Titre : Capra Carnifex
Scénariste : Gautier Ducatez
Dessinateur : Gautier Ducatez
Parution : Novembre 2008
« Capra Carnifex » est un one-shot dessiné et scénarisé par Gautier Ducatez. Le titre est le nom savant d’un animal, la chèvre carnivore. A cette lecture, on ne peut que tiquer… L’histoire parle du professeur Morin, un naturaliste spécialisé dans les espèces rares. Il emmène avec lui le dessinateur Piczulski dans une région des Alpes possédant un écosystème particulier. En effet, au XIXème siècle, une forêt a été plantée artificiellement, réchauffant l’endroit, provoquant la fonte de glacier. Il espère alors trouver ici de nouvelles espèces qui s’y seraient développées. Le rôle de Piczulski est de dessiner les hypothétiques animaux qu’ils rencontreraient. Le tout est publié aux éditions de la Cafetière.
Difficile de savoir comment appréhender cet ouvrage. L’aspect fantastique est très présent, bien que toujours présenté comme quelque chose de normal. De plus, l’importance donnée à l’écologie en fait presque un ouvrage militant. « Capra Carnifex » est peut-être simplement une fable sur l’écologie et la préservation des environnements. En effet, les personnages se déplacent dans un parc naturel visé par une privatisation.
La relation entre les deux personnages, Morin et Piczulski, est particulièrement réussie. S’ils s’apprécient, les conflits sont légions. Le Professeur Morin est particulièrement fantasque et tétu. Quant à Piczulski, il préfère courir les jupons que les espèces rares… Leurs réactions aux évènements est souvent différente.
L’aspect fantastique est ici primordial mais toujours présenté comme normal, à l’image de ce berger avec des cornes et des pattes de bouquetin. C’est donc un faune. Et pourtant, lors de leur première rencontre, personne ne juge bon de le faire remarquer… Car la force de l’ouvrage est que Morin est à la recherche de choses nouvelles. Il est persuadé qu’il y a de nouvelles espèces dans le parc, en découvrir est pour lui tout à fait normal. Si bien que quand il explique de façon très rationnelle et scientifique pourquoi les bouquetins peuvent devenir carnivores, on le croit. C’est certainement la force de l’ouvrage. Malgré beaucoup d’éléments difficilement acceptables comme réalistes par le lecteur, on se prend au jeu. Morin est un personnage d’un charisme communicatif !
L’ouvrage devient finalement rapidement une sorte de voyage étrange fait de rencontres tout aussi incongrues. Le fait que cela se passe en Savoir change un peu (on nous a beaucoup habitué à ce genre de voyage dans les forêts bretonnes…).
Graphiquement, j’ai du mal à savoir ce que j’en pense. Le choix d’un encrage marron plutôt que noir n’est pas gênant. Je ne suis pas forcément fan du graphisme mais il est redoutablement efficace. L’auteur sait se concentrer sur ses personnages quand il le faut, puis va donner la place à des paysages magnifiques. Il en découle une véritable ambiance, très particulière et adaptée au propos. Les plans sont variés et le tout est remarquablement mis en scène. Du beau boulot.
Au final, j’ai été surpris par cet ouvrage. Un peu trop didactique par moment, il faut le prendre comme une fable un peu fantastique mais pas tant que ça finalement. Les personnages sont tous pittoresques et l’ambiance est au rendez-vous. Un livre curieux. C’est déjà une grande qualité.
par Belzaran
Note : 14/20