A Nice, le candidat sortant voulait se montrer à « quelques jours du 50ème anniversaire de la signature des accords d’Evian, qui ouvrirent la voie à l’indépendance de l’Algérie », comme l'expliqua son équipe de campagne. Il voulait «rendre un hommage solennel aux rapatriés et aux Harkis.»
Le candidat cherchait l'électorat communautaire. «Il ne faut pas parler à une communauté, mais à des citoyens» déclara-t-il.
Il faisait exactement l'inverse, comme en 2007. Mais à 5 ans d'intervalle, les promesses non tenues étaient terribles.
Des promesses non tenues de 2007...
En 2007, le candidat Sarkozy avait usé et abusé de la repentance. « Personne ne peut plus défendre le système colonial : nous en savons la profonde injustice. Mais nous savons aussi qu’il ne faut pas confondre ce système politique, condamnable, et l’action des personnes qui coexistaient de manière pacifique, dont le souvenir mérite le respect ». Il s'agissait de donner des gages à celles et ceux qui voulaient réhabiliter les bienfaits de la colonisation ou se souvenir des douleurs de la décolonisation. « La mode de la repentance est une mode exécrable. Je n’accepte pas que l’on demande aux fils d’expier les fautes des pères, surtout quand ils ne les ont pas commises. »
Il avait aussi et surtout promis de réhabiliter les harkis, une « véritable discrimination positive ». En 5 ans, comme souvent, rien ne fut fait.
« Si je suis élu, je m’engage à faire pour vous une discrimination positive, doublement positive, la discrimination positive « plus, plus ». Vous êtes, vous les enfants de harkis, les premières personnes vers qui nous devons engager une politique de discrimination positive (…) par la mise en place de politiques individualisées en matière de formation, d’accès à l’emploi ou au logement, ainsi que des concours spécifiques d’accès à l’emploi public ou une politique particulière d’accès aux fonctions et postes politiques.Résumons- nous: en 2007, Nicolas Sarkozy avait donc 5 promesses:
Les harkis ayant été en captivité pourront bénéficier du titre de « prisonniers de guerre ». Ils seront tous « considérés comme des anciens combattant ».
La création rapide d’une Fondation pour la mémoire sur la guerre d’Algérie, dans laquelle les harkis (auront) toute leur place, avec les autres rapatriés. (…) Il faudra bien un jour rendre hommage aux victimes de cette « guerre sans nom » sur les deux rives, des victimes auxquelles on doit enfin donner des visages. »
#1: Accorder aux harkis le statut de prisonniers de guerre ou d'anciens combattants, une promesse non tenue;
#2: Créer une fondation pour la mémoire sur la guerre d'Algérie, une promesse non tenue;
#3: Mettre en place une politique individualisée en matière de formation, de logement ou d'emploi pour les descendants de Harkis, une promesse non tenue;
#4: Privilégier les Harkis et leurs descendants pour l'accès aux emplois publics, une promesse non tenue.
#5: « Reconnaître la responsabilité de la France dans l’abandon et le massacre des harkis en 1962 », une promesse... non tenue.
... aux répétitions de 2012
En 2012, le candidat Sarkozy cherchait encore l'électeur. Un sondage ne lui donnait aucune d'avance auprès des harkis (Le Pen 28%, Sarkozy 26%, Hollande 26%, d'après iTélé). Il n'avait pas grand chose à dire. Il y eut bien sûr des photos dans les rues de Nice, sur la promenade des Anglais, avec des militants UMP invités par le maire Christian Estrosi.
Nice Matin commenta sobrement: « Au cours d'un déplacement rapide et sous contrôle ce vendredi à Nice, le candidat-Président Nicolas Sarkozy a demandé "pardon" aux harkis au nom de la République. » Le quartier avait bouclé. Il fallait montrer son invitation personnelle ou sa carte de l'UMP pour franchir les barrages policiers.
Après avoir visité une entreprise de déménagement (sic!), le candidat sortant prit le thé, à Nice, avec quelques représentants d'associations harkies. Il avait « le teint gris et les traits tirés par la fatigue », commenta Solenn de Royer du Figaro.
A 5 ans d'intervalle, Nicolas Sarkozy a répété, quasiment mot pour mot, les mêmes louanges à l'égard de la communauté harkie.
« la France qui sortait des guerres coloniales et entrait dans une nouvelle ère de prospérité économique, a voulu oublier cette période et, avec elle, ceux qu’elle avait blessés et sacrifiés. (...) On a parqué les harkis dans des baraquements, on a demandé aux Pieds-noirs de se faire oublier et de n’embarrasser personne de leurs souvenirs ».Certains Harkis n'étaient pas dupes. Le site Harki.net dénonçait la manipulation: « le compte n'y est pas ! »
Nicolas Sarkozy a discrètement prévenu, s'il était réélu, inutile d'attendre mieux: «Nous, les autorités, nous avons une dette à l'endroit des harkis (…) mais je ne veux pas que cette dette soit portée par une communauté nationale qui n'y était pour rien.»
Les harkis sont prévenus.
Se laisseront-ils berner une fois de plus ?