L'Assemblée nationale a adopté, en lecture définitive, la proposition de loi présentée par le député Warsmann. Cette "petite" loi comporte des dispositions qui viennent modifier une fois de plus les dispositions de l'article L.225-102-1 du code de commerce, relatives à la responsabilité sociale et environnementale des entreprises.
L'article 12 (ci dessous) de ce texte apporte deux modifications à l''article L.225-102-1 du code de commerce.
En premier lieu, il vient préciser l'obligation de "reporting" des filiales des sociétés soumises l'obligation de rédaction d'un rapport social et environnemental, obligation introduite par la loi NRE et étendue par la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010.
Ledit article 12 précise en effet
« Les filiales ou sociétés contrôlées qui dépassent les seuils mentionnés à la première phrase du présent alinéa ne sont pas tenues de publier les informations mentionnées au cinquième alinéa du présent article dès lors que ces informations sont publiées par la société qui les contrôle, au sens de l’article L. 233-3, de manière détaillée par filiale ou par société contrôlée et que ces filiales ou sociétés contrôlées indiquent comment y accéder dans leur propre rapport de gestion. »
Ainsi, désormais, dés lors que la société mère aura réalisé un rapport consolidé, détaillant l'activité de ses filiales et dés lors que ces dernières donnent, dans leur propre rapport de gestion, accés à ce rapport consolidé, elles sont dispensées de fournir un rapport RSE.
Il convient donc de souligner que l'obligation de réaliser un rapport RSE ne disparaît pas pour les filiales mais le législateur a introduit une mesure de simplification qui permet de n'établir qu'un seul rapport. Au demeurant, on soulignera également que les filiales dont le siège est à l'étranger ne sont pas dispensées de cette obligation. De même, les filiales françaises mais dont la société mère a son siège à l'étranger ne sont pas davantage dispensées de l'obligation de réalisation du rapport RSE.
En second lieu, la loi Warsmann vient entériner le retard d'un an de mise en oeuvre de ce dispositif RSE.
L'article 225 de la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010 précisait :
"VII. ― Le présent article est applicable aux exercices clos à compter du 1er janvier 2011".
A la suite de la loi Warsmann, l'article 225 de la loi Grenelle 2 précise désormais :
"VII. ― Le présent article est applicable aux exercicesqui ont été ouverts après le 31 décembre 2011"
Au-delà de ce dossier RSE, force est de constater que cette loi Warsmann symbolise le "mal légiférer" qui aura caractérisé ce quinquennat. Je ne parle pas du fond des mesures votées par le Parlement ces cinq dernières mais de cette frénésie textuelle qui s'est emparée de l'Etat. Les avalanches de lois ont précédé les avalanches de décrets qui viennent ensevelir les acteurs économiques sous des couches de règles dont il est impossible d'intégrer et de respecter les exigences sans des moyens et service juridiques considérables.
Il n'est pas inutile de lire cet extrait des débats parlementaires qui ont précédé le vote de la loi Warsmann :
"M. le président. J’appelle maintenant, conformément à l’alinéa 3 de l’article 114 du règlement, la proposition de loi dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.
La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour expliquer son vote.
M. Jean-Michel Clément. Nous arrivons au terme de la discussion d’un énième et dernier texte de simplification. Je sais l’attachement du président Warsmann à l’objectif de simplification qu’il avait assigné à notre commission. Nous partageons cette volonté de simplifier, de clarifier et de rendre la loi intelligible dès que c’est nécessaire. Vous l’avez vous-même souligné, monsieur Morel-A-L’Huissier, nous avons beaucoup, voire trop légiféré. Dans cette abondance de textes, des scories se sont forcément glissées, qui nécessitent que l’on revienne sur les textes votés.
Cette loi de simplification comporte certaines dispositions auxquelles nous avons apporté notre concours, parce que nous y étions favorables. Toutefois, nous nous sommes parfois, dans ce texte comme dans d’autres, quelque peu éloignés des objectifs initiaux que nous nous étions fixés dans le cadre des textes de simplification. André Chassaigne a indiqué que 20 % des articles que l’on nous propose de voter sont des textes de simplification et 80 % des textes de fond qui créent du droit.
M. Jean Mallot. Exactement !
M. Jean-Michel Clément. On me répondra que les textes de simplification créent aussi du droit. Nous n’en doutons pas ! Cela étant, il semble que nous y ayons trop souvent glissé des cavaliers, ce qui a de temps en temps amené le Conseil constitutionnel à nous rappeler à l’ordre. Parfois aussi, des pans entiers de lois ont été retirés lors de la navette entre l’Assemblée nationale et le Sénat pour finir leurs jours dans un texte qui se suffisait à lui-même. Nous aurions donc dû mieux travailler".
La lucidité de certains parlementaires sur leurs conditions de parlementaires est porteuse d'espoir. Car ce phénomène d'inflation normative est un problème pour tous ceux dont le droit est le métier et pour tous ceux qui sont censés "ne pas ignorer la loi".
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(AN NL) Article 12
I. – L’article L. 225-102-1 du même code est ainsi modifié :
1° Après le mot : « établit », la fin de la seconde phrase du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « deux listes précisant les informations visées au présent alinéa ainsi que les modalités de leur présentation, de façon à permettre une comparaison des données, selon que la société est ou non admise aux négociations sur un marché réglementé. » ;
2° Après la deuxième phrase du sixième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Les filiales ou sociétés contrôlées qui dépassent les seuils mentionnés à la première phrase du présent alinéa ne sont pas tenues de publier les informations mentionnées au cinquième alinéa du présent article dès lors que ces informations sont publiées par la société qui les contrôle, au sens de l’article L. 233-3, de manière détaillée par filiale ou par société contrôlée et que ces filiales ou sociétés contrôlées indiquent comment y accéder dans leur propre rapport de gestion. » ;
3° À la première phrase du huitième alinéa et à la seconde phrase du neuvième alinéa, les mots : « clos au » sont remplacés par les mots : « qui a été ouvert après le » ;
4° Au dernier alinéa, l’année : « 2011 » est remplacée par l’année : « 2013 ».
II. – Après le mot : « exercices », la fin du VII de l’article 225 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement est ainsi rédigée : « qui ont été ouverts après le 31 décembre 2011. »