“Allez, vous chantez avec moi? Merde, j’ai oublié…on est à Paris”. (au Scop’Club)
Un chanteur souhaitait faire participer le public parisien. Il demande à celui-ci de faire quelques vocalises et de taper les mains histoire de créer un semblant d’ambiance dans cette salle réputée être glaciale. Sauf que voilà, à Paris, ça ne se passe pas vraiment comme ça. Une bonne partie de la population qui se rend dans une salle de concert (ou club) est composée de gens de milieux. Entendez par là : 1. les pros de la musique (labels, tourneurs, managers), 2. les journalistes, blogueurs, photographes (ceux qui grattent quoi) etc… Des gens donc qui sont là par plus pour boulot ou affaires plus que par affinités ou curiosité. Autant dire que ce qui se passe sur scène, ils en ont carrément rien à péter, car plus occupés à parler business et crise du disque, ou alors siroter leur quatrième planteur de la soirée.
“Ce serait bien si vous pouviez prêter attention à ce que je raconte”. (à l’OPA Bastille)
C’est la conséquence logique, ça parle souvent très fort et ça n’écoute pas beaucoup. La musique ne s’écoute pas ou plus.Le mec sur scène parle de guerres et de société alors qu’un groupe dans la salle rigole aux blagues pétées d’un mec qui raconte comment il n’a pas réussi à pécho une meuf en soirée. Ce gars-là sur scène, il fait le jukebox moderne, crée l’ambiance, ce qu’il chante, on s’en fout. A croire que la musique est devenue un vulgaire et banal produit de consommation, un truc qu’on entend mais qu’on n’écoute pas. Tu danses dessus en boîte, tu balances ton David Guetta fort quand t’es dans ta caisse, tu aurais oublié dans dix jours le titre de la chanson. T’as déjà écouté ce qu’il raconte? Non évidemment. Pourquoi faire.
“On m’a dit que le public parisien était chaud, moins je vous trouve timide voire coincé”. (entendu à la Maroquinerie)
Un rockeur fait son show en avalant ses litres de whisky. Lui, il s’en fout il bouge et fait le show. Il est dans sa bulle, maltraite et triture sa guitare. Mais, à un moment il ouvre les yeux et se rend compte que même s’il envoie des kilowatts de rock bien crade, le public pourtant présent en masse ne bouge pas beaucoup (la salle est pourtant sold-out). A Paris, on ne danse pas, on ne saute pas, on ne chante surtout pas on est trop hype pour ça. On se contente de battre la mesure du pied, et de regarder les yeux plissés le chanteur s’époumoner. On est déjà là dans la salle, on a fait l’effort de venir, faut pas non plus nous demander de bouger.
“Vous êtes vraiment tous super stylé, j’aurais peut-être du faire un effort vestimentaire” (entendu au Bus Palladium)
On n’a mis le doigt dessus. A Paris, on va en concert 1. pour boire 2. draguer 3. montrer ses nouvelles acquisitions de chez The Kooples et American Apparel. Une salle de concert, c’est un peu comme un catwalk. Tu rentres pas dans une salle de concert si t’es pas tirés à quatre épingles, sait-on jamais un photographe des Inrocks, l’Express Styles ou le Bonbon Nuit pourrait passer par là et décider de te tirer le portrait pour ses pages “look”.
J’aime la musique en live, et je pète souvent des câbles à entendre les conversations des gens plus que les gens qui chantent. Pendant le Festival Fireworks! j’ai été choqué de voir combien le public était réceptifs à ce qui se passait sur scène. Normal, il était composé à 70% d’anglo-saxons. “Les Américains ne viennent pas que pour boire une bière, ils sont quand-même vachement intéressés par la musique, aux US cela fait partie de leur culture. Venir écouter un groupe pour eux c’est commun“, expliquait Revolver… Les Parisiens eux? On ne sait pas trop pourquoi ils viennent.