Je ne sais pas pourquoi, cette chanson me trotte dans la tête depuis quelques jours. J'ai dû l'entendre quelque part et comme je l'adore, elle est restée ancrée dans mon esprit, comme une moule sur un rocher (j'aime bien les moules aussi, mais c'est une autre histoire). Alors voilà, plutôt que d'essayer de m'en débarrasser, j'ai plongé dedans la tête la première afin de vous concocter une énième histoire de toune.
Over the Rainbow (qui est quelquefois appelée, par erreur, Somewhere Over the RainBow) date de 1938. Elle a été écrite par Edgar Yipsel Harburg et composée par Harold Arlen pour le film musical de Victor Fleming, Le Magicien d'Oz, sorti l'année suivante. C'est évidemment la jeune Judy Garland, 17 ans à l'époque, qui interprète ce titre.
Judy Garland a pré-enregistré la chanson une première fois le 7 octobre 1938 dans les studios de la MGM. Un second enregistrement, datant du septembre 1939 et produit par Decca Records, est sorti comme single. Bizarrement, le titre ne figurait pas sur la bande originale du film. Il fallut attendre mars 1940 pour qu'Over the Rainbow soit ajoutée à la B.O. du Magicien d'Oz. Ce n'était pas la version interprétée dans le film par Judy Garland, mais bel et bien cet enregistrement de septembre.
C'est seulement en 1956 que la MGM sortit la véritable version cinématographique de la chanson. A partir de là, Over the Rainbow devint la signature musicale de Judy Garland. En effet, on lui demanda de l'interpréter à presque toutes ses apparitions publiques, ce qu'elle fit des centaines, voire des milliers de fois, jusqu'à sa mort en 1969.
La voici sur scène en 1964, en compagnie de sa fille, une certain Liza Minnelli :
La mélodie plaintive et les paroles simples de la chanson racontent le désir d'une adolescente de s'échapper du "désordre sans espoir" de ce monde ("hopeless jumble"), de la tristesse des gouttes de pluie, vers un nouveau monde plein de couleurs "par-delà l'arc-en-ciel" ("over the rainbow"). Cette chanson exprime aussi la croyance enfantine selon laquelle les cieux ouvriront un passage vers un lieu où "les soucis fondent comme du sorbet au citron" ("troubles melt like lemon-drops"). Aujourd'hui, il est peu su que la chanson avait un long couplet d'introduction, puisque celui-ci ne fut pas chanté dans le film par Judy Garland.
Voici la version intégrale, couplet introductif compris, par une des plus grandes interprètes américaines, Barbra Streisand :
Over the Rainbow figure en tête de nombreux classements américains (chanson du siècle, meilleure chanson de film de tous les temps...) et a obtenu des prix prestigieux, notamment l'Oscar de la meilleure chanson originale en 1940.
La chanson connaîtra également une carrière "politique". De la même manière que White Christmas de Irving Berlin, cette chanson fut adoptée par les troupes américaines combattant en Europe pendant la Seconde Guerre Mondiale. Comme un symbole des États-Unis, Over the rainbow représente la terre lointaine qui, après de longues années de guerre, apparaissait comme un rêve derrière un arc-en-ciel.
La chanson, dans diverses versions, a eu une carrière cinématographique assez exceptionnelle. En effet, depuis les années 70, on la retrouve dans près d'une trentaines de film, comme Nuits Blanches à Seattle, Volte Face, Rencontre avec Joe Black, King Kong, Harvey Milk...
Évidemment, Over the Rainbow a été reprise par des dizaines d'artistes. L'un des versions les plus connues est l’œuvre d'un chanteur hawaïen de poids, Israel Kamakawiwo'ole (photo ci-contre), aussi connu sous le nom de IZ. Il doit sa renommée internationale au medley qu'il a fait, en 1993, de cette chanson avec What a Wonderful World, au ukulélé. Depuis, et malgré le décès du chanteur en 1997, la chanson continue à cartonner dans le monde entier. On retrouve cette interprétation de Over the Rainbow dans de nombreux films et publicités.
Il y a tant de superbes interprétations qu'il a été plus difficile que d'habitude d'en sélectionner pour vous. Commençons, si vous le voulez bien par quelques interprétations masculines.
J'aime beaucoup celle de Phil Collins, très douce, très jazzy. Elle figure sur son premier album solo, Face Value, sorti en 1981 :
Eric Clapton, dans une interprétation très douce :
Difficile de passer à côté de The Voice, même si sa version est des plus classiques :
Ray Charles, touchant, comme toujours :
Deux interprétations plutôt country, mais dans des styles très différents. D'abord, Jerry Lee Lewis :
Plus authentique et intéressant à mon goût, le Texan Calvin Russell, qui nous a quitté voici juste un an :
Poursuivons par trois versions instrumentales assez terribles.
Le grand Maceo Parker, au saxo bien sûr :
Keith Jarrett au piano :
Le bluesman Popa Chubby et son infernale guitare :
Pour effectuer la transition entre les interprètes masculins et les voix féminines, voici un duo sympathique entre la talentueuse et charmante Mélody Gardot et notre Eddy Mitchell national. Une version plutôt bosa qui s'intitule, Derrière l'Arc en Ciel :
Un autre duo, mais virtuel celui-ci, entre la belle Katie Melua et Eva Cassidy, décédée en 1996 et qui avait repris Over the Rainbow quatre ans plus tôt.
Quatre interprétations féminines pour finir. D'abord, l'Australienne Kylie Minogue, sur un croissant de lune...
Plus touchante, et plus décalée, la talentueuse Tori Amos :
Carrément excentrique, l'Allemande dégantée, Nina Hagen :
Et pour conclure, une autre version intégrale, par une grande voix souvent entendue sur des B.O. de James Bond, Shirley Bassey :