Le débat des présidentielles…de 2030 !

Publié le 01 mars 2012 par Legraoully @LeGraoullyOff

Ici Brest, les Bretons parlent aux Lorrains ! Vous l’avez probablement remarqué hier, l’équipe rédactionnelle de votre webzine adoré a répondu à l’appel pour rendre le 29 février férié et n’a publié aucun nouvel article sur ce site ; nous nous sommes rattrapés, en revanche, avec l’émission de radio. Cette introduction n’avait strictemen rien à voir avec ce qui suit.

Il n’y a pas si longtemps encore, dans le cadre d’une soirée organisée à Brest par l’association DécouverteS que préside notre collaborateur Mikaël Tygréat, votre serviteur a interprété avec ce dernier un sketch de mon cru. Je viens de déposer le texte à la SACD, ce qui veut dire que personne ne pourra jouer ce sketch sans me verser des droits d’auteurs et que je peux donc vous en faire le texte sans crainte :

Voix off : Mesdames, mesdemoiselles, messieurs, bonsoir, et bienvenue, en ce soir du 7 mai 2030 pour le débat entre les deux candidats en lice pour le second tour de l’élection présidentielle, messieurs Solal Darty-Sarkozy pour l’Union pour la Majorité Nicolasienne…

Solal Darty-Sarkozy Entrant en scène avec les mains en prière, comme son grand-père : Bonsoir, mes amis, bonsoir ! Ensemble, tout devient envisageable ! En ayant l’air de s’excuser : Il fallait bien transformer un brin la formule !

Voix off : …et Martin Rey-Chirac pour le Parti Social-Démocrate !

Martin Rey-Chirac Exalté, saluant en faisant signe des deux mains : Bonsoir, compagnons ! Mangez des prunes ! En ayant l’air de s’excuser : C’est vrai que ça s’use vite, les formules !

Voix off : Bien, messieurs, veuillez vous installer. Nous vous laissons libre d’ouvrir le débat comme bon vous semble.

S. D.-S. : Et bien puisqu’on m’y invite, je commencerai en vous disant franchement, monsieur Rey-Chirac, malgré le respect que je vous dois, que je vous trouve quand même gonflé !

M. R.-C. : Ah non ! Vous n’allez pas commencer les attaques sur le physique !

S. D.-S. : Je ne parlais pas de votre corpulence, monsieur, mais de votre culot : c’est quand même culotté que de se présenter au nom de la gauche française quand on est le petit-fils de Jacques Chirac !

M. R.-C : Et alors, Mitterrand l’a bien fait, non ? Et puis c’est sûr que vous, le petit-fils de Nicolas Sarkozy, vous êtes bien placé pour me donner des leçons en matière d’honnêteté et de fidélité à ses engagements !

S. D.-S. : Oh, vous n’allez pas déjà revenir sur ce vieux contentieux entre nos aïeux respectifs qui n’intéresse pas les français !

M. R.-C : Rassurez-vous ! C’est sur un contentieux bien plus récent que ça que je vais revenir, et il concerne votre aïeul et tous les français ! Est-ce à vous que je dois rappeler qu’à l’approche des élections présidentielles qui auraient dû avoir lieu en 2012, votre grand-père, alors président de la République, a fait un coup d’État et s’est fait couronner empereur pour être sûr de ne pas perdre la face et les élections ?

S. D.-S. : Monsieur Rey-Chirac, il n’y a jamais eu de coup d’État et mon aïeul a été proclamé empereur des français par le peuple souverain…

M. R.-C. : Oui, oui, on sait, le peuple « souverain » a reconnu à Nicolas Sarkozy 1er le titre d’empereur à 99,9 % des voix, comme dans toute bonne République bananière qui se respecte. Le 0,1% restant a été enterré dans la plus stricte dignité…

S. D.-S. : Vos sarcasmes envers ma famille ne m’atteignent pas ! Avant de persifler, dites-moi où vous étiez, pendant les dix-huit ans durant lesquels mon grand-père a occupé le trône impérial ?

M. R.-C. : Vous le savez bien : comme le général avant moi, en 1940…

S. D.-S. : Ah ben ça commence bien : un socialiste qui se réclame de De Gaulle, on aura tout vu ! Et puis je vous signale qu’en 1940, le général, comme vous dites, avait cinquante ans et qu’en 2012, vous n’en aviez que seize…

M. R.-C. : Et moi, j’ai treize ans de plus que vous, alors ne me coupez pas quand je parle où je vous mets une fessée déculottée en public !

S. D.-S. : Merci, c’est déjà fait ! J’en ai reçu au moins une de chacun des trente chefs d’État européens qui, lassés des actes de mon grand-père, se sont alliés pour le forcer à abdiquer. Je ne lui en veux pas d’avoir cédé, il a quand même soixante-quinze ans…

M. R.-C. : …et comme papa Jean est lui-même parti en exil aux îles Caïman, ça vous donne l’occasion de vous imposer sur le devant de la scène !

S. D.-S. : C’est vrai que je m’en tire bien…enfin, cessez vos insinuations et poursuivez votre récit !

M. R.-C. : Et bien je disais donc qu’en 2012, comme le général avant moi, je pris aussitôt le parti de la résistance à l’oppresseur depuis la ville de New York où le président Joe Biden, remplaçant au pied levé Barack Obama qui venait d’être assassiné, offrit à ma famille un modeste refuge…

S. D.-S. : Modeste ! Tu parles, Charles !

M. R.-C. : Je m’appelle pas Charles ! Qu’est-ce que vous insinuez ?

S. D.-S. : Je n’insinue pas. Je constate simplement qu’un appartement de 10.000 m², avec jacuzzi et vue sur Manhattan, on a vu plus modeste !

M. R.-C. : Oh, vous savez, la vue sur Manhattan était très décevante : entretemps, ils ont reconstruit le World Trade Center et les quatre tours ont vite occupé tout le paysage.

S. D.-S. : Oui ben il reste que vous n’avez pas été trop malheureux ! En tout cas, vous n’avez pas souffert au point d’appeler les français à la résistance depuis New York, et ne me dites pas que c’était les moyens qui vous manquaient : De Gaulle, en 40, il n’avait pas Internet, mais vous si !

M. R.-C. : Est-ce à vous que je dois rappeler la censure exercée par l’empereur sur l’ensemble des media ? J’ai souvent eu l’occasion d’en parler avec un autre proscrit, Yannick Noah…

S. D.-S. : Et oui, Noah… Les Bonaparte avaient Victor Hugo, nous, les Sarkozy, on avait Yannick Noah ! On a les génies martyrs qu’on peut !

M. R.-C. : Je ne vous le fais pas dire ! Enfin, quoi qu’il en soit, sachez, vous qui contestez ma légitimité, qu’une fois revenu d’exil à l’annonce de l’abdication de Nicolas 1er, j’ai tout de suite été reconnu comme nouveau leader de la gauche par les socialistes et centristes qui avaient vaillamment résisté à l’empire…

S. D.-S. : Tu parles, Charles !

M. R.-C. : Arrêtez avec ça, je ne m’appelle toujours pas Charles !    

S. D.-S. : Bon, ben… « C’est du baratin, Martin ! », Alors ?

M. R.-C. : Admettons ! Et que trouvez-vous encore à redire à ce que je dis ?

S. D.-S. : Ben les socialistes et les centristes dont vous parlez ont eu une drôle de façon de résister vaillamment à l’empire ! Tous ceux qui ne sont pas partis en exil ont aussitôt juré fidélité au souverain ! Maintenant, je sais pourquoi on parle de « gouvernement d’ouverture » : c’est pas le gouvernement lui-même qui est ouvert, c’est les gens de gauche qui acceptent de l’intégrer !

M. R.-C. : Hum ! Ceci est vrai de la plupart des ténors de l’opposition, mais il en va autrement des militants de base qui, eux, n’ont pas lâché prise et ont accepté, afin de saisir la chance que représentent pour eux ces premières élections libres en France depuis dix-huit ans et de ne pas la laisser récupérer par les nicolasiens que vous représentez, que je sois leur candidat !

S. D.-S. : Ben comme le dit ma mère, ‘faut bien faire avec ce qu’on a !

M. R.-C. : Merci, c’est agréable !

S. D.-S. : Et comme le disait ma grand-mère par alliance, Carla Bruni, (Il marmonne vaguement quelque chose de totalement inaudible) « mumumumu ».

M. R.-C. : Qu’est-ce qu’elle voulait dire par là ?

S. D.-S. : Ben, encore aujourd’hui, je me le demande, elle n’a jamais été fichue de me le dire en articulant. Le temps que je pense à le demander, mon grand-père l’avait déjà répudiée pour une plus jeune.

M. R.-C. : Ce qui l’a conduite à rejoindre notre camp, ce qui nous ramène à notre sujet !

S. D.-S. : Et bien à propos, savez-vous pourquoi vous avez accepté d’être le candidat des socialo-centristes ? Vous le savez bien, mais vous ne le direz jamais : vous briguez la présidence pour pouvoir favoriser les intérêts de la firme Pinault dont votre famille est restée actionnaire !

M. R.-C. : C’est de la calomnie, c’est abracadabrantesque ! Prouvez-le !

S. D.-S. : Je l’invente, peut-être, votre slogan de campagne, « Avec Martin Rey-Chirac, touchons du bois » ?

M. R.-C. : Oh, vous pouvez parler, vous, c’est pour faire décrocher de gros contrats à la firme Darty, dont votre mère est l’héritière, que vous vous présentez !

S. D.-S. : C’est pas vrai !

M. R.-C. : Alors comment expliquez-vous ce slogan de campagne, « Solal Darty-Sarkozy, le contrat de confiance » ? De toute façon, les français ne sont pas des veaux !

S. D.-S. : Vous cessez de vous référer à De Gaulle, tout à coup !

M. R.-C. : Ce que je veux dire, c’est que je ne vois pas pourquoi ils voteraient pour le petit-fils d’un homme qui les a tyrannisés pendant dix-huit ans !

S. D.-S. : Vous noircissez le tableau ! Vous semblez oublier les grandes réalisations permises par l’empereur : l’organisation des jeux olympiques de 2028, le troisième porte-avions, le tunnel sous la Méditerranée, le dépôt, en grandes pompes, des cendres de Michel Rocard au Panthéon, les funérailles nationales de Johnny Halliday, plus fastueuses que celles de Victor Hugo, sans compter les entreprises du Cac 40 qui ont vu augmenter leurs bénéfices de 380 % !

M. R.-C. : Et ben ils vont être contents, les pauvres, de savoir qu’ils habitent un pays riche !

S. D.-S. : Vous citez Coluche, là : n’est-ce pas là une preuve supplémentaire du caractère fantaisiste de votre candidature ?

M. R.-C. : Alors là, je…

Voix off : Messieurs, votre temps de parole est écoulé ! Si vous avez un dernier mot à dire, c’est le moment !

M. R.-C. : Ah. Et bien que le meilleur gagne !

S. D.-S. : Merci, c’est moi ! Mais j’ajouterais : « Bonne chance, mon grand-papa ! »

M. R.-C. : Il va en avoir besoin, quand je serai au pouvoir !

(Les deux candidats se relèvent)

S. D.-S. : Heu, juste une chose : on n’aurait pas oublié de parler d’un truc, dans ce débat ?

M. R.-C. : Si, de nos propositions concrètes pour la France.

S. D.-S. : Ah, dommage. (À partir de là, ils conversent en se dirigeant vers les coulisses) En même temps, ça montrera aux français que la politique française a gardé ses vieilles habitudes après dix-huit ans de troisième empire !

M. R.-C. : Oui, c’est rassurant, d’un côté. (Ils sortent)

BONUS : L’organisation de la soirée prévoyait que l’on fasse voter le public pour « élire président »  l’un de des deux candidats. Voici donc les deux épilogues que j’avais écrits, prévoyant les deux cas de figure :

En cas de victoire de Solal Darty-Sarkozy :

Les deux candidats sont sur scène, côte à côte, très dignes.

Voix off : Et le gagnant est…Solal Darty-Sarkozy !

La voix off précise les résultats pendant que Solal Darty-Sarkozy saute de joie, les poings en l’air, et que Martin Rey-Chirac écarte les bras, l’air fataliste.

S. D.-S. : Je remercie toutes celles et tous ceux qui m’ont fait confiance ! Je serai le président du pouvoir d’achat !

M. R.-C. : Tiens, ça me rappelle quelque chose !

S. D.-S. : Mon honorable aurait-il autre chose à déclarer que des sarcasmes ?

M. R.-C. : Oui. (Quittant la scène) Je vais te crever, enflure !

S. D.-S. : Houlà, il a pas fini de m’en faire baver…

En cas de victoire de Martin Rey-Chirac :

Les deux candidats sont sur scène, côte à côte, très dignes.

Voix off : Et le gagnant est…Martin Rey-Chirac !

La voix off précise les résultats pendant que Solal Darty-Sarkozy se prend la tête dans les mains et que Martin Rey-Chirac essaie d’étouffer sa joie.

S. D.-S. : Bon. Et bien il me reste à dire que j’assume l’entière responsabilité de cette défaite et que j’en tire les conséquences en me retirant définitivement de la vie politique.

M. R.-C. : Tiens, ça me rappelle quelque chose ! (Solal quitte la scène en marmonnant quelques paroles de vengeance inaudibles) Bon. Je savoure, bien sûr, cette belle victoire, tout en sachant bien que le plus dur reste à venir et que les défis que notre beau pays devra relever demandent au chef de l’État de garder la tête froide. Hum, veuillez m’excuser. (Il va dans les coulisses, mais on l’entend tout de même crier) Ouais, putain, ça y est, papy, moi aussi j’ai niqué Couille molle !

S. D.-S. (off) : Hé, ho, j’entends tout, hein !

Pour la petite histoire, le public brestois avait accordé la majorité de ses suffrages à Martin Rey-Chirac ? Aurirez-vous fait, chers Mosellans, le même choix ? Allez, salut les poteaux !