A propos de 30° Couleur de et avec Lucien Jean-Baptiste, Philippe Larue 2.5 out of 5 stars
Edouard Montoute, Lucien Jean-Baptiste
A Paris, Patrick mène un train de vie luxueux. Professeur d’histoire reconnu et médiatique, il vient de recevoir un prestigieux prix couronnant son travail sur Marie-Antoinette. Mais alors qu’il croule sous les éloges, il reçoit un appel de sa sœur en Martinique lui annonçant la mort imminente de leur mère. Patrick, qui a coupé les liens avec les siens, n’est pas retourné au pays depuis 30 ans. Dans l’urgence, il laisse tout ses travaux en plan et part avec sa fille unique sur place, où il tombe en plein Carnaval de l’île et sur Zamba, un ami d’enfance qui est son antithèse…
30° Couleur n’est pas une pure comédie, un film où l’on rit aux éclats du début à la fin. Parfois grave (comme les compositions de Klaus Badelt), le second long-métrage du réalisateur et comédien Lucien Jean-Baptiste (après La première étoile, 2009) s’attaque au racisme de manière parfois un peu solennelle, comme le ton sur lequel Patrick (joué par Lucien Jean-Baptiste lui-même) s’exprime mais en prenant soin d’éviter les clichés.
La grande force de 30° Couleur est de procéder par allusions subtiles, par petites touches qui rappellent l’Histoire, notamment celle de l’esclavagisme en Martinique lors d’une scène entre Patrick et un Blanc dans un Hôtel.
Patrick est un intellectuel doué et rigoureux mais il aimerait que l’on le laisse tranquille avec ses racines antillaises, que l’on reconnaisse enfin son travail d’Historien en oubliant de souligner qu’il est noir et que sa réussite du coup n’en est que plus probante.
Patrick, pourtant, ne peut oublier son enfance, lui qui a été coupé de la Martinique à 11 ans, année où il fut été envoyé à Paris parce qu’il était un élève brillant. Trente ans plus tard, le voilà qui renoue avec ses sœurs, dont une lui en veut toujours de ne pas avoir donné signe de vie, et sa mère qui lui demande comme dernière volonté de la faire enterrer aux pieds de la Tour Eiffel.
Ce pourrait être une comédie sans nuances comme Case départ, mais c’est un film assez intimiste au final. Déraciné, le personnage de Patrick se trouve plongé en plein Carnaval de Martinique, avec pour acolyte Zamba (très bon Edouard Montoute, vu dans Taxi ou Astérix et Cléopâtre de Chabat notamment), un ancien camarade d’enfance qui est tout le contraire de Patrick. Du moins en apparence.
Zamba est excentrique, Zamba boit, se déguise en drag queen multicolore pour le lundi gras, rouge pour le mardi gras et noire pour le Mercredi des Cendres, mais Zamba ne se prend pas au sérieux, au contraire de Patrick qui a été élevé en métropole « comme un Blanc » et juge Zamba oisif et immoral.
Pourtant, peu à peu notre historien se décoince sous l’effet de l’alcool. Le cadavre de sa mère a disparu mais la sorcellerie n’aidera en rien à le retrouver. De plus en plus éméché, Patrick renoue avec ses racines et sa famille, et le film prend les allures d’un Very Bad trip antillais.
Sauf que le film ne va pas assez loin dans son délire. On sent de la part du réalisateur-acteur comme une volonté de tout contrôler, de ne pas assez lâcher la bride, les rênes de sa caméra. 30° Couleur ne manque pas de péripéties mais souffre de son manque de rythme et d’un scénario un peu attendu qui rend parfois l’enchainement de l’action et des scènes un peu raide. La chute, décevante, symbolise bien ce qui a manqué au scénario et au film pendant une heure trente : la capacité à surprendre et à emballer le spectateur, à l’embarquer véritablement dans la folie de ce carnaval, à donner chair à ce retour de Patrick sur la terre de ses origines. Et aux répercussions qu’elles ont sur lui…
http://www.youtube.com/watch?v=P9XqnpVpBlI
Film français de Philippe Larue et Lucien Jean-Baptiste avec Edouard Montoute, Marie-Sonha Condé (01 h 32).
Scénario de Lucien Jean-Baptiste et Philippe Larue : 1.5 out of 5 stars
Mise en scène : 2 out of 5 stars
Acteurs : 3 out of 5 stars
Dialogues : 3 out of 5 stars
Compositions de Klaus Badelt : 3 out of 5 stars