Je reviens de Cuba, ce drôle de pays libéré avec l'appui des américains au tournant du XXe siècle puis devenu communiste, socialiste, marxiste ou castriste en 1959. 50 ans de lendemains qui chantent faux ont fait un pays et un peuple qui déchantent mais ne s'égosillent pas encore.
Les lendemains qui chantent sont cette foi absolue et idéologique en la capacité de l'homme à se sauver lui-même. La révolution, les idées, le progrès, l'Etat, le peuple vaincront. L'homme trouvera son bonheur. Il n'y aura plus d'oppression. Sur le papier, la promesse est belle et certains continuent à la trouver généreuse. Mais elle est inhumaine.
Certes Cuba peut se glorifier de son taux de chômage quasi inexistant, de son niveau d'éducation, de son système de santé. Les habitants ont un toit et peuvent manger. Mais un robot travailleur ne fait pas un homme digne, un fonctionnaire nourri ne fait pas un être libre et créatif, un villageois abreuvé de propagande ne fait pas un esprit empli de transcendance.
Je reviens de Cuba et me retrouve en France. Des milliers de kilomètre et toujours le même débat. Le socialisme français n'est pas à l'image du castrisme et ses lendemains chantent différemment. Mais il y a malgré tout, ancrée chez beaucoup de mes concitoyens, cette volonté de croire que l'homme et les structures apporteront le bonheur. Demain sera meilleur. L'Etat nous protégera, l'Etat s'adaptera, l'Etat nous endormira. L'Etat, c'est nous, la démocratie, l'homme. L'homme qui sait bien ce qui est bon pour lui.
Ainsi, nous tombons dans cet espoir que l'Etat qui validera notre mode de vie, l'Etat qui créera l'égalité, l'Etat qui imposera la charité conduira au bonheur. "Soyons réalistes, exigeons l'impossible", hurlait Che Guevara.
Deux personnes du même sexe ne peuvent pas enfanter, exigeons l'impossible. La mort fait partie de la vie, exigeons l'impossible. Les footballeurs ne veulent pas payer d'impôts... euh non, n'exigeons rien...
A l'inverse de Marx, Saint Thomas d'Aquin et la philosophie politique chrétienne ont toujours recentré le débat. L'homme ne peut pas tout. Il est dépassé par sa propre création. Le mal existe. Le Meilleurs des Monde, la Guerre des Boutons ou Sa Majesté des Mouches ont mis en évidence cette réalité. Le mal existe et c'est ainsi que la théorie politique de Saint Thomas et même plus tard celle de Descartes décrivent l'importance de la morale.
Etre pour le progrès, être progressiste ne veut rien dire. Vers quoi progressons-nous? La science peut progresser vers l'eugénisme ou vers la charité. L'économie peut progresser vers la richesse segmentante ou vers la charité. Le sport peut progresser vers l'idolâtrie, la guerre ou vers la charité.
Face au progrès, j'oppose toujours la même chose : la vocation. La vocation de l'homme, c'est l'amour. La charité. Je peux être financier, ouvrier, sportif, homme politique, chanteur, ma vocation n'est pas de "progresser" seul vers la gloire, la richesse, le pouvoir ou le plaisir mais de "progresser" vers plus d'amour. Je peux être homo, blanc, riche, noir, hétéro, handicapé, ma vocation n'est pas de "progresser" en exigeant l'impossible mais de "progresser" vers plus de charité. Je suis donc appelé à offrir ce que je suis aux autres en m'appuyant sur une morale qui me permette de discerner ce qui est bien et mal et donc d'offrir uniquement ce qui est bien.
L'homme n'est pas un animal, car l'homme discerne. C'est ce discernement libre qui lui permet de faire le choix volontaire de la charité et donc du bien. Il y a dans le progressisme actuel un triple meurtre : le meurtre de la liberté (l'état nous sauve), le meurtre de la charité (je me sauve) et le meutre de la vérité (Dieu et sa morale ne me sauvent pas).
Je reviens de Cuba où les gens mangent et travaillent. L'homme, ce n'est pas ça. Il a une dignité qui le rend exceptionnel. Nous sommes tous des révolutionnaires qui voulont changer le monde. Mais je préfère me battre comme les chouans autrefois pour préserver ma liberté, ma charité et ma vérité que pour avoir quelques droits qui n'accordent du plaisir qu'à moi... et encore.