Chacun se demande comment relancer la croissance, comme si c’était l’État qui la créait ; la vérité est plus simple : c’est l’État qui freine la croissance ; il suffit donc de libérer l’économie pour libérer le potentiel de croissance.
Par Jean-Yves Naudet.
Article publié en collaboration avec l’Aleps.
La récession est là…
Les prévisions économiques se suivent et se ressemblent. Quand elles vont toutes dans le même sens, c’est sans doute que la tendance est bien celle-là. Qu’annonce la Commission européenne pour 2012 dans la zone euro ? Une récession de 0,3% en moyenne. Que dit le FMI pour la même zone : une récession de 0,5%. Que vient d’annoncer la Banque centrale européenne : une croissance négative de 0,1%. Les écarts ne sont pas considérables et la tendance est la même : dans la zone euro, c’est la récession qui dominera.
Cette situation contraste avec le reste du monde. Certes, partout, la croissance a tendance à ralentir. Mais la récession, ce n’est pas la même chose qu’une croissance prévisible de 8,2% en Chine, de 7% en Inde, de 3,5% au Brésil, de 5,5% dans l’Afrique sub-saharienne. Dans le monde entier, la croissance devrait être en moyenne, selon le FMI, de 3,3%. Certes, elle est menée par les pays émergents. Mais la prévision de croissance est de 1,8% aux États-Unis, 1,7% au Canada, 1,7% au Japon : cela n’a rien de fabuleux, mais ce n’est pas la récession.
Les partisans de la fuite en avant
La zone euro sera donc en récession. Les médecins se pressent à son chevet : il faut un « volet » de croissance ; une « relance concertée », de « grands travaux européens » ; un « assouplissement monétaire » ; un « effort budgétaire » des pays les moins en déficit ; une nouvelle « baisse des taux d’intérêt » ; bref, c’est à qui proposera de relancer le plus. L’État est la solution, le remède magique ; il va nous sortir de la récession où nous aurait entraîné le marché, myope et irresponsable.
Il n’est pas nécessaire d’expliquer ici une nouvelle fois que la relance n’a jamais fait redémarrer l’économie ; que la relance monétaire, créant de faux droits, ne conduit qu’à l’inflation ; que la relance budgétaire, creusant les déficits, faisant exploser la dette, est la cause principale de la crise actuelle. Il y a plus d’un demi-siècle que nos gouvernements relancent, quand ils ne pratiquent pas le stop and go qui nous a valu l’invention de la stagflation. La relance n’a servi à rien, sinon à aggraver la crise. Cessons une fois pour toutes de chercher la solution dans cette permanente fuite en avant.
Stabiliser les politiques de stabilisation
Que faire ? D’abord cesser ces politiques conjoncturelles, keynésiennes, qui essaient de contrecarrer en permanence la conjoncture et en réalité l’aggravent. La manipulation permanente de la monnaie et du budget figure parmi les premiers facteurs de la crise. La formule de Milton Friedman : « Il faut stabiliser les politiques de stabilisation » est plus que jamais d’actualité. Cela signifie le retour au strict équilibre des finances publiques : ni impôts, ni dépenses ne doivent servir à une illusoire relance ; et pour la monnaie, une création modérée, compatible avec la stabilité des prix et le taux de croissance, que ce soit par une règle monétaire ou par le jeu de la concurrence monétaire.
La fin des politiques conjoncturelles contracycliques aura un autre avantage : elle créera un cadre en lui-même stabilisant. Les entreprises sont soumises à beaucoup d’incertitudes ; c’est le rôle des entrepreneurs d’assumer les aléas de leur activité ; mais ils sont démunis face aux incertitudes irrationnelles d’origine étatique. Le système fiscal, notamment, doit être stable : l’incertitude fiscale est un fléau pour le développement des économies car elle biaise les décisions des entreprises et des ménages : les niches fiscales et leur modifications permanentes en sont un exemple. Quant à la monnaie, il est temps de revenir à une notion simple : le crédit a un prix, qui est le taux d’intérêt ; il faut donc cesser de manipuler les taux, pour que ceux-ci soient de vrais prix et non de faux prix qui impliquent de mauvaises décisions.
Libérer l’économie
L’État cessant de perturber la conjoncture, faut-il en rester là ? Non, car le dirigisme nous a éloignés d’une véritable économie de marché. L’urgence est donc de libérer l’économie, pour que les talents s’expriment et favorisent la création de richesses. Pour cela, il faut que les prix soient de vrais prix, qui expriment les raretés (fonction d’information), modifient les décisions (fonction d’incitation) et permettent les adaptations nécessaires : c’est vrai du prix des biens et services et trop d’entre eux sont encore, dans la santé, dans les services, dans l’énergie, administrés. C’est vrai du prix du travail, fixé à des niveaux arbitraires, comme le SMIC.
Il faut ensuite inciter chacun à entreprendre, à créer, à travailler plus s’il le veut et donc libérer l’économie des contraintes bureaucratiques, administratives, de la paperasse et des contraintes absurdes de notre droit social ou commercial. Il faut que la concurrence puisse jouer pleinement et donc en finir avec les professions fermées, avec les services publics monopolistiques et les privilèges des anciens monopoles publics, qu’il faut d’urgence privatiser, et avec les atteintes à la concurrence aux frontières.
Réduire l’État
Mais il faut aussi que chacun puisse jouir du fruit de son travail, de son épargne, de son esprit d’entreprise ; pour cela, il faut mettre fin à la spoliation fiscale. De ce point de vue, la campagne électorale est affligeante, puisque le jeu de chaque candidat consiste à inventer un nouvel impôt par jour. Les gens sont prêts à créer plus, en travaillant, épargnant, investissant, entreprenant plus, à condition qu’on leur laisse ce qu’ils ont légitimement gagné. La chasse systématique aux riches, que pratiquent les candidats, est totalement contre-productive. Au niveau actuel de prélèvements obligatoires, même du point de vue du rendement fiscal, accroître les impôts détruira la matière imposable, donc le rendement de l’impôt.
Il faut faire reculer l’État et diminuer drastiquement les dépenses publiques. La France a dix points de dépenses publiques de plus que l’Allemagne, qui n’est pourtant pas le temple du libéralisme ! Pourquoi les Français ont-ils peur de faire reculer l’État ? Parce qu’ils sont entretenus dans l’ignorance par la classe politique? Sans doute. Mais c’est avant tout parce qu’on leur a expliqué que s’il n’y avait plus le monopole de la Sécu, il n’y aurait plus de protection sociale ; s’il n’y avait plus le service public de l’éducation, il n’y aurait plus d’écoles ou d’université ; bref, que s’il n’y avait plus l’État, il n’y aurait plus rien. Alors qu’il y aurait la société civile, dans sa dimension marchande comme dans sa dimension communautaire. Libérons l’économie, et on verra la croissance redémarrer et les talents des Français, comme des Européens en général, s’épanouir pour le bien de tous.
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