Photographie 1
: Gravure intitulée 'Les Amusements de la Rapée' provenant d'un almanach du XVIIIe siècle : Les
Amusements de Paris. Almanach chantant pour les jolies Femmes qui on de la raison, avec Tablettes Économiques. Perte et Gain. Petit secrétaire fidèle et discret.
Le quai de la Rapée est dans le quartier de Bercy. Il existe toujours mais est aujourd'hui presque
entièrement bétonné. Autrefois s'y trouvent des lieux où l'on vient se divertir comme à la Taverne des canotiers « où l'on cultive à la fois la matelotte, le petit vin à huit sous, la
musique fluviatile et la poésie maritime » (Dictionnaire de la conversation et de la lecture, seconde édition, tome quatrième, Paris, 1853).
Photographie 2 : Planche couleur signée Grévin, format 32,2 x 23,4 cm de la série
« Canotiers et canotières ».
Photographies 3 et 4 : Planche de la même série que précédemment. Un canotier (de Paris) s'adresse à
un cuisinier « - Comment ! Vous ne connaissez pas Nana ! La grande Nanuche, qu'a l'oeil en amande avec un tout petit grain de beauté comme ça ici dans
l'dos ! »
Photographies 5 et 6 : Couverture de la partition « Je n'peux pas vivre sans
amour » créée par Maurice Chevalier.
Les bateaux dont les barques ont une importance toute particulière dans l'histoire parisienne. Le mot
'Paris' viendrait de « bar Isis » : la barque d'Isis. Le symbole de la capitale française est un bateau. La corporation des canotiers y est très influente durant les siècles (n'en
déplaise aux maçons et francs-maçons).
Jusqu'au XXe siècle,
les déplacements sur la Seine sont sans doute libres car une multitude d'embarcations la parcourent dont des
barques. Les parisiens aiment à se promener par ce moyen de locomotion. Les canotiers arborent des styles typiques. Ils ont leurs lieux de jeux, de musique etc. Certaines tavernes du bord de
Seine ou de Marne sont réputées pour leur petit vin, leur musique et leurs enchantements, cela depuis très longtemps. On trouve de ces lieux d'accostage tout près de Paris comme à Bercy (qui est
aujourd'hui intra-muros) ou plus éloignés. Certains de ces canotiers sont des petits-maîtres qui se promènent sur ces barques avec leur petite-maîtresse. Dans la seconde partie du XIXe siècle ce
divertissement est d'autant plus à la mode que le sport l'est aussi.
Les guinguettes au bord de l'eau sont des lieux où les parisiens viennent se divertir. A la fois près de
la capitale et dépaysantes par leur environnement bucolique elles sont particulièrement appréciées en période estivale. Le Déjeuner des canotiers d'Auguste Renoir (1841-1919) représente un de ces endroits. Il existe
des témoignages de ceux-ci à leur emplacement même comme le musée de La Grenouillère.
La Grenouillère est un établissement de bains froids des bords de Seine qui attire entre 1855 et 1928,
des parisiens dont des écrivains et des peintres célèbres. Monet et Renoir l’ont représenté plusieurs fois en 1869. Il s'agit d'un café-bal flottant amarré à l’Ile de Croissy. On vient donc y
boire, danser, promener et prendre des bains dans la Seine.
Guy de Maupassant (1850-1893) utilise ce lieu dans plusieurs de ses oeuvres comme dans La femme de Paul
dont voici deux passages : « Lorsqu'ils eurent tourné le coude de la rivière, la Grenouillère leur apparut dans le lointain.
L'établissement en fête était orné de girandoles, de guirlandes en veilleuses de couleur, de grappes de lumières.
Sur la Seine circulaient lentement quelques gros bachots représentant des dômes, des pyramides, des monuments compliqués en feux de toutes nuances. Des festons enflammés traînaient jusqu'à l'eau;
et quelquefois un fallot rouge ou bleu, au bout d'une immense canne à pêche invisible, semblait une grosse étoile balancée. Toute cette illumination répandait une lueur alentour du café, éclairait de bas en haut les grands arbres de la
berge dont le tronc se détachait en gris pâle, et les feuilles en vert laiteux, sur le noir profond des champs et du ciel. L'orchestre, composé de cinq artistes de banlieue, jetait au loin sa
musique de bastringue, maigre et sautillante, qui fit de nouveau chanter Madeleine. Elle voulut tout de suite entrer. Paul désirait auparavant faire un tour dans l'île; mais il dut céder.
L'assistance s'était épurée. Les canotiers presque seuls restaient avec quelques bourgeois clairsemés, et quelques jeunes gens flanqués de filles. Le directeur et organisateur de ce can-can, majestueux dans un habit noir fatigué, promenait en tous sens sa tête
ravagée de vieux marchand de plaisirs publics à bon marché. La grosse Pauline et ses
compagnes n'étaient pas là; et Paul respira. On dansait les couples face à face cabriolaient éperdument, jetaient leurs jambes en l'air jusqu'au nez des vis-à-vis. Les femelles, désarticulées des
cuisses, bondissaient dans un envolement de jupes révélant leurs dessous.
Leurs pieds
s'élevaient au-dessus de leurs têtes avec une facilité surprenante, et elles balançaient leurs ventres, frétillaient de la croupe, secouaient leurs seins, répandant autour d'elles une senteur
énergique de femmes en sueur. Les mâles s'accroupissaient comme des crapauds avec des gestes obscènes, se contorsionnaient, grimaçants et hideux, faisaient la roue sur les mains, ou bien,
s'efforçant d'être drôles, esquissaient des manières avec une grâce ridicule. Une grosse bonne et deux garçons servaient les consommations. Ce café-bateau, couvert seulement d'un toit, n'ayant
aucune cloison qui le séparât du dehors, la danse échevelée s'étalait en face de la nuit pacifique et du firmament poudré d'astres. »
« … le grand café flottant regorgeait de monde. L'immense radeau, couvert d'un toit goudronné que
supportent des colonnes de bois, est relié à l'île charmante de Croissy par deux passerelles dont l'une pénètre au milieu de cet établissement aquatique, tandis que l'autre en fait
communiquer l'extrémité avec un îlot minuscule planté d'un arbre et surnommé le « Pot-à-fleur », et, de là, gagne la terre auprès du bureau des bains. »
Voir ici la nouvelle en entier. Il est question aussi de la Grenouillère dans son œuvre intitulée Yvette.
Durant la seconde moitié du XIXe siècle, le chapeau de paille dit 'canotier' devient à la
mode et est porté en ville en été même avec un costume. Le plus célèbre de ces couvre-chefs est peut-être celui de Maurice Chevalier (1888-1972) qui représente un style des années 1910 d'une
élégance nonchalante et quelque-peu fruste. C'est la mode de ce chapeau, du costume étroit et des guêtres blanches sur des chaussures parfaitement cirées.
© Article et photographies LM