L’avènement du Coupé-décalé dans le paysage musical ivoirien a été diversement apprécié par les mélomanes. Ainsi, saluant son aspect essentiellement festif et distractif, les uns ont mis en évidence son caractère opportun d’autant qu’il est né dans une situation de crise au cours de laquelle, les Ivoiriens avaient besoin de se distraire pour oublier un tant soit peu, leurs soucis.
Pour d’autres en revanche, ce nouveau phénomène musical ne présente rien de sérieux. En conséquence, il ne mérite aucune marque de considération. Vu sous cet angle, le Coupé décalé ne méritait pas qu’on s’y intéresse. En dépit de ces préjugés, ce mouvement à su se faire une place dans le ciel des étoiles de la musique ivoirienne. Toutefois, si on peut se réjouir du succès dont il bénéficie depuis son avènement sur la scène jusqu’à ce jour, certaines attitudes ou du moins, des agissements de la part de certains de ses promoteurs donnent à réfléchir. En effet depuis quelques années, deux jeunes gens qui font la fierté de ce mouvement créé par Feu Doukouré Moustapha alias Douk Saga, en l’occurrence, Arafat Dj et Debordeau Likoufa, se lancent sur leurs différentes scènes, par medias interposés et parfois dans leurs productions artistiques, des injures, des discours insolents, irrévérencieux, peu orthodoxes, et à la limite de l’indécence et qualifiés de choquants pour leurs mélomanes en particulier et pour le public, en général. Et pourtant ces deux artistes se sont imposés par la force de leurs productions pour être aujourd’hui, les deux plus grosses pointures du Coupé-décalé en Côte d’Ivoire et sur le continent. Des idoles incontestables pour les plus jeunes et des phénomènes de société incontournables. Pour étayer cette remarque atypique de nos deux stars, dans son dernier titre, intitulé « Commandant Zabra », Arafat Dj ne peut s’empêcher de faire dans la provoc et le scandale. En effet, dans ce morceau, il ne manque pas de régler ses comptes à son copain Debordeau. Extraits : «Tu n’es rien et tu ne seras jamais rien. Ne te compare pas à moi, je suis et je demeure ton chef». La réponse de la bergère au berger n’en sera pas pour autant tendre. Dans un autre titre Débordeau, encore appelé « l’American Soldier», n’y va pas du dos de la cuillère et se montre très dur avec celui qui dit-on, aura énormément contribué à son émergence. En tout cas, cette guerre fratricide ouverte entre ces deux copains qui s’étaient unis pour réaliser un titre en hommage au footballeur béninois d’origine, ivoirienne Stéphane Sésségnon, a déjà fait couler beaucoup d’encre et de salive. Certes, à l’heure actuelle, les deux artistes semblent être revenus à de meilleurs sentiments. Mais c’est le lieu d’attirer l’attention des uns et des autres sur le danger de ce genre d’attitude. On se souvient en effet, qu’aux Etats-Unis dans les années 90, deux talentueux rappeurs s’étaient lancés dans une guerre de gangs dans laquelle, ils ont tous deux été emportés dans la fleur de leur âge. Si Tupac Shakur et Notourious Big, savaient qu’en se livrant dans cette ganstarap, ils couraient le risque de se faire assassiner comme ce fut le cas, certainement qu’ils y auraient réfléchi par deux fois. On se souvient aussi que chez nous, Stezo et Almighty avaient tenté d’emprunter le même chemin. Fort heureusement pour nous, les critiques et les interpellations de leurs proches, ont vite fait de les en dissuader. Si Debordeau Likoufa et Arafat Dj veulent attirer les regards et se faire de la pub, des voies plus saines et dignes de leurs rangs d’artistes adulés et d’icônes de la jeunesse, existent. Ils ne doivent pas nous faire cette douleur de finir comme… Tupac et Biggie.
Francis Kouamé (stg)