Glasgow Frightfest 2012 – Les Critiques (2/3): Corman’s World – The Day – Penumbra – Cassadaga

Par Geouf

Corman’s World : Exploits of a Hollywood Rebel

Résumé: Un documentaire retraçant la carrière de Roger Corman, le pape de la série B hollywoodienne, qui a notamment lancé la carrière d’un nombre incalculable de stars…

Les documentaires retraçant la carrière de personnalités du cinéma sont légion, en particulier sur les bonus des DVD, mais peu sont ceux pouvant se targuer de bénéficier d’une sortie en salle, même limitée. L’exercice s’avère en effet souvent scolaire et didactique, alternant interviews appliquées et extraits des œuvres de la personnalité étudiée. Corman’s World suit ce schéma, mais heureusement pour le spectateur, le réalisateur Alex Stapleton a retenu les leçons enseignées par son confrère Mark Hardley, metteur en scène des excellents Not quite Hollywood et Machete Maiden Unleashed. Corman’s World applique donc à la lettre la formule gagnante des deux œuvres sus-citées, en mêlant style dynamique, interview décontractées et extraits de films amusants.

Difficile en effet d’aborder la carrière du prolifique Roger Corman (plus de 50 films en tant que réalisateur et 400 en tant que producteur, sur près de 60 ans) selon un angle sérieux, celui-ci ayant bâti son empire sur l’économie de moyens et la débrouille. Corman’s World enchaîne donc à un rythme soutenu les interviews rigolardes (notamment d’un Jack Nicholson déchaîné) et les extraits de films ringards aptes à faire rigoler le public. Cependant, le film n’oublie pas d’être sérieux, et ne se moque jamais méchamment, les différents intervenants reconnaissant bien volontiers que sans Corman ils n’auraient pas eu la même carrière. Il soulève même d’intéressantes idées, comme le fait que Corman a été le premier à s’intéresser au public adolescent en leur proposant des films spécialement tournés pour eux. Enfin, Corman’s World permet au spectateur de découvrir des facettes insoupçonnées du producteur, notamment en déterrant le méconnu The Intruder, drame de 1962 réalisé par Corman et s’attaquant au sujet du racisme à une époque où il était toujours accepté d’appeler un noir « négro ».

Corman’s World est un passionnant documentaire, dont la forme ludique dissimule une mine d’information sur une des personnalités les plus importante d’Hollywood.

Note : 7.5/10

USA, 2011
Réalisation : Alex Stapleton
Scénario : Alex Stapleton, Gregory Locklear

The Day

Résumé: Suite à une apocalypse ayant ravagé la planète, un petit groupe de survivants parcours les routes d’Amérique en quête d’un abri et de nourriture. Ils font halte dans une maison abandonnée qui se révèle très vite être un piège tendu par un clan de cannibales. Le petit groupe s’organise pour tenter de survivre à l’assaut de ces adversaires impitoyables.

A priori, The Day n’avait rien de franchement attirant: un univers post apocalyptique peu original évoquant très fortement celui de La Route, un réalisateur dont le seul fait d’arme était l’affreux Highlander Endgame… Bref, rien de bien excitant. Et pourtant, ce film à petit budget s’avère au final une très bonne surprise.

Conscient de ses moyens limités, le réalisateur Douglas Aarniokoski a pris le parti de limiter le lieu de l’action à une maison abandonnée, de limiter son nombre d’acteurs, et de se reposer principalement sur eux. Pour cela, il a engagé une excellente troupe de jeunes comédiens, tous totalement impliqués dans leurs rôles : Dominic Monaghan (Lost, Le Seigneur des Anneaux), Shawn Ashmore (X-Men, Mother’s Day), Shannyn Sossamon (Les Lois de l’Attraction, Chevalier), Ashley Bell (Le Dernier Exorcisme), et Cory Hardrict (World Invasion : Battle Los Angeles). The Day leur permet à tous de livrer d’excellentes performances, assez éloignées de leurs rôles habituels. Shawn Ashmore est notamment impressionnant de rage refoulée dans son personnage d’homme brisé suite à l’enlèvement de sa femme et de sa fille par des cannibales. Ashley Bell de son côté fait immédiatement oublier son rôle de jeune fille possédée pour incarner à la perfection cette femme en quête de rédemption. Bref, The Day offre au spectateur des personnages fouillés et passionnants, ce qui n’est pas le moindre de ses mérites.

Car au-delà de cette étude de caractère, le film d’Aarniokoski est aussi un film de siège hargneux et violent, comme le prouve sa seconde moitié. On pense énormément au Assaut de John Carpenter, en beaucoup plus violent. Les scènes de combat sont impressionnantes de brutalité et de maîtrise (on n’hésite pas à tuer des enfants), à tel point qu’on a du mal à croire qu’il s’agit bien du même homme qui a mis en boîte le mollasson Highlander Endgame. Et le temps pris à introduire les personnages en début de film est payant, puisque chaque mort est plus douloureuse que la précédente.

Drame poignant, thriller stressant et film d’action maîtrisé, The Day est une très bonne surprise qui, malgré son léger manque d’originalité, devrait sans peine combler les fans de péloches fantastiques avec un cerveau.

Note : 7/10

Etats-Unis, 2012
Réalisation: Douglas Aarniokoski
Scénario: Luke Passmore
Avec : Dominic Monaghan, Shawn Ashmore, Ashley Bell, Shannyn Sossamon, Cory Hardrict

Penumbra

Résumé : Marga (Cristina Brondo), une jeune espagnole arriviste et carriériste, est envoyée à Buenos Aires pour le travail. Elle en profite pour tenter de trouver un nouveau locataire pour le vieil appartement familial, alors que toute la ville est en fébrile attente de l’éclipse solaire qui doit avoir lieu dans la journée. La rencontre avec l’agent immobilier s’occupant de l’appartement prend vite une tournure étrange, celui-ci insistant pour louer immédiatement les lieux à un mystérieux client…

Les frères Bogliano, les réalisateurs argentins de Penumbra, ont déjà derrière eux une longue carrière dans le cinéma horrifique. Avec Penumbra, ils s’attaquent au genre du thriller millénariste, très en vogue ces dernières années avec toutes les annonces de fin du monde proche, et invitent la très jolie Christina Brondo (L’Auberge Espagnole) à se joindre à eux. La jeune actrice incarne ici Marga, une jeune femme arriviste aux prises avec les membres d’une étrange secte désirant lui louer l’appartement familial à l’occasion d’une éclipse solaire.

La spécificité de Penumbra, c’est qu’en plus d’être un thriller, il joue aussi la carte de la comédie satirique. A vrai dire, à la vision du résultat, on pense beaucoup au cinéma du réalisateur espagnol Alex de la Iglesia. Le personnage de Marga rappelle d’ailleurs fortement celui incarné par Carmen Maura dans Mes chers Voisins, et le mélange comédie – horreur est typique du style du réalisateur du Crime Farpait. Le problème, c’est que dans Penumbra l’intrigue est un peu trop cousue de fil blanc. Le spectateur a souvent trois coups d’avance sur le personnage principal, et on finit par s’agacer assez vite de voir celle-ci faire des allers-retours incessants entre l’appartement et le devant de l’immeuble pour découvrir à chaque fois que de nouvelles personnes sont arrivées durant son absence. De plus, son aveuglement devant la situation confine parfois presque à la bêtise. Seule la question du but ultime recherché par l’inquiétante secte tient au final en haleine.

Heureusement, la partie comédie fonctionne plutôt bien, notamment grâce à l’abattage de Christina Brondo, excellente en garce débitant les pires horreurs à ses interlocuteurs, notamment sur ce qu’elle pense de Buenos Aires. Le dernier acte, qui bascule enfin ouvertement dans l’horreur, est quant à lui assez réussi, se permettant même un épilogue assez sombre,  malgré une résolution finale un peu nébuleuse.

Au final, malgré une ambiance assez réussie, Penumbra souffre malheureusement d’un rythme en dent de scie tout juste rattrapé par une très bonne direction d’acteurs.

Note : 5.5/10

Argentine, 2012
Réalisation: Adrián García Bogliano, Ramiro García Bogliano
Scénario: Adrián García Bogliano, Ramiro García Bogliano
Avec : Christina Brondo, Camilla Bordonaba, Berta Muñiz, Arnaldo André

Cassadaga

Résumé : Dévastée suite à la mort accidentelle de sa jeune sœur, dont elle était la tutrice légale, Lily (Kele Coleman) décide de déménager pour s’installer dans la ville de Cassadaga, réputée pour être la ville comptant le plus de médiums aux Etats-Unis. Suite à une séance de spiritisme ratée, Lily est contactée non pas par sa sœur mais par le fantôme d’une jeune femme disparue quelques années auparavant. Afin de se débarrasser de cette présence envahissante, Lily va devoir élucider le mystère de la mort de celle-ci.

Second film du réalisateur Anthony DiBlasi, qui avait mis en scène en 2009 l’excellent Terreur (adapté d’une nouvelle de Clive Barker), Cassadaga était attendu avec une certaine impatience par les fans d’horreur, d’autant que les différents visuels des affiches du film s’avéraient des plus alléchants. Malheureusement, Cassadaga se révèle très vite assez poussif, la faute principalement à un scénario assez mal écrit par les deux débutants Bruce Wood et Scott Poiley. Longuet, le film prend beaucoup trop de temps pour dévoiler une histoire cousue de fil blanc (le fantôme revanchard qui utilise l’héroïne pour punir son meurtrier, on a quand même vu plus original…), expédie un peu rapidement certains seconds rôles (le petit ami de l’héroïne, interprété par Kevin Alejandro, qui la plaque en milieu de film pour ne plus reparaître ensuite) et surtout multiplie les fautes d’écriture. Ainsi, de nombreux éléments sont soit sous-exploités (la surdité de l’héroïne, qui aurait pu générer de bons moments de suspense, n’est utilisée qu’une unique fois, et encore de façon très limitée), soit totalement inutiles (le fait que l’intrigue se déroule à Cassadaga n’a finalement aucune espèce d’importance). Même l’identité du tueur s’avère assez prévisible, malgré une tentative vaine de mener le spectateur sur une fausse piste lourdement amenée.

Dommage, car le film possède tout de même quelques atouts, principalement dus au talent de DiBlasi. Le réalisateur se débrouille parfaitement pour rendre les apparitions du spectre surprenantes et violentes (pour une fois celui-ci peut réellement agir sur le monde réel), et l’héroïne s’en prend plein la figure : brique de lait remplie de vers, main fantomatique qui l’étrangle, etc. Mais surtout, DiBlasi apporte un soin tout particulier aux scènes dévoilant son tueur. Un tueur particulièrement vicieux, puisqu’il enlève de jeunes femmes pour ensuite les amputer vivantes et les rassembler pour créer de grotesques marionnettes. Toutes les scènes le montrant dans ses basses œuvres sont à la fois très glauques (rien n’est épargné au spectateur) et terrifiantes, et constituent la plus grande réussite du film.

Mais ces quelques qualités ne suffisent malheureusement pas à relever le niveau de ce film poussif et bien souvent soporifique. Dommage, car on sent que DiBlasi a toujours du potentiel pour devenir un grand réalisateur. Espérons juste qu’il tombe la prochaine fois sur un meilleur script…

Note : 5/10

Etats-Unis, 2012
Réalisation: Anthony DiBlasi
Scénario: Bruce Wood, Scott Poiley
Avec : Kelen Coleman, Kevin Alejandro, Louis Fletcher, Lucius Baston

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