Toulouse: le grand échec de Sarkozy

Publié le 23 mars 2012 par Juan
Il est arrivé face caméra, franchissant deux portes avant de parvenir à son estrade. Il marchait comme un cow-boy, mais sans le colt à la ceinture. Le teint était toujours un peu gris. A 13h à l'Elysée, Nicolas Sarkozy  terminait sa séquence présidentielle, entamée lundi pour cause d'attentat, par la promesse d'une énième loi, cette fois-ci contre les sites ou stages d'endoctrinement.  Voulait-il que l'on croit que trois enfants et quatre adultes avaient été exécutés ces dix derniers jours parce que le Net est mal surveillé ?
Le même jour, le conseil constitutionnel censurait son fichier des gens honnêtes. Ficher plus pour surveiller moins et rater tout ? Telle semblait être la doxa implicite du Monarque. Car qui pouvait être satisfait de l'épilogue du drame de Toulouse ?
Le drame questionne la compétence de Nicolas Sarkozy
Nous l'écrivions hier. Chaque jour qui passe ajoute au questionnement. Comment la DCRI a-t-elle raté Mohamed Merah ? Il était surveillé par la DCRI depuis ses « stages » islamistes en Afghanistan et au Pakistan. Une plainte avait été déposée contre lui il y a 18 mois, après qu'il ait violemment tenté d'embrigader un adolescent. Il aurait même été identifié avant la tuerie de lundi matin. Les Etats-Unis l'avaient interdit de vol, car soupçonné de terrorisme. Mais pas en France. Interrogé mercredi, Claude Guéant bafouilla qu'il n'avait eu aucun indice d'un passage à l'acte.
L'opération elle-même est un échec. 
L'intervention, mercredi vers 3h du matin, a été mal conçue, expliqua Jean-Dominique Merchet sur son blog:  curieuse « manière de pénétrer dans l'appartement, mercredi à 3 heures du matin » , absence de renseignement fiable, intervention trop longue, interpellation à domicile plutôt qu'à l'extérieur, la charge était rude. Le RAID avait pour consigne « de tout faire pour l'interpeller vivant », rappela le procureur de Paris. « Tout a été fait pour livrer le tueur à la justice » compléta Nicolas Sarkozy vers 13h. En vain. Merah a été tué. Deviendra-t-il martyr ?


Nicolas Sarkozy a raté un moment d'union sacrée. 
La cérémonie d'hommage aux militaires tués, dans la caserne de Montauban a failli être ce moment d'union nationale et de recueillement collectif. Mais depuis lundi, toute la séquence a été ratée. Sarkozy en est le premier responsable. Lundi après-midi, il avait promis de suspendre sa campagne, mais il s'est trop montré, il fallait qu'il parle. Il en avait oublié d'appeler les proches des soldats tués. Pire, ses sbires ont refusé aux autres candidats tout droit à l'hommage ou à la déclaration. D'abord sur Internet (Twitter, facebook, etc) puis par le biais de communiqués de presse ou d'interview, des proches du Monarque ont violemment ciblé François Hollande et les autres candidats. Même à l'UMP certains furent choqués. Le pire fut encore atteint jeudi quand quelques militants de la Web-campagne de Sarkozy propagèrent sur le Web une photo de François Hollande entouré de maghrébins et affirmer que ces derniers étaient des terroristes. La démarche était immonde.
Jeudi, le Monarque à nouveau candidat annonçait une nouvelle loi, et contre internet. Sa boulimie règlementaire l'avait repris. On retrouvait le candidat sécuritaire prêt à surfer sur chaque fait divers. Dimanche, il avait promis de supprimer deux règlements s'il en créait un nouveau. Quelle loi sécuritaire allait-il supprimer ? Pour l'heure, il annonça deux mesures encore très imprécises et sans doute ridicules, des sanctions pénales contre les consultations  régulières de sites dangereux (« Toute personne qui consultera de manière habituelle des sites qui font l’apologie du terrorisme ou qui appelle à la haine et à la violence sera punie pénalement »), et contre les stages d'endoctrinement à l'étranger (« Toute personne qui se rendra à l’étranger pour suivre des travaux d’endoctrinement à des idéologies sera punie pénalement »). Il réclama à son Garde des Sceaux  « une réflexion approfondie sur la propagation de ces idéologies en milieu carcéral ». Et il garantit que « la propagation d’idéologies extrémistes sera réprimée avec des moyens déjà présents dans le code pénal ». Sans rire, il voulait encore garantir.
L'intervention présidentielle fut courte et ridicule. Interdire la fréquentation de sites Web soulevait bien des questions pratiques. A ce rythme là, Sarkozy allait nous pondre une loi contre les jeux video.
Jeudi, le candidat sortant put enfin amalgamer tout ce qu'il prétendait éviter. 
Quatre heures après son intervention télévisée à l'Elysée, il était en meeting à Strasbourg. Il pouvait se lâcher, sans crainte ni calme. Finalement, cette triste séquence toulousaine n'était qu'une parenthèse.« Ces crimes ne sont pas les crimes d'un fou parce qu'un fou est irresponsable. Ces crimes sont ceux d'un monstre et d'un fanatique. » Quelle idée ! La France forte proclamée à longueur de discours était finalement bien faible. Quelques experts tentaient d'expliquer sur les chaînes d'info pourquoi le RAID n'avait pas su arrêter cet homme seul et sans otage. Personne n'osait aborder la question du bilan.
Encore une fois, Nicolas Sarkozy a cherché à masquer son incompétence.
1. Sarkozy a supprimé environ 10.000 postes dans la police et la gendarmerie depuis 2007.
2. Pire, la DCRI elle-même a été frappée par les réductions, en application de la révision générale des politiques publiques (RGPP). En 2010, le député Diefenbacher notait dans son rapport à l'Assemblée nationale sur le sujet: « En effet, le 15 janvier 2009, la DCRI se voyait notifier une déflation quadriennale de 400 personnels, soit 12 % de ses effectifs, de manière à atteindre 2 922 équivalents temps plein travaillé au 31 décembre 2011».
3. Sarkozy s'indigna de l'endoctrinement dans les prisons. Qui n'a rien fait contre la surpopulation carcérale depuis 2007 ? Qui a préféré la multiplication des fichiers mais la réduction des moyens ? La multiplication des lois mais la diminution des effectifs ?
4. Nicolas Sarkozy voulait ficher tout le monde, même les gens honnêtes, mais avec moins d'agents. Une double erreur: ça ne sert à rien, mais ça permet tout. Pire, même sur le fichage, il se révèle incompétent: le conseil constitutionnel a censuré ce jeudi son fichier des honnêtes gens, justement au motif que son objet est trop large et sans contrôle.
5. Pourrait-on enfin se demander ce que faisions en Afghanistan ? Et dresser le bilan des coups de menton atlantistes de notre Monarque ? La France de Chirac, quoiqu'immobile, avait le sens de la diplomatie. La Sarkofrance a tout ruiné.
« La France vient de traverser une épreuve » résuma Nicolas le président. Non, Nicolas le candidat commençait son épreuve.
Ami sarkozyste, reste avec nous.
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