J'aime beaucoup le théâtre.
Comme toutes les formes de spectacle vivant ceci dit. Mais j'aime cet art là particulièrement parce qu'il est marqué du sceau de la fragilité de l'instant, que chaque représentation a la saveur particulière d'une pièce unique, parce qu'enfin on y sent la vie, présente, là, avec ses souffles, ses pauses, ses hésitations. C'est justement ce dont il est question dans la pièce de Pirandello "Se trouver". Jouer, est-ce la vie?
A travers une actrice, Donata Genzi, qui se trouve face à ce qu'il convient sans doute d'appeler une crise existentielle, "se trouver" propose une réflexion à propos de ce que chacun est de nous est vraiment (et bien entendu en particulier sur la condition d'acteur). A notre époque où chacun peut se bricoler sa propre petite vitrine pour montrer au monde entier ce qu'il souhaite afficher tout en lui dissimulant ce qui l'arrange, la pièce me semble trouver une résonance générationnelle et bien entendu de toute façon individuelle, qui va bien au delà du seul statut du comédien.
Comment se trouver? Savoir qui nous sommes vraiment? Quand tombent vraiment les masques? Peut on se trouver et se réaliser à travers l'autre? Aimer sans s'oublier?
"Il faut se créer pour se trouver" ai-je retenu de cette représentation.
Ce n'est pas tout à fait un hasard car cela va dans le sens de ce en quoi je crois : Chacun se découvre au fil des rencontres et des évènements qui jalonnent sa vie et nous révèlent à nous même.
Le jeu des comédiens est excellent et Emmanuelle Béart y est particulièrement émouvante. Mais enfin quelle ironie tout de même que de lui faire interpréter un texte relatant les angoisses d'une actrice qui se cherche et craint de se perdre et de devenir l'esclave d'une image qui lui échappe quand on découvre son visage, à la faveur d'un éclairage particulièrement intense. Il est évident que la chirurgie esthétique est passée par là et j'avoue que le contraste entre le texte et ce "détail" la concernant a provoqué chez moi un léger malaise.
Belle mise en scène, jeu de qualité, pièce méconnue mais qui invite à se questionner sur son propre parcours...A ne pas manquer.
Jusqu'au 16 avril au théâtre national La Colline.
Sinon bien entendu la réflexion sur le couple comprenant un(e) acteur(rice) m'a évoqué ce film que j'ai beaucoup aimé...