Hier soir, une fois n’est pas coutume, je suis allée au cinéma. D’une part, parce que ma carte 5 places au MK2 arrivait à expiration de durée, d’autre part, parce que j’ai une collègue dans ma vie blandinienne qui est absolument fan de Claude François. Quand elle avoue qu’elle est toujours triste les 11 mars et qu’elle fait toujours quelque chose en mémoire de Cloclo, un autre de mes collègues lui a répondu : Qu’est-ce que tu fais ? Tu coupes l’électricité ? Pour vous dire à quel point elle est fan, elle a pris sa journée le 14 mars pour aller voir le Cloclo de Florent-Emilio Siri. Et elle en est revenue avec des étoiles dans les yeux. Preuve, selon moi, d’un biopic réussi.
Ce qui est également bien dans le film, c’est qu’il n’est pas une hagiographie qui reléguerait les aspérités du personnage principal au second plan. On voit Claude François jaloux, limite psychopathe avec les femmes de sa vie (la scène où il traque Isabelle, la mère de ses enfants, est digne d’un thriller), jouisseur, imbu de lui-même, manipulateur, colérique… Mais aussi manquant tellement de confiance en lui et en ses capacités de rester en haut des charts qu’il en devient boulimique de travail. Au moins, les fans étaient prévenus qu’ils n’allaient pas être brossés dans le sens du poil, même si les deux fils du chanteur à la production apportaient leur caution morale.
Comme je n’y connais rien en cinéma, j’ai décidé de faire un petit tour de la carrière de Claude François en cinq titres :
Belles, belles, belles (1962)
Le premier gros carton, celui qui le fera connaître à la postérité. Après avoir fait le batteur et les choeurs à Monte Carlo, et après plusieurs échecs tant sentimentaux – sa femme se barre avec Gilbert Bécaud – que professionnels, le jeune homme de 23 ans tente sa dernière chance en réécrivant une adaptation. Et ça cartonne de suite. Il adaptera ensuite plusieurs titres de pop-rock américaine, comme beaucoup de monde en France à l’époque, ce qui fera de lui l’une des idoles des années yé-yé.
Comme d’habitude (1967)
Il vient de se faire larguer par France Gall, avec laquelle il s’est comporté comme un sagouin quand elle a gagné l’Eurovision. Pour porter le deuil, il écrit cette chanson où il extériorise toute sa souffrance. Ce sera son plus gros succès, et comble de la classe, sera reprise en anglais par son idole, Franck Sinatra. Pour la petite histoire, durant Cloclo, le moment où il chiale de bonheur quand il reçoit le master de My way m’a foutu les poils d’une force…
J’attendrai (1967)
Cette reprise de Reach out (I’ll be there) des Temptations est une réussite complète. D’une part, parce qu’après avoir vu Otis Redding à Londres, il a permis d’amener la soul de la Stax et de la Motown en France. Et surtout, c’est à partir de ce moment qu’il fait vraiment des shows à l’américaine et qu’il fait des chorégraphies de dingue avec ses désormais inimitables Clodettes.
Le chanteur malheureux (1975)
C’est un fait : Claude François en chie comme un malade pour arriver à rester au top après 13 ans de carrière ininterrompue, mais il n’est toujours pas considéré comme un artiste légitime par les médias. De plus, il se sent abandonné par ses proches, agressé dans la rue… Et, comme tout artiste qui se respecte, il a besoin de le dire. Vers la fin de sa vie, il demandera même à Etienne Roda-Gil, catégorisé auteur à gros intellect, de lui écrire des textes. Sauf que, comme c’est Claude François quand même, il mettra ça sur du disco et cela deviendra Magnolia Forever.
Alexandrie, Alexandra (1978)
Claude François n’aura pas eu le temps de savourer l’immense succès de son dernier single, étant donné qu’il est sorti dans les bacs le 15 mars 1978, jour de son enterrement. C’est peut-être un peu glauque, mais sur ce coup-là, la maison de disques a créé un énorme buzz à son corps défendant. Et dire qu’un mois avant, il chantait au Royal Albert Hall…
Cloclo, c’est donc désormais un film, mais surtout 63 millions de disques vendus, des milliers de sosies à travers toute la France et un culte qui, presque 35 ans après son décès, n’est pas près de s’éteindre.