Dimanche 18 mars, il était 100 000 selon les organisateurs, 50 à 60 000 selon les observateurs. La place de la Bastille était rouge et… noire de monde pour entendre la star du moment Jean-Luc Mélenchon, leader du Front de Gauche, leader de cette gauche de la gauche devenue plurielle. C’est en effet la principale réussite de ce socialiste, devenue Président du Parti de Gauche en 2008. La place de la Bastille était donc rouge mais pas uniquement.
La synthèse de la gauche non-socialiste
Depuis quelques semaines le candidat Mélenchon semble trouver un second souffle (11% d’intentions de vote au 1er tour selon CSA) alors que ses concurrents pour la place de « troisième homme », Bayrou et Le Pen, marquent le pas même s’ils le devancent encore. Si les observateurs vantent ses talents de communicant, saluent son sens du verbe et apprécient son « parler vrai », il est surtout l’homme de la synthèse à gauche du Parti Socialiste. En 2007, les candidats de gauche hors PS représentaient 10,23% de l’électorat : Olivier Besancenot (4,08%), José Bové (1,32%), Marie-George Buffet (1,93%), Arlette Laguiller (1,33%) et Dominique Voynet (1,57%). En 2012, on ne comptera que 10 candidats (11 si Corinne Lepage se qualifie) mais seul les 2 poids lourds excèdent les 2%.
En 2012, la conjonction de plusieurs facteurs a permis au candidat du Parti de Gauche de faire un hold-up sur cet électorat de gauche, demeuré sable à environ 10% et orphelin de leaders emblématiques : Arlette Laguiller a laissé sa place à la timide Nathalie Arthaud, Olivier Besancenot a souhaité reprendre sa liberté et Nicolas Hulot n’a pas su convaincre les Verts historiques en dépit de son fort potentiel. A l’occasion d’une élection présidentielle, on sait à quel point la personnalité du candidat compte ; et cette hécatombe a fait les affaires du candidat Mélenchon. Tribun sans pareil, il s’inscrit à merveille dans la tradition de la gauche non-socialiste, celle qu’avait incarnée Georges Marchais (15, 35% en 1981) mais qui depuis semblait incapable de s’unir.
Un Mélénchon fort : bonne nouvelle pour le PS mais jusqu’à quel point ?
A quelques 30 jours du 1er tour, les candidats de gauche totalise 40,5% de l’électorat dont 39% représenté par les intentions de vote pour François Hollande (28%) et Jean-Luc Mélenchon (11%). Après avoir négocié un accord avec le PCF au sein du Front de Gauche, Jean-Luc Mélenchon a siphonné l’électorat de gauche non socialiste, séduisant cette gauche qui juge François Hollande trop « social-démocrate ». A première vue il représente une réserve de voix intéressante pour François Hollande (report potentiel à 79% au second tour). Pour autant, cette prise de poids d’un seul candidat aux côtés du candidat du PS fait poindre le risque d’une gauchisation subite de la campagne en prévision du second tour. En effet, un Mélenchon qui atteindrait 50% du score de François Hollande rendrait un accord avec le Modem quasi-impossible dans l’entre deux-tours. On comprend dès lors les tentatives nombreuses à droite pour favoriser ce trublion. Enfin, l’accord qui lierait Mélenchon et Hollande en mai 2012 donnerait une coloration nette à la majorité et au gouvernement; un élément qui pourrait effrayer certains électeurs centriste et interroger les choix du Parti Socialiste, sur l’euro notamment.
Après une semaine troublée sur la planète « sondage », les candidatures Sarkozy et Mélenchon semble néanmoins avoir le vent en poupe. Pour François Hollande, il y a donc urgence à répondre et de reprendre la main face à Nicolas Sarkozy tout en observant avec attention l’évolution de la campagne de Jean-Luc Mélenchon ; histoire de s’assurer que le candidat du Front de Gauche ne se trompe pas d’adversaire.