Cinquante ans après la parution du roman, il est plaisant de constater que le propos de Ken Kesey n'a pas pris une ride.
Adapté pour la scène juste après sa sortie en librairies par Dale Wasserman, bien avant que Milos Forman n'en fasse le chef d'oeuvre cinématographique que l'on sait porté par Jack Nicholson, cette dénonciation des dictatures de toutes sortes, cette ode à la liberté, à l'amitié, ce manifeste pour le droit à la différence fonctionne toujours aussi bien.
Après avoir été massacré de façon malheureusement mémorable par Bernard Tapie il y a quelques années, le script arrive aujourd'hui entre les mains de la jeune compagnie "Caravane", sans aucun doute plus inspirée. Celle-ci tente à son tour de proposer sa version de l'affrontement opposant la terrifiante infirmière Miss Ratched, régnant sur les pensionnaires plus ou moins atteints de l'hôpital psychiatrique où se déroule l'action, au sympathique voyou multirécidiviste Mc Murphy, envoyé sur place par une justice désireuse de s'assurer qu'il a bien toute sa tête.
Le travail est honnête, va dans le bon sens. Stéphane Daurat, dans sa mise en scène et sa direction d'acteurs, ne se trompe pas sur les enjeux. mais le résultat manque de force et comporte quelques faiblesses. De jeu essentiellement.
Arnaud Perrel peine en effet à remplir pleinement les habits de Mc Murphy. L'intention est juste mais précipitée, parfois maladroite, compensant par une gestuelle trop démonstrative une intensité intérieure manquante. Catherine Hauseux paraît pour sa part un peu jeune pour incarner cette femme de poigne qu'est Miss Ratched. Et si globalement la distribution ne démérite pas, on regrette des sentiments, des situations ou des séquences qui n'osent prendre leur temps, et font presque passer le spectateur à côté de la puissance de l'oeuvre. Evoquons, en guise d'exemples, une colère qui monte trop vite, des tensions entre protagonistes pas assez latentes, une fête entre patients pas sitôt commencée qu'elle est déjà finie, ou encore une image de fin, forte pourtant, coupée avant que l'on ait pu l'apprécier véritablement... Dommage.
Reste un spectacle malgré tout de bonne facture, permettant de redécouvrir une pièce et de découvrir quelques talents. Citons Thierry Jahn, très touchant dans le rôle du gamin bégayant, mais aussi Olivier Deville, Olivier Baucheron et Patrick D'Assumçao dont les compositions de personnages bordeline sont brillantes.
Alors pourquoi pas ?