Le nouvel album de Bruce Springsteen vient de paraître le 6 mars, son dix-septième pour quarante ans de carrière. En écoute gratuite sur Internet la semaine précédent sa sortie, plus une conférence de presse à Paris, on a mis les grands moyens pour promouvoir le disque. Il faut reconnaître que les deux derniers opus étaient moyens, que ce soit Magic en 2007 ou le très décevant Working On A Dream en 2009.
Au rayon faire-part, si Working On A Dream était dédié à feu Danny Federici, Wrecking Ball est en mémoire de Clarence Clemons, le « Big man » étant décédé en juin dernier, il souffle néanmoins encore sur deux titres de ce CD. Le E-Street Band, l’orchestre du Boss barre-t-il en couilles, car entre les décès et le fait qu’il est peu présent sur ce nouvel album on peut se poser la question. Roy Bittan (piano), Nils Lofgren (guitare) et Garry Tallent (basse) sont absents, Steve Van Zandt (guitare) ne joue que de la mandoline sur un seul titre et Max Weinberg de la batterie sur trois !
Néanmoins, le Boss revient avec un disque qui tient la route, offrant plus de satisfactions que de déceptions. Un disque gorgé de titres qui dans leur majorité sortiront grandis de l’épreuve de la scène, ce que je ne manquerai pas de vérifier puisqu’il sera à Bercy les 4 et 5 juillet prochain. Bien entendu j’ai opté pour la version CD offrant deux titres en bonus, donc treize morceaux. On notera au passage, que certains étaient déjà connus car Springsteen en a déjà donné des versions sur scène, Land Of Hope And Dreams, American Land et Wrecking Ball.
Avec ce nouveau disque Bruce Springsteen, toujours défenseur de la veuve et de l’orphelin et c’est à son honneur, constate amèrement que l’Amérique n’est plus ce qu’elle était, sa voix oscille entre rage et colère rentrée car les motifs d’indignation sont nombreux, argent facile pour les uns mais salaires de misère pour les autres. “I have spent my life judging the distance between American reality and the American dream” a déclaré récemment Springsteen, le fameux « Rêve Américain » n’est plus qu’une formule usée jusqu’à la corde, alors le Patron offre sa tournée de chansons contestataires.
Rapide survol de ces treize titres. We Take Care Of Our Own est un morceau bien enlevé dans la veine classique du Boss ; Easy Money un titre dans la lignée de ceux qu’il écrit depuis qu’il s’est entiché du violon Irlandais de Soozie Tyrell ; Shackled And Drawn encore un bon morceau avec du violon ; Jack Of All Trades est un titre lent qui débute par un minimaliste piano/voix et se termine sur un solo de guitare de Tom Morello (Pearl Jam), à noter une section de cuivres genre enterrement en Louisiane ; Death To My Hometown pour les amateurs de gigues, tambours martiaux, flûtiaux folkloriques, violon, choeurs celtiques ; This Depression, un morceau lent, faible musicalement ; Wrecking Ball un morceau bien construit avec des progressions paroxystiques qui mettront les fans en folie lorsqu’il sera joué sur scène. Une sacrée patate et comme par hasard c’est Max Weinberg qui joue de la batterie et Clarence Clemons qui prend le solo de sax ! You’ve Got It guitare acoustique et écho sur la voix de Bruce, ça débute comme une session intime avant que l’orchestre n’entre en douceur pour ensuite affirmer sa puissance, une pedal steel guitar donne un bon goût à la sauce ; Rocky Ground, un titre atypique qui sort du lot dès la première écoute, introduit par la voix de Michelle Moore, présence d’un léger rap au féminin au cœur du morceau, batterie électronique. Un morceau doux et assez joli, mais il ne faudrait pas que ça devienne une habitude ; Land Of Hope And Dreams, introduit par une sorte de gospel dans le lointain, un très bon morceau avec des montées en puissance et Clarence Clemons aux solos de sax, idéalement construit pour la scène ; We Are Alive, banjo, mandoline, pour ce dernier titre du CD simple, Bruce Springsteen conclût par un morceau faible mais sur une note optimiste, « Nous sommes vivants », ce qui somme toute est l’essentiel ! Les deux bonus, Swallowed Up, voix très basse et mortuaire, accompagnement minimaliste, mélodie quasi inexistante, un titre faible. American Land, un morceau sautillant avec tout l’attirail folklorique, violon et tout le bazar des Seeger Sessions. Une note d’espoir, il y aura un trésor pour tous ceux qui seront prêts à travailler dur s’ils s’établissent en terre Américaine.
Bruce Springsteen vient de sortir son meilleur album depuis… un certain temps ! Hauts les cœurs, le Boss n’est pas encore fini.