La petite révolution madrigale du Vème Livre de Monteverdi

Publié le 10 mars 2008 par Philippe Delaide

Je n'avais pas encore eu l'occasion d'évoquer dans une note toute l'admiration que je porte au travail minutieux et pertinent de La Venexiana sur les madrigaux de Monteverdi.

L'ensemble vocal italien continue se patiente constitution d'une intégrale de ces chefs d'oeuvre du maître de Mantoue. La récente sortie de l'enregistrement du Vème Livre mérite que l'on s'y attarde tout particulièrement. D'abord parce que dans le corpus complet des madrigaux de Monteverdi, ce Vème Livre tient une place charnière. Il initie en effet la seconde pratique, à savoir une suggestion encore plus évidente des affects et de ce qui constituera les bases de l'art lyrique moderne. Ensuite, parce que l'ensemble La Venexiana confirme sa finesse d'interprétation, la plasticité extraordinaire de son chant, et surtout une unité presque parfaite. Ils privilégient la pureté de la ligne et ce parti pris est tout à fait défendable.

Si on a été habitué au style plus impétueux et théâtral imprimé dix ans plus tôt par Rinaldo Alessandrini avec son ensemble Concerto Italiano, on est surpris par la retenue apparente de La Venexiana (dont les piliers sont justement des anciens du... Concerto Italiano).

Pour ma part, j'adhère plus au projet de La Venexiana, tout au moins pour les Madrigaux jusqu'au VIIème Livre. Leur approche apparaît malheureusement comme trop distanciée et froide sur les madrigaux d'amour et de guerre (VIIIème Livre) qui ont, quant à eux, presque totalement basculé dans le monde théâtrale. Je préfère la version de Jordi Savall ou de Gabriel Garrido.

Pour revenir au Vème Livre, on notera la beauté des timbres et la finesse de rendu des nuances harmoniques sur des chefs d'oeuvres comme le Cruda Amarilla d'introduction, Era l'anima mia ou le fascinant M'è più dolce il penar per Amailli.

Enfin, sur la plus célèbre pièce, avec accompagnement instrumental et basse continue (c'est bien Monteverdi qui a initié l'orchestration sur les madrigaux), à savoir le fameux Questi vaghi concenti, l'équilibre entre ensemble vocal et accompagnement instrumental est parfait et d'un raffinement rare.

A souligner également la qualité d'enregistrement du label Glossa et la présentation soignée du livret (comme cet éditeur sait toujours bien le faire).

Monteverdi - Quinto Libro dei Madrigali - 1605 - Ensemble La Venexiana - label Glossa.