Explorons donc ce que les divers intervenants proposent pour le Québec, afin de voir si les solutions proposées vont dans la direction qui serait souhaitable compte tenu de nos observations précédentes. Une multitude d'auteurs et d'acteurs politiques ont multiplié les interventions et les publications depuis quelques années.
L'importance de l'État
Les objectifs de la gauche
Vers la fin de 2008, alors que l'on ne mesurait pas encore l'ampleur de la crise mondiale, le sociologue et écrivain Jean-François Lisée explorait à son tour les pistes de changements sociaux que nous pourrions suivre, dans un livre intitulé Pour une gauche efficace. L'objectif de sa gauche efficace est celui "d'une société où il fait bon vivre et qui a donc les moyens de sa qualité de vie. Elle a pour objectif de favoriser l'épanouissement économique, culturel, scientifique, écologique se ses citoyens et de ses communautés.". La gauche efficace de Lisée "ne vise pas la création de richesses comme une fin en soi, mais la qualité de vie, dont la prospérité durable este une variable essentielle". L'auteur se place donc d'emblée en totale opposition aux Lucides, dont la création de la richesse économique était le point central du manifeste. Lisée reproche aux tenants de la droite et aux obnubilés du PIB de ne jamais mettre en perspectives leurs chiffres avec la réalité sociale. Chiffres et analyses à l'appui, il démontre que les riches sont plus nombreux au canada anglais et aux États-Unis qu'au Québec, mais que le 20% de plus pauvre est mieux nanti au Québec qu'ailleurs en Amérique du Nord. Il établi de la même manière que le Québec - grâce à ses politiques sociales passées - a un taux de scolarisation le plaçant 8e sur les 24 pays de l'OCDE, alors que les États-Unis sont 20e. Lisée n'hésite pas non plus à suggérer certaines idées attribuées à la droite, comme une libéralisation des tarifs d'électricité, ou des baisses de taux d'impôts (mais des hausses des taux de taxes à la consommation), mais il accompagne toujours ses propositions d'encadrement et d'interventions de l'état pour réguler ses propositions, d'où son intitulé de "gauche efficace", terme qu'il a d'ailleurs emprunté à François Legault, de l'époque où celui-ci était au Parti Québécois, ceci expliquant peut-être également le flou volontaire que Legault entretient sur ses idées politiques.
Éviter/sortir de la crise
La droite et la gauche au Québec
Parmi les autres auteurs récents, on peut également consulter De colère et d'espoir de Françoise David, porte-parole de Québec Solidaire, ou encore le recueil De quoi le Québec a-t-il besoin?, publié sous la direction de Marie-France Bazzo, Vincent Marissal et Jean Barbe. Ces livres récents sont loin d'être uniques; il ne se déroule pas une semaine sans qu'un bouquin politique ne soit publié au Québec. Parmi les plus récents, mentionnons les livres et chroniques de Éric Duhaime, Jean-François Lisée, encore, et Mathieu Bock-Côté la semaine dernière.
Du côté de Duhaime, ses délires anti-État et anti-babyboomers achalent au début, puis font rire jaune tellement ils sont gros. Partisan d'une extrême droite assumée dans ses textes (mais pas à la télé de la SRC où il tente d'apparaître modéré), obnubilé par le déficit, Duhaime propose une sérieuse cure d'amincissement de l'État, une tâche qui "nécessiterait une personnalité de l’envergure de Margaret Thatcher". Faisant l'éloge d'une des grandes responsables des politiques néolibérales qui ont finalement plongé la Grande-Bretagne dans sa pire crise économique depuis 100 ans, Duhaime n'a visiblement rien compris à ce qui a aidé le Québec à éviter le pire de cette crise.
Dans son dernier pamphlet politique, Lisée s'attaque carrément à 15 affirmations de la droite québécoise, et réaffirmant que les politiques socialistes correspondent beaucoup plus aux valeurs québécoises. L'auteur propose également de faire encore mieux que ce que nous avons fait jusqu'à maintenant, en terme social.
Approfondir les questions socio-économiques - Références
Il y a aussi les études de Ll'IRIS: institut de recherche et d'informations socio-économiques que l'on peut consulter sur des sujets plus précis (comme par exemple le débat actuel sur la hausse des frais de scolarité et l'accès aux études universitaires). Enfin, si on cherche une couverture (mondiale mais avec une vision d'ici) à peu près complète sur le sujet des politiques sociales, on peut justement consulter mensuellement le site de Politiques Sociales, publié par le Centre de recherche sur les Politiques et le Développement Social de l'Université de Montréal.
Qui est porteur de ces solutions?
C'est bien beau de voir que beaucoup de solutions et de pistes de solutions sont proposées par divers intervenants. C'est encore mieux de voir que la plupart des intervenants sérieux proposent des idées qui vont dans le sens des politiques socio-économiques qui ont permis de mieux préparer le Québec à la crise et d'assurer au québécois un meilleur filet social. Mais encore faut-il quelqu'un (groupe, parti, leader) pour les porter vers leur mise en place. Pour le moment, sans changement de système, au Québec, il faudra que l'un des partis politiques deviennent porteur de ces solutions si on veut espérer les voir implanter un jour. Sans vouloir effectuer une analyse en profondeur des programmes actuels des quatre partis représentés à l'Assemblée Nationale (et qui seront peut-être bientôt en campagne électorale si on en croit les rumeurs), on peut tout de même dresser un tableau sommaire de leurs positions actuelles sur ces questions.
C'est ce que je me propose de faire dans la 4e et dernière partie de cette série sur le Québec et la crise.
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