[Feuilleton] Mont Ruflet d'Ivar Ch'Vavar - 40/41

Par Florence Trocmé

Mont-Ruflet 
poème-feuilleton d’Ivar Ch’Vavar 
40e épisode 
Résumé de l’épisode précédant : L’image sort de ses gonds, ne pouvant se tolérer elle-même. Elle est détestation, refus viscéral... et d’autant plus qu’elle sent poindre de l’amour derrière la haine, et sait bien que fatale-ment elle va à ce monstrueux amour... Oxymore, une jeune châtelaine dont le cil raie l’azur, est agréée par les corvidés du lieu. 
 
La narine affairée (l’époux, toujours l’époux) au blond, à l’obs 
Cur mêlés. Et sous son quintal vautré (on ne va pas faire dans   (2030) 
La demi-mesure) ton bassin maigre a craqué, - tout équarri, é 
Carté (allitérations !).  Mais, clignant ses yeux bleuâtres ‒ pass  
Ant dans  sa  brosse rousse les doigts de sa grosse main (là, on 
Comprend forcément qu’Oxymore est une malmariée ; on lui 
A fait épouser ce rustre,  ce hobereau à moitié dégénéré et enc 
Ore en plus il lui faut habiter son château de merde). Bien, on 
Reprend : Mais clignant ses yeux bleuâtres, passant dans sa b 
Rosse rousse (les cheveux en brosse)  les doigts de sa grosse m 
Ain... jamais l’homme et châtelain... à mordre en pleurant ton 
Sein (chiale, connard !), à crever, fouiller ton ventre (ordure !)   (2040) 
Scruter ta face effacée - n’a pu croire - un seul instant ! ‒ qu’il 
Possédait de ton être une seule fibre vraie (encore heureux !)..
Non, ta froideur l’emportait. Aplatie et évasée, tu restais vierg 
E et intacte. – Et lui ne serait jamais que valet, palefrenier... le 
Régisseur tout au plus, du domaine où tu étais – tellement peu 
Là, que... ta seule présence comptait. (Oui, elle est bien en exil,  
Mais elle le tient en lisière, lui ;  à tel point qu’il se sent comme 
Un domestique dans son propre château ; ce qui est une autre 
Forme d’exil et un rude châtiment,  mais il ne l’a pas volé, pas 
De pitié pour de pareils lourdauds !)  Tourne encore, Corbeau,   (2050) 
Vrai chantre (je t’agrée dans ce rôle comme tu agréas Oxymor 
E dans celui de la pauvre malmariée), vrai chantre de cette dé  
Solati.on... Corbeau, oh, crie, tonitrue ! quand ton vol s’est rap 
Proché. – La fiancée portugaise (eh bien voilà ! maintenant on 
Comprend mieux) à sa fenêtre est cambrée, l’œil fixe, les bras 
Ballants... et les cheveux dénoués. 
                                                                  Les châteaux, à travers 
Les branches —. Mais les branches commencent à tourner, un 
Élan, en torsion.  Toujours il y a une tempête mais quelquefois 
C’est seulement dans la tête comme dans la Mouchette (La Nou 
Velle Histoire de
) de Georges Bernanos. Ça eût tourné (Fernand   (2060)
Reynaud était marié avec une fille de Wailly-Beaucamp  :  sauf 
Erreur, une Tétu.   Le café Tétu était le principal café du village 
Sur la Nationale 1  qui servait de grand rue, près de la Poste et 
De l’école, de la boucherie et de la boulangerie.)  Ça a tourné ‒ 
Et pour preuve : ça tourne encore.  Froissement de branches et 
Bientôt, bruit de fracassement (ça n’est pas tout à fait la même  
Chose qu’un fracas). ‒ Les arbres tournent comme de grandes 
Roues et les fourches s’encornent,   s’enchevêtrent, les grands f 
Euillages dans un grand travail de mort tournoient...  sont pris 
Dans une torsion ensemble, un flamboiement froid – vont être   (2070) 
Déchirés. Les troncs basculent, voilà toute la masse d’un arbre 
Juste en train de se renverser (et vraiment c’est comme une gr 
Ande roue, ou même un type qui « fait la roue »). Racines pas 
Sent, follement lentes, toutes noires, en l’air, ‒ grouillement m 
Onstrueux, échevèlement jusqu’à la dernière pointe dans le ci 
El. Feuilles mortes  (il y en avait une couche épaisse sur le sol) 
Envolées, formant devant le peu de ciel qui restait (moins par 
Ce que l’arbre lui laissait peu d’espace que — une sorte de dé 
Perdition du ciel en lui-même ? d’effacement) — feuilles envo 
Lées formant devant le peu de ciel qui restait un banc d’astres   (2080) 

Dernier épisode le mercredi 14 mars 2012