Ce mois-ci le Courrier des Maires et des Elus Locaux consacre un dossier sur la relation élu - dircom ; signé par la journaliste Sophie Le Gall.
Intervenant dans ce dossier au titre de mon travail de Dircom de la Région Auvergne, je vous invite à retrouver ci-dessous le dossier.
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Elu-dircom : une relation ne souffrant aucun désaccord
Elle repose sur un contrat de confiance absolue et réciproque. Le dircom a
une fonction stratégique auprès de l’élu. Ce dernier attend de lui expertise et sens de l’innovation.
Si un
maire attend de ses proches collaborateurs qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes, cette attente est d’autant plus forte en ce qui concerne son directeur de la communication. Le tandem
élu-dircom repose sur un contrat de confiance absolue et réciproque. L’élu a besoin de son conseiller pour s’imposer dans un univers où la communication est de plus en plus présente et
complexe. De son côté, le professionnel attend qu’on lui donne les moyens d’exercer pleinement sa fonction.
Philippe Cochet, député-maire (UMP) de Caluire-et-Cuire (69), donne le ton : « Avec son directeur de la
communication, l’élu doit très vite fonctionner comme un vieux couple. Se comprendre sans se parler. » Pour favoriser cette symbiose, les élus ont tendance à choisir un collaborateur au
tempérament proche du leur. Certains, comme René Souchon, président de la région Auvergne, confient avoir « repéré » un chargé de mission qui ferait « un parfait dircom ». « Il faut une
connaissance mutuelle parfaite », corrobore le professionnel en question, François Kuss, « en comprenant comment il fonctionne, je peux traduire parfaitement ses convictions ».
Affinités sélectives
Antoine Gimenez, consultant du cabinet de recrutement Quadra Collectivités ∓ Habitat, observe que
les élus font leur choix en se basant « sur la formation, l’expérience et la personnalité des candidats » et « que c’est la personnalité qui fera la différence ». En tête des qualités
recherchées : la loyauté, la capacité de management et le sens de l’innovation. Philippe Cochet confirme : « Il ne doit pas y avoir l’ombre d’une suspicion de non-loyauté ! » Qu’on ne se
méprenne pas : loyauté n’est pas synonyme de soumission. « Je me réserve le droit à la critique », insiste François Kuss, « un dircom ne peut pas faire partie d’un cercle de courtisans ».
Fait nouveau, l’élu cherche un conseiller qui possède une expertise en matière de nouvelles technologies. « L’élu se demande comment se positionner face aux enjeux numériques, terrain
expérimental et glissant. Son dircom doit lui apporter des réponses », explique Antoine Gimenez.
« Tout le monde pense pouvoir faire de la communication, alors qu’il y a des techniques à maîtriser, rappelle Hervé Cochetel, directeur de la communication du conseil général de l’Indre.
Dans ce contexte, un dircom doit s’affirmer comme un professionnel qui a des compétences à faire valoir. » La dernière édition de l’enquête triennale Cap’Com-Occurrence* insiste sur la
professionnalisation de la fonction : plus des deux tiers des communicants publics ont aujourd’hui un niveau d’étude Bac 4, une tendance soutenue par « une montée en puissance des
diplômes de communication ».
Alain Doudiès, ancien communicant en collectivité et aujourd’hui consultant indépendant, ajoute que « le dircom espère, certes, être perçu comme un technicien loyal, mais aussi comme un
préconisateur, un expert à même de traduire l’état de l’opinion ».
Une fonction éminemment stratégique
« Il y a une trentaine d’années, lorsque j’ai été élu pour la première fois, il y avait de
l’information ou de la propagande mais pas de communication. Aujourd’hui, la communication est partout et l’écoute extrêmement restreinte. Je compte donc sur mon dircom pour concevoir
des campagnes qui marquent le public, audacieuses voire décalées », explique René Souchon. « Surtout, il faut faire intervenir le service communication dès le lancement du projet et non
en bout de chaîne », renchérit François Kuss, son dircom, « la communication, ce n’est pas le papier cadeau, mais le fond qui affleure ». De fait, les dircoms ont besoin d’être associés
aux projets de la collectivité dès leur conception. Une attente qui semble de mieux en mieux comprise par les élus : en 2011, 81 % des communicants déclarent être consultés dès l’amont
d’un projet, alors qu’ils n’étaient que 64 % en 2008 (enquête Cap’Com-Occurrence). Pour traduire l’importance stratégique de la communication, des élus, pour l’instant minoritaires,
font d’ailleurs le choix d’intégrer le service concerné à leur cabinet. « C’était pour moi une évidence que de rassembler mes plus proches collaborateurs », témoigne ainsi Philippe
Cochet.
« La fonction de dircom est très exposée », estime Jean-François Lanneluc. Actuellement directeur général adjoint de la ville et de la communauté urbaine de Strasbourg, il en a fait
l’expérience, ayant dû quitter son poste à la ville de Lyon suite à un désaccord avec Gérard Collomb, tout en restant « passionné par ce métier ».
Dommages collatéraux
Jusqu’à quel point un élu demande-t-il à son dircom de s’engager politiquement ? La question n’est
pas taboue, mais presque. « Lors d’un recrutement, on ne va pas s’enquérir de la couleur politique du candidat. Par contre, on va évaluer son sens du politique, notamment parce qu’on
ne lance pas un projet en début ou fin de mandat de la même façon », explique Antoine Gimenez. « On ne va pas se mentir : si on est le directeur de la communication de la collectivité
et non celui de l’élu, on veille à l’image de cet élu », explique, franchement, Hervé Cochetel. « Un élu va avoir du mal à se passer de son dircom en période électorale, même si la
loi borde rigoureusement la situation. Le professionnel sera par exemple consulté dans le choix de l’agence qui va gérer la campagne », confie Alain Doudiès. « Ceux qui affirment
qu’ils ne travaillent pas à la réélection de l’élu sont hypocrites ! Dès qu’on valorise un territoire, l’élu en bénéficie », assène Jean-François Lanneluc. Conclusion : quand un élu
tire sa révérence, son dircom fait de même.