Après l'orage, une fois les éclairs éteints.
Assis sur le bord d'un cylindre, il restait des heures à faire rouler dans sa bouche les galets d'un vieux sax.
Le bateau s'était enfin posé, sur la ligne d'horizon, il en avait fini de ses rebonds contre la coque de l'océan, nous montions le chemin, puis nous nous arrêtions au premier pallier de l’ilot, sous une clé de voute ondulante d'un frisson de velours noir.
La musique plus haut disparaissait.
Parfois, quelques notes sortaient, d'un trou, d'une motte de tourbe, d'un fossile, puis se diluaient, glissantes, translucides, sfumato sonore dans un nuage de mer porté par une brise nouvelle, à la fraicheur polaire, inattendue.
Une fois les cols refermés, l'ascension reprenait, en direction de ce que l'on peut voir, comme un plateau, une prairie insulaire, un champ flottant détaché d'un alpage Arctique, où la carapace d'une entité marine prête à s'éveiller sous le bruit de nos pas.
En aucun cas l'île n'avait l'air inerte, partout nous étions vus, observés, scrutés dans les recoins par le regard filé des faunes autochtones.
De crêtes en récifs ciselés par des mains d'un autre âge, nous avancions prudent, sur le chemin de ronde de cet écueil, accompagnés maintenant de la mélodie soutenue du vieux sax, prolongeant aux endroits les plus raides, le champ magnétique de notes bleutées reflétants leurs échos dans les veines glacées de stalactites en fin de vie, annonçant en ruisseau entre nos pieds boueux, l'arrivée imminente d'une nouvelle saison.
Balder