Transport

Je voyais une fille
Courir sur le trottoir
Et je savais ce après quoi
Elle courait.
Sans presser le pas
J'avais le temps de fumer ma clope
De traverser sur les clous
Et monter dans le bus
Une fois de plus
Je me suis senti béni des Dieux
Juste pour un quart d'attente épargnée.
[C'était plutôt du transport en solitaire.
En trois jours
J'avais perdu un ami
Et cette fille
Bon dieu cette fille
Deux fois la même erreur
En trois jours
Mérite un flingue sur la tempe
La peine de mort sans justice
J'en vois aucune qui lui ressemble
Son sourire scotché sur mes pupilles
Pendant le trajet
Je cherchais dans mes poches
L'espoir de me rattraper
Et en ai conclu
Que je ne valais pas un clou.]
J'aurai voulu m'éteindre comme eux:
Ils n'avaient une lueur dans le regard
Que lorsque une place assise se libérait
Les rapaces des transports en communs.
Freinage brusque
Je force sur ma jambe gauche
La rend plus douloureuse
Mais reste stable
[Je pouvais très exactement distinguer le remord du regret
La douleur
Fatalement
Est presque un don
Qui se mérite
Ni une punition
Encore moins l'orgasme primordial
Juste un moyen
Parmi tant d'autres
De se sentir en vie.
Vrai que l'attendre sur le parking
Et aller prendre le petit déjeuner au centre ville
Ou prendre le train ensemble
Ses cheveux blonds sur mon épaule
Sont de bien
Meilleures choses
Pour attraper l'instant au vol.]
Les gens en descendant du bus
Marchaient tous plus vite que moi
Et que ma patte folle
Je me sentais encore plus faible
Et j'avais envie d'arracher cette merde de matériel
Dans mon dos.
Cafétéria de la BU
Fred recharge les distributeurs
Echange de salutations
Je retrouve mon calme
En respirant une fois
une fois
une fois
à pleins poumons.
[En fait
Je me suis arraché les yeux
Sans aucune raison
Sans aucune excuse
Alors que toutes les couleurs
Etaient plus nettes
Depuis les premières neiges de l'année.]
J'avais pile la monnaie
Pour un café
Qui avait un goût de retrouvailles
Avec moi-même.
Peut-être que le jour passerait sans que je foire quoi que ce soit.