L’ère Peyton Manning a pris fin la semaine dernière en Indiana. Les Fers à Cheval utiliseront donc le premier choix au prochain repêchage pour mettre la main sur Andrew Luck. Cependant, vu l’incroyable manne obtenue par les Rams pour la seconde sélection, il faut poser la question : l’organisation des Colts aurait-elle dû garder Manning et monnayer le premier choix?
Les arguments en faveur de la décision des Colts
Évidemment, la décision de l’état-major d’Indianapolis se défend. Outre le léger détail que représente le paiement d’un boni de 28 000 000 de douilles, la faiblesse du club fut cruellement exposée l’automne dernier. Difficile de rêver de Super Bowl après avoir vu son équipe s’effondrer de la sorte. Cet écroulement coïncida avec l’émergence des puissants Texans, donc même avec le # 18 dans l’alignement, le succès futur au sein même de la division est loin d’être garanti à Indianapolis. De plus, ce sont eux qui connaissent le mieux l’état de santé de leur ancien quart-arrière. Peut être savent-ils des choses que nouveaux meilleurs amis de Peyton ignorent? A ce sujet toutefois, à moins que tous se fassent prendre dans une gigantesque supercherie, le nombre élevé de prétendants prêts à tout pour signer Manning fait penser que les rapports médicaux sont optimistes.
L’autre élément militant en faveur de la décision prise par Jim Irsay se nomme Andrew Luck. Il faut se méfier de l’enflure verbale qui l’entoure, créée en partie par la surabondance de journalistes qui se consacrent au football 365 jours par année et par la nécessité de créer un buzz toujours plus gros pour l’événement télévisuel qu’est devenu le repêchage de la NFL. Sauf que Luck, un peu comme Manning l’était, est présenté comme un talent qui ne passe qu’une fois par génération. Dans une ligue axée maintenant quasi-exclusivement sur le quart-arrière, le gradué de Stanford devient le gage d’une décennie de prospérité.
C’est le pari des Colts qui rebâtissent et qui vident leur formation plus rapidement qu’un joueur de ligne vide un gros baril de poulet frit. L’année prochaine sera donc extrêmement difficile, mais Indianapolis souhaite copier la recette des Cowboys de 1989; cette bande de jeunes qui n’avaient remporté qu’une victoire cette année-là, mais 3 Super Bowl au cours des 6 saisons suivantes. Eux-mêmes connaissent la chanson : en 1998, les Colts conclurent la saison avec une désolante fiche de 3 victoires, 13 défaites, guidés par une jeune recrue portant le numéro 18. Disons que cette campagne difficile fut largement récompensée…
Les arguments contre la décision des Colts
Jouons le jeu un instant. Jeff Fisher a obtenu 3 sélections en première ronde (2012,2013 et 2014) ainsi qu’un autre droit de parole au second tour de l’encan de cette année de la part des Redskins en retour du 2e choix global, ou, si vous préférez, de Robert Griffin III. Tout cela pour un minuscule recul de 4 rangs. Cette transaction devient le plancher pour ce qu’Indianapolis aurait pu exiger en retour du premier choix.
Au sein d’une formation dont l’objectif est de gagner maintenant, un de ces choix de première ronde aurait pu être remplacé par un joueur, préférablement en défensive. Rappelons qu’en retour de Kevin Kolb, les Eagles ont soutiré aux Cards l’excellent jeune demi de coin Dominique Rodgers-Cromartie. Ça donne une idée de la qualité du contributeur sur lequel Indianapolis aurait pu mettre le grappin. De plus, en demeurant dans le top-10 de la première ronde, les fers à cheval auraient vraisemblablement repêché un solide partant en défensive, ce qui veut dire que cette unité sur-sollicitée en 2011 aurait été bonifiée par l’ajout de 2 playmakers en 2012.
Avec ce qu’on a vu cette saison, il faut se demander si ces acquisitions auraient suffit, mais souvenons-nous que c’est avec sensiblement les mêmes éléments que les Colts ont atteint 2 Super Bowls au cours des 5 dernières saisons disputées par Manning. Plus qu’un simple joueur important, Manning était l’ingrédient essentiel pour que le Jello prenne en Indiana. Rejouez les parties des Colts l’automne dernier avec Manning dans l’alignement, et cette équipe pourrie avec Curtis Painter remporte probablement au moins 10 victoires. On présume aussi qu’un tel scénario aurait permis de dégotter un plus gros nom pour remplacer Jim Caldwell sur la ligne de touche. Donc l’idée d’utiliser l’exceptionnelle valeur du premier choix de cette année pour colmater quelques brèches et ré-ouvrir une fenêtre de 2-3 ans pour gagner le Vince Lombardi avant que Manning ne rentre dans ses terres avait quand même du mérite.
Qu’en pensez-vous? Les Colts ont-ils pris la meilleure décision?