Toi qui as peut-être été fâché avec Molière et les grands classiques pendant tes années lycées, sache que j'ai de quoi te réconcilier.
Moi, pour tout te dire, je n'avais aucun problème avec Molière jusque là.
Donc c'est plutôt ravie que je m'apprêtais à aller assister à la pièce programmée au théâtre de la Porte Saint Martin.
Sauf qu'on m'a recommandé, la veille, ceci "Fais gaffe ça dure trois heures, pense à manger avant".
3 Heures.
C'est long dis donc.
J'avoue que sur le coup, j'ai eu un peu peur, que d'éventuelles longueurs ne s'éternisent et que la lassitude ne me gagne avant que les 2/3 de la pièce n'aient été joués.
Si tu partages mon angoisse, sache qu'il n'y a aucun risque : Cette comédie-ballet est rythmée ce qu'il faut pour captiver ton attention d'un bout à l'autre de la représentation (même si j'avoue avoir eu une nette préférence pour la seconde partie (celle qui a suivi l'entracte), ce qui à bien y réfléchir est sans doute lié au fait que les personnages et l'intrigue étant installés, il n'y a qu'à se laisser porter par le déroulement des scènes et que c'est nettement plus confortable...).
Il y a de nombreuses raisons de se déplacer pour assister à cette pièce.Parmi celles que je retiens il y a la mise en scène et le jeu de François Morel, attendu au tournant et qui s'en sort franchement bien dans son rôle de Jourdain auquel il confère toute son humanité (est-il possible d'avoir de la haine envers cet homme là qui est abusé par ceux qui l'entourent et qui n'aspire, au fond, qu'à devenir meilleur? Bon, certes, il pense y arriver en singeant ceux qui sont d'un rang plus élevé que le sien et l'ambition est stupide mais combien il est touchant cet homme, au fond, non?) Touchant mais aussi exaspérant. Je te l'accorde mais François Morel réussit justement à jouer sur toutes les nuances pour nous amener à changer de point de vue successivement (allant jusqu'à mettre sa nudité au service du rôle).
Ensuite il y a l'énorme travail réalisé sur les costumes et les décors qui permettent de composer de somptueux tableaux.
Et puis bien entendu il faut aussi retenir le jeu de l'ensemble des acteurs/chanteurs/danseurs (27 sur scène) qui entourent F. Morel.
Tous à la hauteur. Qu'il s'agisse de Mme Jourdain, de Dorimène ou du grand maître de philosophie (mes favoris) chaque personnage semble taillé sur mesure pour son interprète.
Dans le public, toutes les générations se cotoient et les plus jeunes ne semblent pas eux non plus voir le temps passer, preuve s'il en était besoin que le divertissement séduit toutes les tranches d'âges.
Je t'invite donc à aller assister à une des représentations programmées de cette pièce de Molière mise en musique par Lully car j'y vois l'occasion de te réconcilier avec un grand classique (si toutefois tu étais fâché) ou simplement de te rappeler combien la critique sociale qui se cache derrière le personnage de Jourdain est toujours tristement d'actualité.
L'occasion en tout cas d'assister à un vrai spectacle qui ravira aussi bien tes yeux que tes oreilles.
Quand on voit le tarif d'une séance de cinéma (pour laquelle il ne s'agit après tout que d'une projection en salle) et celui proposé pour ce genre de spectacle vivant (places à un tarif préférentiel disponibles ici) je crois qu'il ne faut pas hésiter.
Et y aller.
Car les spectacles de cette qualité là, qui réussissent intelligemment à faire à la fois rire et réfléchir, ne sont pas si nombreux que ça...