Les Politic Angels, le premier « action tank » citoyen, est né de l’opposition des pouvoirs publics à toute amélioration de la politique locale d’élimination des déchets.
Les Politic Angels sont devenus des spécialistes de cette question, et vous proposent ici d’explorer l’édifiante gestion des déchets dans notre pays, et de contribuer à la changer, en un clic de souris.
Les Politic Angels (voir Politic Angels : « Remettre le citoyen au centre du jeu politique ») veulent donner aux citoyens le pouvoir de prendre leur destin en mains, en agissant pour des objectifs d’intérêt général, par des initiatives concrètes, « avec ou à côté des politiques » .
Seconde partie de l’interview de François Lainée, fondateur de ce mouvement.
Sur le thème des déchets ménagers, comment jugez-vous la politique des collectivités ?
Il existe une extraordinaire opacité sur la performance des politiques de traitement des déchets, par l’effet d’un mélange d’ignorance, de peur et de volonté délibérée.
D’abord, il existe plusieurs types de déchets (résiduels, sélectifs, …), plusieurs circuits de collecte et de traitement. Selon les communes, cette compétence relève de communes, de communauté de communes, de SIVOM [ syndicat intercommunal à vocations multiples,ndlr], etc.
Enfin, il existe au moins deux types de gestion : en régie ou en délégation de service public (auprès d’entreprises comme Véolia, Suez environnement ou autres).
La gestion des opérations en régie et plus encore des contrats est, du coup, parfois assez complexe. Conséquence, il faut une vraie volonté des élus pour analyser leur performance, et notamment leurs coûts. Et il faut ensuite une volonté de transparence pour la communiquer au citoyen. Pour lui, au bout de la chaîne, aujourd’hui c’est la nuit.
Ces coûts dépendent du volume traité, du prix à la tonne qui dépend lui même des modes de collecte, de tri (déchetterie, etc.), et enfin de la transparence des élus sur ces questions. La loi oblige le gestionnaire de déchets à publier chaque année un rapport sur la qualité du service de l’année.
Sorti de la communication institutionnelle, les informations qui y figurent sont très variables, la partie sur les coûts particulièrement.
Qu’avez-vous découvert ?
Stimulé par le contexte de naissance des Politic Angels, nous avons fait de la mesure de cette performance et de son affichage une action test pour l’approche des Politic Angels : il s’agit d’un sujet d’intérêt général, l’exemple de Cergy-Pontoise nous a montré qu’il y un important potentiel d’amélioration, et qu’il va falloir une énorme énergie citoyenne pour faire bouger les choses.
Ce qui a déclenché le début de nos travaux à l’échelle nationale, c’est la découverte, il y a un an, d’une base de données (Sinoe), que l’ADEME [Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, ndlr] a constituée en apprenant aux collectivités à mesurer leurs coûts de façon précise et homogène.
Nous avons demandé à disposer des résultats de cette base, payée par les deniers publics : refus de l’ADEME, sans recours. Jean-Louis Borloo, le ministre de l’époque, nous a écrit qu’il n’avait pas autorité sur l’ADEME !
Nous avons donc contacté toutes les communes qui avaient participé à l’étude de l’ADEME pour constituer notre base de données de performance. Elle est aujourd’hui la seule base disponible en ligne sur ces questions. Elle permet aux citoyens des territoires couverts de connaître la performance de volume par habitant, coût à la tonne et transparence de communication, en absolu et relatif par rapport à l’échantillon.
Vous pouvez y accéder ici.
Nous avons également publié sur le net un rapport de synthèse disponible pour tous. Ce rapport montre par exemple qu’il existe un facteur 3 entre le coût global à la tonne des 15 territoires les plus chers et les 15 les moins chers.
Un potentiel d’économie d’un milliard d’euros par an
Cette comparaison des plus et moins coûteux livre aussi des secrets que nous n’avons pas lus ailleurs : les communes les plus vertueuses sont celles qui ont le plus fort taux de collecte en déchetteries. Une fois qu’on le sait, cela paraît logique puisque c’est le citoyen qui fait alors le travail de collecte et de tri.
Mais les recommandations des gourous de la politique publique des déchets n’en ont, à notre connaissance, jamais fait la remarque.
Nous avons également estimé un potentiel d’économie dans chaque territoire. Au total, à notre avis, un potentiel d’économie de l’ordre du milliard d’euros par an en France.
Autres enseignements : la délégation de service public n’entraîne pas toujours les coûts les plus élevés, ni le contraire d’ailleurs. Le politique, la volonté des élus et la qualité de gestion des équipes compte certainement beaucoup dans la performance.
Pas de fatalité, comme le disent parfois des élus résignés. Sur ces questions, nous pensons que les responsables locaux doivent avant tout s’équiper de solides compétences de négociateur et de gestionnaire.
A la décharge de nombreux élus face à ce sujet compliqué, il faut reconnaître que les autorités nationales ont fait preuve sur ce thème d’étonnantes lacunes.
Ainsi le Grenelle de l’environnement, qui aborde bien sûr la question des déchets, ne donne aux élus que des objectifs de réduction de volume. La performance financière des politiques n’est pas abordée le moins du monde, et l’idée même de la mesurer semble avoir échappé (involontairement ?) à tous les experts réunis à l’occasion !!
Quelle action menez-vous sur ce thème ?
Les Politics Angels souhaitent mettre les gestionnaires publics en mouvement pour améliorer la performance de ces politiques, et réaliser ainsi une partie de ces économies potentielles de 1 milliard d’euros. Nous pensons qu’une obligation de mesurer et d’afficher de façon transparente la performance de ces politiques mettra la machine en marche, en forçant les gestionnaires à prendre conscience des problèmes à résoudre.
Concrètement nous souhaitons que, dans chaque territoire; la performance, notamment de coût, de la politique locale d’élimination des déchets soit mesurée de façon homogène et surtout communiquée aux citoyens.
Pour cela nous demandons que les territoires soient obligés, par la loi, d’ajouter les bons indicateurs de performance dans les rapports publics sur le service d’éliminations des déchets, et de publier également ces indicateurs sur un site Internet public ouvert à tous les citoyens.
Après de nombreux courriers et un article dans Marianne qui interpellait Nathalie Kosciusko-Morizet, le ministre de l’Environnement avec le 0/20 de son territoire en matière de coûts, nous avons tout récemment obtenu d’elle un courrier nous indiquant son désir de mettre en œuvre notre idée, et de nous associer à cette mise en œuvre.
Un succès indéniable pour notre jeune mouvement. Si cette intention est sincère…
Mais déjà la suite tarde, et nous attendons à nouveau une réponse au plan de travail simple et précis que nous lui avons envoyé en retour. Aussi, pour stimuler le mouvement, nous proposons aux internautes d’utiliser un dispositif innovant d’appel à l’action publique qui fait partie de notre arsenal de moyens d’actions.
Propos recueillis par Jean-Baptiste Leon
Articles similaires :