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Critique livre : Super triste histoire d’amour de Gary Shteyngart

Par Juloobs

Quatrième de couv’ : Lenny Abramov vit dans un New York futuriste, image exagérée de notre époque mais qui lui ressemble étrangement : le monde entier est arrimé à son téléphone ultra-perfectionné, la publicité triomphe et la littérature est un art préhistorique que quelques inadaptés tentent de sauvegarder sans succès. Lenny fait partie de ceux-là. Il lit des « livres papier », croit encore aux relations humaines et commet la folie de tomber amoureux d’Eunice Park, jeune américaine d’origine coréenne. Cette Super Triste Histoire d’amour est une comédie romantique qui finit mal (Lenny et Eunice ne vieilliront pas ensemble) et qui dresse un portrait accablant de la « modernité ». L’Amérique, au bord de l’effondrement économique, est menacée par ses créanciers chinois et une ambiance très Big Brother s’installe au quotidien. Cette satire mélancolique est surtout un roman à l’humour dévastateur. Sans délaisser la fable politique, Shteyngart livre ici un texte plus personnel, un autoportrait à peine déguisé d’un homme en décalage avec son temps.

Sur l’auteur : Gary Shteyngart est né en 1972 à Saint-Pétersbourg. Il quitte l’Union soviétique en 1978 et, après un court passage par Rome, arrive aux États-Unis en 1979, pays auquel il s’adapte difficilement. Après un diplôme de sciences politiques à l’université d’Oberlin, il choisit de voyager en Europe de l’Est. De retour à Manhattan, il écrit pour diverses associations à but non lucratif new-yorkaises.

Critique livre : Super triste histoire d’amour de Gary Shteyngart

Il doit être ô combien ardu d’écrire un livre d’anticipation, qui plus est traitant en majeure partie des NTIC, comme une manière de pointer du doigt les grands bouleversements de notre époque. Car entre les deux principaux protagonistes de ce roman, Lenny et Eunice, il y a symboliquement autant de décalage qu’entre Gary
Shteyngart et la nouvelle génération.

Si on peut rire de ce gouffre entre les générations, de cette caricature de société hypertechnologisée (jusqu’à conduire à la perte du lien social), Super triste histoire d’amour, à trop faire le grand écart (systématique) entre le niveaux de langues, à trop abuser dans le potache gras, lasse sur la durée, il faut bien l’avouer.

En fait, Gary Shteyngart fait le pari que son lectorat sera aussi perdu que lui dans le monde qu’il invente, en partie. Et s’il manque une touche d’optimisme à ce livre, il faut également noter que peut-être, entre la date d’écriture de ce roman (2008) et sa date de sortie (2012) les raiseaux sociaux, les smartphones, les tablettes ont changé les habitudes de nombre d’entre nous. Par conséquent, les uns trouveront ce livre prophétique tandis que d’autres y verront seulement la réalité nommée autrement…

La lecture de ce livre s’est révélée d’abord jouissive puis lassante. Je retiendrai tout de même l’évocation vertigineuse de la fin de la communication – la vraie – et par là même de la littérature, du jeu sur le langage au profit d’une novlangue dévastatrice (particulièrement à l’oeuvre dans les SMS et les réseaux sociaux). Mais si ce livre ne m’a pas pleinement convaincu, c’est avant tout une affaire de goût : l’anticipation que je trouve passionnante est celle qui se trouve sous la plume de J.G Ballard, Will Self ou encore David Mitchell.

Un grand merci néanmoins aux éditions de L’Olivier pour cet envoi !



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