L’écrivain face à l’art

Publié le 08 mars 2012 par Les Lettres Françaises

L’écrivain face à l’art… (3)

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Frida

Frida Kahlo la beauté terrible, de Gérard de Cortanze

En ouvrant Frida, de Gérard de Cortanze, je me suis écrié : un de plus ! Après ses journaux intimes, ses lettres, les nombreuses monographies et les catalogues, le film, la biographie de Le Clézio, j’étais en droit de m’interroger sur le bien-fondé de cette nouvelle étude. Eh bien, ma méfiance était mal placée. L’auteur d’Assam, qui lui vaut le prix Renaudot en 2002, est parvenu à faire un portrait très juste de l’artiste mexicaine, sans jamais le dissocier de son œuvre, qui est amplement autobiographique. Cette Frida que l’écrivain français nous fait découvrir est campée avec beaucoup de sensibilité, mais sans fioritures, débarrassée des mille légendes qui l’entourent et d’un folklore excessif, parfois malsain. Il va de soi qu’il ne s’appesantit pas sur des aspects de sa vie – par exemple, il ne s’attarde pas trop sur sa liaison avec Trotski, ni sur son engagement politique. Tout cela est dit, mais sans entrer dans le détail. Ce qu’il désirait avant tout, c’était de rendre évident le fil rouge de l’existence mouvementée et riche de cette femme frappée par le destin et qui fit de ses sept douleurs un univers aussi angoissant que fascinant. Et c’est cette faculté de séduire et de fasciner qu’il restitue ici avec talent, dans un style enlevé et vivant. Et nous devons lui être reconnaissants de ne pas l’avoir assimilée au surréalisme, même si elle a eu des liens avec Breton et si sa peinture partage quelque chose de cette esthétique du rêve. Frida Kahlo nous est restituée telle qu’en elle-même, avec force et talent. À nous ensuite d’aller nous enquérir du reste. Une seule chose, cependant : la quatrième page de couverture dissimule une vérité importante : le dernier tableau que Frida a peint est resté sur son chevalet et on peut toujours le voir dans l’atelier de la Casa Azul, devenu musée – il s’agit du portrait de Staline !

Gérard Georges Lemaire

Frida Kahlo la beauté terrible, Gérard de Cortanze, Albin Michel, 224 pages, 17 euros.