La loi n° 2012-376 du 20 mars 2012 relative à la majoration des droits à construire a été publiée au JO ce matin. Commentaire.
Le texte de cette loi peut être consulté sur le site Legifrance ou consulté ci dessous.
Concrètement, cette nouvelle loi, adoptée en un temps record, procède à la modification de l'article L.123-1-11 du code de l'urbanisme et à l'insertion d'un nouvel article L.123-1-11-1 à sa suite.
Quel est le champs d'application du taux de 30% ?
La loi prévoit que "Les droits à construire résultant des règles de gabarit, de hauteur, d'emprise au sol ou de coefficient d'occupation des sols fixées par le plan local d'urbanisme, le plan d'occupation des sols ou le plan d'aménagement de zone sont majorés de 30 % pour permettre l'agrandissement ou la construction de bâtiments à usage d'habitation, dans les conditions prévues au présent article"
Concrètement, ce taux de 30% s'applique donc aux : règles de gabarit, règles de hauteur, règles d'emprise au sol et coefficient d'occupation des sols.
Qui peut décider d'une augmentation des droits à construire ?
Il convient de distinguer deux procédures. La première est à l'initiative du conseil municipal, la seconde présente un caractère quasi automatique. La différence tient à ce que le conseil municipal intervient en amont ou en aval de la majoration des droits à construire.
En premier lieu, l'article L.123-1-11 du code de l'urbanisme, qui préexistait à la loi du 20 mars 2012, prévoyait déjà une procédure d'augmentation du taux des droits à construire. En réalité, la seule nouveauté apportée par la loi du 20 mars 2012 tient à ce que l'augmentation peut présenter un caractère automatique.
Cette procédure, telle que modifiée par l'article 3 de l'ordonnance n°2011-1539 du 16 novembre 2011, est bien celle qui a inspirée la loi du 20 mars 2012. Elle est fondée sur les dispositions de l'article L.123.1.11 précité qui précise :
"(...)Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme peut, par délibération motivée, déterminer des secteurs situés dans les zones urbaines délimitées par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu, à l'intérieur desquels un dépassement des règles relatives au gabarit, à la hauteur, à l'emprise au sol et au coefficient d'occupation des sols résultant de l'un de ces documents est autorisé pour permettre l'agrandissement ou la construction de bâtiments à usage d'habitation. La délibération fixe pour chaque secteur ce dépassement, qui ne peut excéder 30 % pour chacune des règles concernées. En l'absence de coefficient d'occupation des sols, l'application du dépassement ainsi autorisé ne peut conduire à la création d'une surface de plancher supérieure de plus de 20 % à la surface de plancher existante. Le projet de délibération comprenant l'exposé des motifs est porté à la connaissance du public en vue de lui permettre de formuler des observations pendant un délai d'un mois préalablement à la convocation de l'assemblée délibérante.
Le sixième alinéa n'est pas applicable dans les zones A, B et C des plans d'exposition au bruit mentionnées à l'article L. 147-4 du présent code et dans les zones mentionnées aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement (...)".
A noter : à la suite de la loi du 20 mars, le taux est porté de 20 à 30%. Cette procédure est donc à l'initiative du conseil municipal qui intervient en début de procédure et non aprés une augmentation quasi automatique des droits à construire.
En second lieu, la loi du 20 mars 2012 introduit un nouvel article L.123-1-1-11-1 qui prévoit une majoration de 30 % qui n'est pas à l'initiative du conseil municipal mais qui ne peut ne faire contre son avis. Le troisième alinéa de l'article L.123-1-11-1 précise en effet :
« Elle [la majoration] ne s'applique pas si le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme a pris, avant la promulgation de la loi n° 2012-376 du 20 mars 2012 précitée, une délibération faisant application du sixième alinéa de l'article L. 123-1-11".
Toutes les communes sont elles concernées ?
Non. Toutes les communes et tous les secteurs d'une commune ne pourront être concernés par une majoration automatique des droits à construire. Cette nouvelle règle d'augmentation des droits à construire s'applique aux communes : dotées d'un PLU, d'un POS ou d'un PAZ. Par ailleurs, le conseil municipal conserve son droit de s'opposer à cette majoration.
En outre, le deuxième alinéa de l'article L.123-1-11-1 du code de l'urbanisme dispose :
« La majoration de 30 % prévue au premier alinéa du présent I n'est applicable ni dans les zones A, B et C des plans d'exposition au bruit mentionnées à l'article L. 147-4, ni dans les secteurs sauvegardés. Elle ne peut avoir pour effet de modifier une règle édictée par l'une des servitudes d'utilité publique prévues à l'article L. 126-1, ni de déroger aux chapitres V et VI du titre IV du livre Ier".
Le législateur a donc entendu mettre une limite à la majoration des droits à construire de manière à assurer un équilivre avec les préoccupations environnementales qui sont d'ores et déjà inscrites au sein même du code de l'urbanisme. Pour mémoire, les chapitres V et VI du titre IV du livre Ier du code de l'urbanisme sont relatifs aux législations montagne et littoral.
Quelles sont les étapes de la nouvelle procédure de majoration des droits à construire ?
1. Dans les 6 mois à compter de la promulgation de la loi du 20 mars 2012, l'autorité compétente pour élaborer le PLU met à la disposition du public une note d'information
2.Les modalités exactes de la consultation sont fixées par le conseil municipal. Elles peuvent prendre la forme d'une mise en ligne de la note d'information ou d'une présentation en réunion publique.
3. Le public dispose d'un délai d'un mois pour présenter ses observations
4. A l'issue de cette consultation, une note de synthèse est mise à disposition du public
5. La majoration est applicable huit jours aprés la date de la séance au cours de laquelle la synthèse des observations du public a été présentée à l'organe délibérant compétent et au plus tard dans un délai de neuf mois suivant la promulgation de la loi.
6. "A tout moment", le conseil municipal peut mettre un terme à cette majoration.
Commentaire : le législateur vient de créer ici une nouvelle procédure de consultation du public. On peut le regretter au regard de l'objectif de simplification du droit. Par ailleurs, cette procédure présente un caractère express qui est rarement compatible avec l'objectif de qualité du droit. Enfin, un examen attentif de cette procédure démontre l'existence plusieurs zones d'ombre qui justifieraient l'intervention du pouvoir réglementaire. Ainsi, si cette procédure est censée présenter un caractère automatique, elle suppose tout de même une intervention du conseil municipal pour être enclenchée. Que se passe-t-il si le conseil municipal s'oppose par "inertie" à la mise en oeuvre de ces dispositions ?
En réalité, l'Etat a été manifestement "limité" dans sa volonté de majorer les droits à construire par le principe d'autonomie des collectivités territoriales. La recherche d'un équilibre entre ce principe et la volonté du Chef de l'Etat de mettre en place très rapidement ladite majoration a conduit à un texte qui est insuffisamment précis et peut générer du contentieux.
Quels sont les demandes d'autorisation d'urbanisme concernées ?
La loi dispose que cette réforme "s'applique aux demandes de permis et aux déclarations déposées en application de l'article L. 423-1 avant le 1er janvier 2016.
Soulignons ici que la sécurité juridique des autorisations qui seraient délivrées sur le fondement de cette majoration des droits à construire n'est pas tout à fait assurée. D'une part, si la décision de majoration est annulée en justice, les autorisations délivrées sur son fondement pourront être remises en cause. D'autre part, une personne qui conçoit un projet de construction fondée sur une majoration du droit à construire ne doit pas oublier que celle-ci peut à tout moment être remise en cause par le conseil municipal. La prévisibilité des projets est donc incertaine.
_________________________
JORF n°0069 du 21 mars 2012 page 5121
texte n° 1
LOI
LOI n° 2012-376 du 20 mars 2012 relative à la majoration des droits à construire
NOR: DEVX1202862L
L'Assemblée nationale et le Sénat ont délibéré,
L'Assemblée nationale a adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Article unique.
I. ― Aux deuxième et troisième phrases du sixième alinéa de l'article L. 123-1-11 du code de l'urbanisme, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».
II. ― Après le même article L. 123-1-11, il est inséré un article L. 123-1-11-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 123-1-11-1. - I. ― Les droits à construire résultant des règles de gabarit, de hauteur, d'emprise au sol ou de coefficient d'occupation des sols fixées par le plan local d'urbanisme, le plan d'occupation des sols ou le plan d'aménagement de zone sont majorés de 30 % pour permettre l'agrandissement ou la construction de bâtiments à usage d'habitation, dans les conditions prévues au présent article. Cette majoration s'applique dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme, d'un plan d'occupation des sols ou d'un plan d'aménagement de zone en vigueur à la date de promulgation de la loi n° 2012-376 du 20 mars 2012 relative à la majoration des droits à construire.
« La majoration de 30 % prévue au premier alinéa du présent I n'est applicable ni dans les zones A, B et C des plans d'exposition au bruit mentionnées à l'article L. 147-4, ni dans les secteurs sauvegardés. Elle ne peut avoir pour effet de modifier une règle édictée par l'une des servitudes d'utilité publique prévues à l'article L. 126-1, ni de déroger aux chapitres V et VI du titre IV du livre Ier.
« Elle ne s'applique pas si le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme a pris, avant la promulgation de la loi n° 2012-376 du 20 mars 2012 précitée, une délibération faisant application du sixième alinéa de l'article L. 123-1-11.
« II. ― Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi n° 2012-376 du 20 mars 2012 précitée, l'autorité compétente, en application de l'article L. 123-6, pour élaborer le plan local d'urbanisme met à la disposition du public une note d'information présentant les conséquences de l'application de la majoration de 30 % prévue au I du présent article sur le territoire de la ou des communes concernées, notamment au regard des objectifs mentionnés à l'article L. 121-1. Le public dispose d'un délai d'un mois pour formuler ses observations à compter de la mise à disposition de cette note.
« Les modalités de la consultation du public prévue au premier alinéa du présent II et du recueil et de la conservation de ses observations sont précisées, selon le cas, par le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent et portées à la connaissance du public au moins huit jours avant le début de cette consultation. Elles peuvent prendre la forme d'une mise en ligne du dossier de consultation ou d'une présentation au cours d'une réunion publique.
« A l'issue de la mise à disposition de la note d'information mentionnée au même premier alinéa, le président de l'établissement public ou le maire présente la synthèse des observations du public à l'organe délibérant de l'établissement public ou au conseil municipal. Cette synthèse est tenue à disposition du public. Un avis précisant le lieu dans lequel elle est tenue à disposition du public fait l'objet des mesures d'affichage et, le cas échéant, de publicité applicables aux actes modifiant un plan local d'urbanisme.
« III. ― La majoration mentionnée au premier alinéa du I est applicable huit jours après la date de la séance au cours de laquelle la synthèse des observations du public a été présentée à l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou au conseil municipal et au plus tard à l'expiration d'un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la loi n° 2012-376 du 20 mars 2012 précitée, sauf si l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou, dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article L. 123-6, le conseil municipal décide, à l'issue de cette présentation, qu'elle ne s'applique pas sur tout ou partie du territoire de la ou des communes concernées ou s'il adopte la délibération prévue au sixième alinéa de l'article L. 123-1-11.
« A tout moment, le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent peut adopter une délibération mettant fin à l'application de la majoration prévue au I du présent article sur tout ou partie du territoire de la commune ou des communes concernées. Il en est de même s'il décide d'adopter la délibération prévue au sixième alinéa de l'article L. 123-1-11. Dans les deux cas, cette délibération est précédée de la consultation du public prévue, respectivement, au II du présent article ou au sixième alinéa de l'article L. 123-1-11.
« Les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme peuvent décider d'appliquer la majoration prévue au I du présent article sur leur territoire, nonobstant toute délibération contraire de l'établissement public, ou d'écarter cette application.
« IV. ― Le présent article s'applique aux demandes de permis et aux déclarations déposées en application de l'article L. 423-1 avant le 1er janvier 2016. »
III. ― L'article L. 128-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même de l'application combinée des articles L. 123-1-11-1, L. 127-1, L. 128-1 et L. 128-2. »
La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.
Fait à Paris, le 20 mars 2012.
Nicolas Sarkozy
Par le Président de la République :
Le Premier ministre,
ministre de l'écologie,
du développement durable,
des transports et du logement,
François Fillon
Le ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer, des collectivités territoriales
et de l'immigration,
Claude Guéant
Le ministre de la culture
et de la communication,
Frédéric Mitterrand
Le ministre auprès du ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer, des collectivités territoriales
et de l'immigration,
chargé des collectivités territoriales,
Philippe Richert
Le ministre auprès du ministre de l'écologie,
du développement durable,
des transports et du logement,
chargé du logement,
Benoist Apparu
(1) Travaux préparatoires : loi n° 2012-376. Assemblée nationale : Projet de loi n° 4335 ; Rapport de M. Bernard Gérard, au nom de la commission des affaires économiques, n° 4351 ; Discussion les 21 et 22 février 2012 et adoption, après engagement de la procédure accélérée, le 22 février 2012 (TA n° 863). Sénat : Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, n° 422 (2011-2012) ; Rapport de M. Thierry Repentin, au nom de la commission de l'économie, n° 436 (2011-2012) ; Avis de M. René Vandierendonck, au nom de la commission des lois, n° 435 (2011-2012) ; Texte de la commission n° 437 rectifié (2011-2012) ; Discussion et adoption le 29 février 2012 (TA n° 102). Assemblée nationale : Projet de loi, modifié par le Sénat, n° 4426 ; Rapport de M. Bernard Gérard, au nom de la commission mixte paritaire, n° 4428. Sénat : Rapport de M. Thierry Repentin, au nom de la commission mixte paritaire, n° 461 (2011-2012). Assemblée nationale : Projet de loi, modifié par le Sénat, n° 4426 ; Rapport de M. Bernard Gérard, au nom de la commission des affaires économiques, n° 4429 ; Discussion et adoption le 5 mars 2012 (TA n° 882). Sénat : Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, n° 462 (2011-2012) ; Rapport de M. Thierry Repentin, au nom de la commission de l'économie, n° 463 (2011-2012) ; Texte de la commission n° 464 (2011-2012) ; Discussion et adoption le 6 mars 2012 (TA n° 109). Assemblée nationale : Projet de loi, modifié par le Sénat en nouvelle lecture, n° 4447 ; Discussion et adoption, en lecture définitive, le 6 mars 2012 (TA n° 885).