... Le Major Grubert et André Cheval son fidèle factotum, John Difool, Mike Steve Donovan alias Blueberry, Jim McClure, Red Neck, Chihuahua Pearl, le Général Tête Jaune, Arzach, le Surfer d'Argent, le Bandard Fou, Stel, Atana, Alain Mangel, l'Incal et Werner Amadeus von Luckner ont la douleur de vous faire part du décès de leur père à tous, Jean Giraud alias Gir alias Mœbius. Levons notre verre et buvons un bon Poktroll qui, faut-il le rapeler est toujours composé d'un tiers de Djoul, un tiers de Caltrexine, un doigt de Zuzoton, de la Crotelle de Jouaint, de l'essence de l'Indergroune, du concentré de Bigablow et on décore traditionnellement le tout avec une petite schlougnette. À la grande question qui tarauda jadis Jean Giraud dans une chronique futuriste acide (voir ici L'Homme est-il bon ? ), s'agissant de lui, on peut affirmer sans doute aucun qu'il n'était pas bon. Jean Giraud était le meilleur de tous.
D'Arzach et ses histoires sans paroles aux déserts mexicains de Blueberry, de Pharagonescia aux sous-niveaux les plus infâmes de l'Incal, du Bandard Fou au Surfer d'Argent, Jean Giraud a promené sa plume avec une maestria qui a dégoûté plus d'un dessinateur amateur. Et professionnel. Giraud à la plume, c'est Mozart, Beethoven et Mahler, Hendrix, Page et Clapton, Klimt, Chardin et Van Gogh, c'était un talent hors-normes, des styles différents, un sens de la narration plus précis qu'un survol de Looma téléguidée, une capacité à vous embarquer dans son univers fou, improbable, unique en seulement une ou deux cases. Et quand le virus vous prend, vous finissez en suant à 4 heures du matin sous la couette dans le désert du Nevada avec Blueberry et ses acolytes, sur des planètes toutes plus étranges que les autres avec John Difool et l'Incal et bien d'autres plaisirs qui devraient presque être interdits tant ils emmènent loin, aux confins de la galaxie de son immense talent. Mœbius, Gir, Giraud, merci pour toute la poussière du désert dans mes bottes et les poussière d'étoile dans les yeux.
Jean Giraud 1938-2012.