Un automne-hiver dévastateur...

Orgasmes à répétition au défilé d'une des griffes qui fait battre nos petits cœurs alias Dévastée, la marque de François Alary et Ophélie Klère (en front row, SVP, petite précision pute du jour…). 
Pour être honnêtes, au départ, on a un peu flippé. Dévastée est une de ces marques qui a des codes tellement définis, tellement forts, tellement ancrés qu'il est difficile d'en sortir, de se réinventer : les croix surmontées de smileys, la traditionnelle ribambelle de références appartenant au cimetière, l'inconditionnelle robe chemise fluide, l'humour ironique noir et leur fameuse touche bicolore noir/blanc étaient donc bien au rendez-vous du show de la jeune marque française. Non pas que ce ne soit pas appréciable mais au bout d'un moment ça AURAIT pu être lassant. C'était sans compter que cet ADN tant reconnaissable affectionné par la cliente Dévastée a été pour le coup savamment remis en lumière par un jeu de créativité tout aussi subtil qu'efficace. On accueille donc avec gourmandise des découpes superposées, de l'imprimé surréaliste sur de la soie ou en melting pot décuplé à l'infini, sur marinière trashy ou comme peint à la main. À la fois surprenant mais toujours aussi désirable. Mais là où les Dévastée excitent les clitoris les plus vierges, c'est dans la maîtrise d'un vestiaire qui se fait autant jour que soir, toujours à la pointe d'une élégance sobre que les jeunes filles s'approprient de manière radicale tandis que les mères peuvent prouver une certaine subtilité stylistique sans en faire trois tonnes.Le délicat ensemble chemisier façon tapisserie et tulle accompagné du short large résume toute cette philosophie alors que le tailleur en une sorte de brocart (nouvelle étoffe phare de la saison) finit d'asseoir une maîtrise des matières et des coupes qui évoque un luxe aiguisé, perçant et perspicace. Une véritable valeur ajoutée qui donne le pouvoir d'une mode extrêmement pointue à celle qui le porte et reconnaissable au premier coup d'œil. Le combo pantalon sous le genou/tee-shirt avec visuel étrange semble être aussi une nouveauté discrète qui a eu son petit effet. L'allure rock qu'il dégage n'est pas habituelle mais d'une accessibilité qui renforce l'évidente compréhension de l'air du temps des deux jeunes créateurs sur un créneau simple et pourtant fin. Est-il nécessaire de parler des nouveaux imprimés, talent dans lequel Ophélie Kelre et François Alary excellent à la perfection? Une marque de fabrique inconditionnelle qui propose cette saison : feuilles mortes mais heureuses de l'automne, presse-agrumes, ciseaux et mains baladeuses, autant d'absurdités humoristiques qui procurent un choix vaste et largement appréciable par un côté second degré complètement assumé. Par contre, on aurait tort de ne pas insister sur les chaussures : un mocassin en plastique brillant, sorte de mélange entre la méduse et l'espadrille qui réveille l'envie autant par son design soigné et épuré que par son don à pouvoir être associé à tous les styles et toutes les tenues. Un lancer franc réussi aussi dans le domaine de la robe du soir avec des propositions baroques et bouffantes, aux drapés surjoués, aux impressions insolites et aux étoffes très chic qui devrait certainement plaire aux inconditionnelles de l'effet de style tapageur mais pas outrancier. 
Bref, Dévastée reste finalement dans sa lignée d'une création sûre, qui a installé ses envies comme des basiques décalés, indispensable à toute garde-robe comme à toute saison. On sent la passion qui s'anime et vit sur le podium, on a envie de se mouvoir dans ses douceurs d'un luxe sage, divinement étudié, impressionnant de légèreté comme d'aisance d'appropriation. On approuve, on adore… On ira en total look à l'enterrement de celle qui aura essayé de nous voler notre taille en magasin. 
Bien à vous.