« Le dernier contingent », c’est à la base une histoire bateau d’adolescents révoltés contre tout et tout le monde. Des adolescents, pour certains à peine sortis de l’enfance, déjà en perdition : massacrés par la famille, la société, les institutions. Six d’entre eux vont raconter, à la première personne, la guerre invisible que l’époque mène contre ses propres enfants. Ce qui est plaisant pour nous, c’est de voir que toutes les tristes aventures de ces adolescents se déroulent dans le Bordeaux d’aujourd’hui : un Bordeaux, nous pouvons vous l’attester, propice au bad trip et à la crise existentielle (Merci Alain Juppé !).
Le roman s’ouvre sur le jeune Marco. Suivront Sylvie, Manon, Xavier, Malid et Thierry. Les six ont en commun un désespoir qui envahit chaque page. La langue et le style littéraire sont incontestablement excellent, et Alain-Julien Rudefoucauld réussit un véritable tour de force. On parle, dans le cercle des critiques littéraires, de trésor de langage, d’une écriture acérée, ciselée, puissante, qui percute le lecteur au plus vif. Beaucoup considère ce livre comme rempli d’humanité, porté par une pléiade de personnages magnifiquement désespérés.
Personnellement, nous pensons que cette histoire est captivante, que la force littéraire de cette oeuvre est impressionnante pour un auteur que nous ne connaissions franchement pas avant. Mais, comme toujours avec nous, il y a un mais…
Ces adolescents sont mis à mal par la société en général : par l’incapacité de l’Etat, par l’impuissance de la justice, de la police, de l’éducation, l’absence des parents, la démission des mères… Bref une société au bord du gouffre qui abîme de plus en plus nos jeunes personnages. Ils étouffent, ne sachant quoi dire ou faire, au milieu de l’argent, de l’a-moralité, de l’absence de but concret. Ces accumulations donnent un ensemble tragique à l’oeuvre, un livre noir et lourd qui n’est pas sans rappeler un ancêtre qu’on porte hautement plus dans nos coeurs à . Vous avez deviné ?
Des jeunes perdus, errant dans une grande métropole, accumulant les imbécilités… Moins que zéro de Brett Easton Ellis bien sûr.
Grand chef d’oeuvre de la littérature américaine, révolution des années 80′s : ce livre est l’un des plus grand livre de ces dernières années.
Il est donc normal de voir le spectre de B. Easton en lisant Le dernier contingent. Ceci n’enlève certes rien à la qualité de l’ouvrage mais donne un goût de déjà vu pour ceux qui n’en sont pas à leur premier roman de divagation adolescente.
On ne saurait réellement critiquer ce livre puisqu’il a sans conteste de nombreuses qualités.
Au final, c’est un bilan mitigée que nous vous dressons. Le dernier roman d’Alain Julien Rudefoucauld nous laisse perplexe. Mais, achetez le. Après tout, il a reçu le Prix France-Culture & Télérama.