Un accord parlementaire vient mettre un point final à la longue guerre du "boeuf aux hormones" qui opposait les Etats-Unis, le Canada et l'Union européenne. Retour sur cette bataille sanitaire.
Le règlement adopté mercredi à une large majorité par le Parlement européen met ainsi fin à 24 ans d'un conflit commercial opposant les deux principaux producteurs de viande aux hormones à l'Union européenne, qui en a interdit l'importation dès 1988.
Le nouvel accord prévoit une augmentation de 25 000 tonnes sur les importations annuelles de viande de boeuf sans hormone en provenance des Etats-Unis, et une augmentation de 3 200 tonnes en provenance du Canada. En échange de cette hausse, les 2 pays s'engagent à retirer les lourdes taxes pesant sur l'importation de plusieurs produits d'origine française comme le chocolat, les truffes, le roquefort ou encore la moutarde.
Effectives en 1999, ces taxes douanières faisaient office de sanction contre l'Europe et avaient été validées par l'Organisation mondiale du commerce. En guise de contestation, José Bové, au côté d'autres membres de la Confédération paysanne, avait organisé le "démontage" du McDonald's de Millau, dans le sud-ouest de la France. Une action médiatique qui lui avait alors coûté trois mois de prison ferme.
Une victoire sanitaire avant tout
Pour le député européen-Les Verts, la conclusion de l'accord est donc naturellement "une belle victoire". D'abord pour le consommateur, puisque l'interdiction d'importation de viande issue d'animaux auxquels ont été administrés des hormones de croissance répondait à plusieurs études prouvant leur nocivité. L'une d'entre-elles, réalisée en 1999 par le Comité scientifique des mesures vétérinaires, estimait que les résidus présents dans la viande de 6 hormones (oestradiol-17ß, progestérone, testostérone, zéranol, trenbolone acétate et mélengestrol acétate) " peuvent avoir des effets neurobiologiques, génotoxiques, cancérigènes et sur le développement, imputables soit à la substance parentale, soit aux métabolites ".
Du côté des agriculteurs européens, la nouvelle a été accueillie de manière partagée. Certes, les producteurs des denrées jusque-là surtaxées vont progressivement pouvoir reconquérir le marché nord-américain, mais les producteurs de viande de boeuf eux, voient déjà rouge. Pour la Fédération nationale bovine (FNB), la modification du contingent de viande importée va nuire à la filière européenne : " une fois de plus, la viande bovine européenne est sacrifiée, et sert de monnaie d'échange à des tractations commerciales menées par la Commission européenne ". Privilégier la viande importée de qualité afin de protéger la santé des consommateurs européens, c'est une précaution qu'à préférer prendre l'Union européenne, certes, au détriment de l'environnement.
Après tout, la meilleure option pour éviter de s'empoisonner, n'est-elle pas de limiter sa consommation de viande ?
Alicia Muñoz