Outre l'horreur absolue, les justes polémiques, les manipulations et les secrets d'état...
le verbe revendiquer, employé à l'envi par le ministre de l'intérieur, est, ne lui en déplaise, transitif direct et ne s'emploie pas à la forme pronominale.
"Selon Claude Guéant, ministre de l'Intérieur, le jeune homme « se revendique être un moudjahid » (combattant de Dieu) et « appartenir à al-Qaida ».
De ce fait, Monsieur Guéant ne peut "se revendiquer" du bon usage de la langue. Tout au plus pourrait-il revendiquer le droit à l'erreur! Bien qu'il soit peu sûr qu'on ait l'indulgence de le lui accorder...
Dans le même registre, les journalistes commentant l'encerclement de l'immeuble de Mohamed Mehra, ont souvent employé l'adjectif "présumé".
"Le suspect présumé, Mohamed Mehra, est un Français d'origine algérienne se revendiquant du djihad. Selon lemonde.fr, il aurait été entraîné dans des camps qui accueillent des talibans pakistanais, des djihadistes étrangers et des membres du puissant réseau Haqqani."
extrait de "La vie".fr
Non! Tant qu'un homme est suspect, il l'est sans qu'il soit besoin de lui adjoindre un quelconque adjectif! Car suspect ne veut pas dire coupable.
Par contre, dans l'expression "coupable présumé", chacun comprend que l'adjectif signifie "supposé"et permet ainsi de ne pas anticiper la décision judiciaire qui établira ou non la certitude de la culpabilité en question. L'adjectif revêt donc une fonction de la plus grande importance puisqu'il est garant de la présomption d'innocence, fondement des constitutions de la plupart des pays d'Europe qui s'appuient sur l'article 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 de l'ONU :
« Article 11. Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées..."
Mais ce ne sont que quelques erreurs relevées ici et là. Pas tant une affaire de purisme linguistique qu'un sursaut au manque de compréhension des mots employés. Il faut être plus vigilants. La dérive du sens ne peut-elle conduire elle aussi à l'inexorable gangrène de la pensée et des actes?