Dans notre société interrogative sur son avenir, cette couleur fonctionne comme une balise, pour ne pas dire comme une bouée où l'on souhaite se raccrocher pour ne pas couler dans le drame climatique qui nous pendrait au nez. À cet égard, les écologistes ont joué un rôle important pour favoriser une prise de conscience planétaire jusqu'à un trop plein de pathos dont pâtissent actuellement les Verts français faute de ne pas avoir su rendre l'écologie positive. C'est du moins la thèse que j'ai défendue lors de cette Académie de la couleur. Les écolos sont dans la dénonciation, la culpabilisation et dans des solutions radicales aux allures de régression sociétale. Un avenir d'autant moins acceptable que la crise économique rebat les cartes des priorités.
À Bordeaux, la richesse des échanges et des interventions —ils seront bientôt disponibles en podcast sur YouTube— ont mis en lumière l'appétit les citadins que nous sommes pour le verdoyant. Nous fantasmons sur un paradis fertile en plans d'eau et en espaces verts, ce que ne manque pas d'exploiter nos édiles pour séduire leurs administrés. Des élus confrontés à la contradiction de l'époque entre la réglementation et le laisser-faire qui s'exprime dans la gestion des dits espace verts.
Faut-il des parcs et des jardins gérés et balisés ou au contraire, « abandonner » les espaces à la nature qui doit reprendre ses droits dans le béton et le goudron ? Les paysagistes et les urbanistes seraient tentés par la seconde solution. Olivier Damas, chargé de mission Agronomie, sols urbains et diversification végétale, représentant de l'association Plante & Cité, préconise un équilibre entre les végétaux « aimables » et « non aimables », comprenez plantés par l'homme et semés par la nature, un mélange de plantations organisées et d’herbes folles. Ce qui n'est pasforcément du goût des citoyens qui comprennent mal pourquoi les maires laisseraient des pissenlits et des graminées pousser sur les trottoirs. Certaines villes ont même lancé des campagnes de communication pour promouvoir le charme et l'intérêt de cette « flore spontanée » (vocable politiquement correct pour évoquer les mauvaises herbes...), les populations ne semblent guère sensibles à ce désordre naturel.
Ce qui est somme toute compréhensible, la nature n'est acceptable que lorsqu'elle est domptée par l'homme, circonscrite dans son pré carré
À cet égard, dans le rayon fleurs et plantes de la boutique Merci à Paris, on vend de la « flore spontanée » en pot au prix… des orchidées! Les bobos familiaux qui circulent à vélo et en 4x4 dans le Marais aspirent à une écologie qui ne déflore pas leur obsession à être dans l'air du temps. Être vert est souvent un geste esthétique, pas toujours politique. Eva Joly devait y réfléchir... Mais comment faire passer un message vert avec des lunettes rouges de senior bougon ?