Les politiques ont-ils une âme? Jolie question, que pose la journaliste Isabelle Dillmann à 17 personnalités de la vie politique française. Leur réponse, sous forme de courte interview, fait l’objet de ce livre, paru chez Albin Michel.
Par leurs réponses, ces politiques abordent une grande variété de sujets: leur rapport personnel à la religion, au sacré, à leurs racines. De gauche comme de droite, jeunes promus ou vieux briscards, ils se livrent tous, parfois de manière touchante.
Le rapport au père, tout d’abord. Chacun évoque la figure du père, premier modèle auquel ces futurs leaders ont été confrontés. Celui de François Baroin, illustre fondateur de la FNAC, celui de Philippe Séguin, décédé quelques mois après sa naissance, ou encore celui de Christine Lagarde, que l’ancienne ministre des finances a perdu à 16 ans.
Chacun évoque également son rapport au compromis, aux petits renoncements, au mensonge par omission. Si la vérité est une valeur suprême, l’engagement politique réclame parfois de faire l’impasse sur ses propres convictions, au nom d’une solidarité gouvernementale, parfois. Aucun n’y adhère de bon coeur, mais chacun reconnaît s’y être soumis.La conclusion de l’interview de Jean-François Copé est, à ce titre, un sommet d’élégance.
Deux grandes tendances se dégagent, chez les personnes qui ont accepté de répondre. D’un côté, ceux qui reconnaissent une intense foi chrétienne, de l’autre, ceux qui adhèrent à un athéisme profond: tous, cependant, mettent leurs convictions de côté quand il s’agit de leur action politique. L’intérêt général prime chez ces serviteurs de l’état, et c’est bien normal.
Le rapport à la Shoah est tout aussi surprenant. Que Bernard Kouchner ou Jean-François Copé l’évoquent, cela n’a rien de surprenant. En revanche, on peut être surpris de voir Gérard Larcher ou Manuel Valls aborder le sujet, alors que rien ne les y rattache de manière personnelle.
De tous ces témoignages, c’est celui de Philippe Séguin qui m’a fait la plus forte impression. Ses réponses sur l’idéal démocratique, le mensonge en politique, ses références historiques, notamment au discours prononcé par Pompidou à la mort du général de Gaulle, sont un vrai délice.
Isabelle Dillmann termine son ouvrage sur une note d’humour, en expliquant pourquoi certains politiques n’ont pas participé à cet ouvrage. Ni Ségolène Royal, ni Nicolas Sarkozy, ni DSK n’ont, en effet, souhaité participer. Fort malheureusement, certains des candidats encore en lice pour la présidentielle, manquent à l’appel: Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen, ou François Hollande… Peut-être dans un second volume?