Enième projet de transposition d’une série TV culte, 21 Jump Street n’avait a priori rien de très attrayant, mis à part la présence au casting du toujours sympathique Jonah Hill. D’autant plus qu’à l’instar de Starsky et Hutch, cette adaptation a pris le parti de transformer une série policière tout ce qu’il y a de plus premier degré en une comédie. Certes, il parait difficile de nos jours de faire avaler l’idée d’une section de la police infiltrant des agents dans les lycées, mais ce changement de registre n’en était pas moins inquiétant. Cependant, en étudiant de plus près les noms impliqués dans ce film, on s’aperçoit rapidement que celui-ci n’est peut-être pas le projet formaté auquel on aurait pu s’attendre. On retrouve en effet à la réalisation le duo Phil Lord – Chris Miller, responsable du déjanté Tempête de Boulettes Géantes, et au scénario Michael Bacall (associé à Jonah Hill) dont le dernier fait d’arme est le script de l’excellent Scott Pilgrim contre le Monde d’Edgar Wright.
Et par chance, cette solide équipe semble avoir définitivement compris que comédie ne rime pas forcément avec cynisme. 21 Jump Street réussit donc le périlleux exercice de remettre à jour une série très datée années 80, en reconnaissant les limites de celle-ci mais sans s’en moquer méchamment. Passée l’introduction dans laquelle les blagues sur l’âge des comédiens fusent, le film prend un virage étonnant en gommant en partie le côté parodique (au contraire de Starsky et Hutch) et en faisant naître l’humour des personnages et des situations plutôt qu’en se moquant du concept de base de l’intrigue. Une très grande partie de l’humour repose donc sur le décalage entre l’expérience lycéenne des héros et la redécouverte de cet univers dans lequel tous leurs repères sont chamboulés. Car en 7 ans, tout a changé : être le beau gosse glandeur du lycée ne suffit plus pour être populaire, et ce sont les mecs sensibles et aux grands idéaux qui ont la cote. Comme sur Scott Pilgrim, Michael Bacall brosse en filigrane un portrait assez crédible de la jeunesse d’aujourd’hui, ce que fait que la plupart des gags liés à la vie lycéenne font mouche non pas parce qu’ils sont exagérés, mais au contraire parce qu’ils sont finalement assez crédibles.
A ce titre, le casting est un quasi sans fautes, d’un Jonah Hill toujours impeccable dans le rôle du geek sensible à un Channing Tatum révélant un talent comique insoupçonné (à l’instar de Mark Wahlberg dans Very Bad Cops). Les acteurs incarnant les adolescents sont eux aussi très crédibles et ont pour une fois l’air d’avoir l’âge de leurs personnages. On notera tout particulièrement la performance pleine de fraîcheur de la jolie Brie Larson, que les fans de Scott Pilgrim reconnaitront peut-être (elle incarnait l’ex de Scott dans le film). Mais la cerise sur le gâteau reste le double cameo génial de Johnny Depp et Peter DeLuise reprenant leurs rôles respectifs de la série. Seul Ice Cube semble un peu hors de propos en incarnant le chef excité des deux héros, rôle dans lequel il en fait des tonnes…
Le film propose aussi de nombreuses scènes extravagantes et hilarantes, comme lorsque les héros se retrouvent forcés de goûter la drogue dont ils doivent stopper la diffusion, ou lors d’une géniale parodie des blockbusters américains, sous forme d’une poursuite en voiture d’anthologie où les héros provoquent de nombreux accidents sans que rien n’explose.
21 Jump Street est au final une excellente comédie, qui réussit l’exploit de respecter l’œuvre originale tout en traçant sa propre voie, et s’impose immédiatement comme la meilleure comédie de ce début d’année.
Note : 8/10
USA, 2012
Réalisation : Phil Lord, Chris Miller
Scénario : Michael Bacall, Jonah Hill
Avec : Jonah Hill, Channing Tatum, Brie Larson, Ice Cube, Dave Franco, Rob Riggle, DeRay Davies, Johnny Depp, Peter DeLuise