle d’acteur de développement dans les problématiques dans lesquelles je vois ces femmes évoluer et obtenir des résultats concrets pour elles et leurs familles.
Ma conclusion est que pour parler de genre, il faut vraiment se débarrasser soi-même de ses lunettes civilisatrices…Sinon, on insulte les femmes.