J'ai un peu hésité avant de rédiger une critique de Bellflower. Connaissant mon extraordinaire capacité à parler pour ne rien dire pendant des heures et sachant que celle-ci se traduirait, dans le cadre d'un blog, en de nombreux articles terriblement longs et chronophages pour leur auteur, je m'étais ainsi donné d'entrée de jeu une seule et unique règle de conduite en démarrant Kick-Ass Movies : n'écrire que sur les films que j'aurais clairement aimés (composer mes avis et diverses argumentations avec une classe, une intelligence et un talent littéraire indéniables ne découlant pas de règles mais d'un don purement naturel). Dans ce sens, Bellflower ne mérite pas vraiment sa place de troisième long-métrage chroniqué sur le présent blog, n'ayant pas clairement aimé cet ovni indépendant, malgré ses multiples et indéniables qualités. Mais depuis sa vision, je ne peux néanmoins m'empêcher de repenser à cette première œuvre troublante du réalisateur/monteur/producteur/acteur principal (et constructeur de ses propres caméras !) Evan Glodell. Sans savoir réellement pourquoi, je n'arrête pas de retourner certaines de ses séquences les plus fortes ou les plus anodines dans mon esprit vaporeux, de me rejouer encore et encore l'histoire pourtant simple de ces deux amis fans de Mad Max s'amusant à créer leurs propres lance-flamme et muscle car, plus en hommage à leurs souvenirs d'enfance (et preuve évidente de leur peur de grandir) qu'en prévision d'une éventuelle apocalypse, comme ils aiment à le raconter. Je me repasse intérieurement en boucle les sublimes images de ce début de romance touchante portée par des acteurs authentiques, au jeu sensible et presque à vif, tout comme la fin malheureusement inévitable, effrayante et surréaliste de cette même idylle, dans un déluge de cris et de colère, de flammes et de tonnerre, incursion ardente et fulgurante d'un véritable enfer sur Terre. Je ne cesse également de me rappeler la flamboyante beauté esthétique qui brûle chaque plan de ce film résolument iconique, ainsi que son ambiance suffocante magnifiée par un montage audacieux et une bande originale respirant agréablement le bon rock indé. Mais une partie de moi continue aussi de s'écrier : "Mais pourquoi cette trame secondaire avec le personnage de Courtney ? Même si j'en comprends le sens et la volonté (montrer le cycle de la souffrance grâce au schéma classique du "je souffre et fais souffrir à mon tour, même sans forcément le vouloir"), son traitement trop superficiel la rend peu crédible et arriverait presque à rendre ridicule un final pourtant dramatique et explosif ! Et pourquoi ils picolent tous à longueur de journée dans ce film ? Un peu, je veux bien (la voiture avec distributeur de whisky intégré, une idée plutôt marrante). Mais là, ça en devient ridicule (bière-bacon au petit-déjeuner, le lendemain d'une énorme cuite) ! Surtout qu'on ne montre jamais cet alcoolisme universel comme étant un vrai problème, mais juste en tant qu'élément de fond naturel et faussement cool (sûrement pour "faire jeune") ! Et le film aurait était tellement meilleur avec un rythme plus serré et sans quelques scènes honnêtement quasi-dénuées d'intérêt, voire totalement ratées ! Perso, je t'aurais balancé une demi-heure à la poubelle sans sourciller !" Ce à quoi une autre partie de ma conscience divisée continue alors de susurrer : "C'est un premier film, avec toute la générosité et le trop-plein que cela implique. Sois indulgent, surtout au vu de son audace et de tout ce qu'il offre à côté". Et aujourd'hui encore, je poursuis ainsi ma petite réflexion sur Bellflower. Sûrement pour tenter d'en retirer quelque chose de plus identifiable que cette étrange impression de tristesse et de rage qui m'habite depuis la fin de la projection, ou peut-être pour une plus simple et personnelle raison (moi aussi, je kiffe Mad Max). Dans tous les cas, une chose est sûre, si je ne peux pas dire que j'ai clairement aimé ce film pré-apocalyptique aussi incandescent qu'imparfait (les deux s'impliquant d'ailleurs probablement), je peux cependant avouer que celui-ci m'a profondément marqué. Rien que pour ça (et si l'on suit l'adage voulant que les règles sont faites pour être brisées), il méritait bien quelques lignes !
"Merci, mec !"
Titre original : BellflowerRéalisé par : Evan GlodellDate de sortie française : 21 mars 2012