Le sondage qui donne désormais 14 % des voix au candidat du Front de Gauche montre l’émergence de ce «mitterrandisme à l’envers». Loin d’être une bonne nouvelle pour Hollande, qui pourrait se dire qu’il élargit ainsi la base électorale qui lui servira au second tour, ce score porte en germe des déconvenues. Trente ans d’efforts sociaux-démocrates menacés !
Car le vent électoral gonfle les voiles de Mélenchon au lieu de remplir celles de Hollande. Le Front de Gauche se renforce, plaçant les socialistes dans une position défensive. Mitterrand, en 1981, avait réussi à bénéficier des voix communistes tout en rassurant le centre puisque la dynamique même de sa campagne éloignait la menace de la «gauchisation» en cas d’accès au pouvoir.
Aujourd’hui, c’est l’inverse : la force retrouvée des communistes et assimilés ne peut que provoquer l’inquiétude de nombre d’électeurs modérés. Et la pusillanimité qu’on ressent chez François Hollande lui donne l'image d'une proie pour une extrême-gauche avec laquelle il aura du mal à traiter sans être bousculé.
Mélenchon peut forcer Hollande à faire un grand écart qui provoquera une déchirure musculaire.
Cela commence à se voir avec les écologistes, dont le Front de Gauche réclamera assurément le sacrifice si ses voix sont indispensables à la victoire. Entre un parti à 2 % et un autre à 14 %, François Hollande aura vite fait de passer à la trappe l’accord signé il y a quelques semaines à peine avec les Verts.
Plus dangereux pour Hollande encore, cet élan mélenchonien rendra impossible et impensable une main tendue à Bayrou et aux centristes. Il faudra choisir, en moins d’une semaine, dans l’entre deux tours, entre l’extrême-gauche et le centre.
La chose risque d’être d’autant plus délicate que les communistes d’aujourd’hui - et Mélenchon encore davantage - sont bien placés pour savoir à quel point il leur faudra se méfier des promesses socialistes. Les négociations entre eux seront terribles.
En définitive, une élection présidentielle, au deuxième tour, se gagne au centre. Quand la dynamique de la campagne vous déporte vers l'extrême-gauche, la posture devient difficile à tenir.
Cette poussée gaucho-frontiste, symétriquement, simplifie l’équation de Nicolas Sarkozy. Un Modem affaibli pourrait revenir à la raison et au bercail du centre-droit face à l’épouvantail d’une résurgence des idées crypto-communistes.
Reste au président-candidat à tendre la main à François Bayrou, dont le parti survivrait difficilement à la victoire d’une gauche reconstruite dans la radicalité, succès provoquant en retour une radicalisation de l’opposition vers la droite.
Décidément, cette élection présidentielle de 2012, terne à ses débuts, devient passionnante par ses rebondissements !
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