Chronicle
Résumé: Trois ados découvrent une grotte renfermant une étrange formation rocheuse qui les fait s’évanouir. A leur réveil, ils s’aperçoivent qu’ils sont dotés du pouvoir de télékinésie.
Film à petit budget (15 millions de dollars) et sans grosse tête d’affiche, Chronicle a réussi à générer une certaine attente grâce à un savant marketing. Le film de Josh Trank, scénarisé par Max Landis (le fils du célèbre réalisateur du Loup-Garou de Londres) tente comme de nombreux autres avant lui de surfer sur la mode de plus en plus agaçante du found foutage. Cette fois-ci c’est le film de super héros qui est passé à la moulinette du « documenteur », puisqu’il suit les aventures de trois ados se retrouvant dotés pouvoir de télékinésie (mouvoir les objets par la pensée) après avoir été en contacts avec une mystérieuse roche luminescente.
Par chance, Chronicle n’est pas le pire représentant d’un genre comportant malheureusement beaucoup plus de bouses que de perles. Plutôt que de se lancer dans une nouvelle aventure sur les origines d’un quelconque héros, Landis et Trank prennent le parti d’une part de montrer que des supers pouvoirs ne transforment pas forcément un ado lambda en défenseur de la veuve et de l’orphelin, et d’autre part de prendre comme personnage central celui des trois ados qui va devenir un super vilain. Deux angles d’attaque intéressants, et qui permettent à Chronicle de sortir légèrement du lot. Le film se suit donc sans déplaisir, grâce à un rythme correct, des effets spéciaux réussis, des personnages un peu clichés (le bad guy cumule un peu tous les traumas possibles: timidité, père alcoolique et violent, mère mourante…), mais suffisamment attachants pour que l’on veuille les suivre jusqu’au bout. Josh Trank tente même d’éviter certains des pièges du found foutage (caméra tremblotante, point de vue unique) de façon plus (le héros utilise ses pouvoirs pour contrôler sa caméra à distance) ou moins fine (le personnage de la petite amie elle aussi folle de caméra, très moyen).
Cependant, les limites de Chronicle se font assez vite sentir. Le scénario manque clairement d’envergure (après avoir fait le tour des blagues potaches possible avec le pouvoir de télékinésie, le film peine à passer au niveau supérieur), et surtout le choix de la technique du documenteur devient assez vite handicapant. Le film foire par exemple tous ses climax, qu’ils soient émotionnels (la mort d’un des personnages principaux ne fait ni chaud ni froid) ou visuels (l’affrontement final, filmé au travers de différentes caméras, est au mieux pas du tout spectaculaire et au pire illisible).
Au final, Chronicle est un petit divertissement sympathique et sans prétention, mais ne dépasse malheureusement jamais ce statut, ce qui le condamne à être très rapidement oublié.
Note: 6/10
USA, 2012
Réalisation: Josh Trank
Scénario: Max Landis
Avec: Dane DeHaan, Alex Russell, Michael B. Jordan, Michael Kelly, Ashley Hinshaw
Intruder
Résumé: Alors qu’ils sont en train de faire l’inventaire avant la fermeture définitive du supermarché dans lequel ils travaillent, un groupe d’employés est attaqué par un mystérieux tueur…
Produit lors des années 80, durant l’âge d’or du slasher, Intruder ne se démarque a priori pas vraiment du tout-venant de la production horrifique de l’époque. Mise en place poussive, scénario simpliste (le whodunit du film est une vaste blague, tant l’identité du tueur et son mobile sont évidents), dialogues au rabais, acteurs au jeu plus que limité (mention spéciale à l’héroïne qui n’est même pas capable de hurler de terreur de façon convaincante !). A vrai dire, la particularité qui fait qu’Intruder n’a pas totalement sombré dans l’oubli est son côté « film de potes ». On retrouve en effet à la réalisation Scott Spiegel (Une Nuit en Enfer 2), au casting les frères Sam et Ted Raimi, ainsi que Bruce Campbell, et aux effets spéciaux les magiciens de KNB. Du coup, passé une première demi-heure bien longue, le film devient un gros foutoir gore assez plaisant pour les fans du genre. Intruder regorge d’inventivité pour envoyer ad patres le casting, en utilisant autant que possible les spécificités du lieu dans lequel il se déroule, un supermarché : tête écrasée sous le compacteur de cartons, tranchée par une scie à viande, empalée sur un crochet de boucher, tout y passe, le tout d’un bon niveau vu les personnes impliquées. Spiegel arrive même à proposer une ambiance poisseuse du plus bel effet dans le second tiers du film, éclairages sombres à l’appui. Intruder n’a certes rien de bien mémorable, mais reste une sympathique petite curiosité à découvrir pour les amateurs du genre.
Note: 5/10
USA, 1989
Réalisation: Scott Spiegel
Scénario: Scott Spiegel
Avec: Elizabeth Cox, Renée Estevez, Dan Hicks, David Byrnes, Sam Raimi, Ted Raimi, Bruce Campbell
J. Edgar
Résumé: La vie de J. Edgar Hoover, tout-puissant créateur du célèbre FBI.
Si Gran Torino avait constitué un magnifique épilogue à la fin de la carrière d’acteur d’Eastwood, le réalisateur n’a pas pour autant pris sa retraite, enchaînant comme à son habitude les films avec une régularité de métronome. Après les semi-déceptions du sympathique mais peu mémorable Invictus et de l’assez horripilant (du moins pour sa partie française) Au-delà, beaucoup d’espoirs étaient placés en J. Edgar, biopic du célèbre créateur du FBI. Un sujet en or pour Eastwood, qu’on sait passionné par les personnages borderlines et multi facettes.
Comme on s’y attend donc, connaissant le réalisateur, J. Edgar prend le parti de parler de l’Histoire par le petit bout de la lorgnette, en s’intéressant principalement à l’homme derrière la légende. Le début du film est ainsi particulièrement réussi, alternant les scènes montrant un Hoover vieillissant qui tente de réécrire l’Histoire en dictant ses mémoires, et les scènes présentant la jeunesse du personnage, au moment de son entrée dans ce qui deviendra plus tard le FBI. Le bon point, c’est qu’Eastwood ne cherche pas à rendre Hoover sympathique. Il montre sans détour les côtés sombres du personnage, son opportunisme, sa haine aveugle du communisme, son besoin avide de reconnaissance, quitte à s’approprier les exploits des autres. Sa misogynie légendaire est un peu passée sous silence, mais dans l’ensemble le portrait est plutôt fidèle. Eastwood présente aussi avec beaucoup de finesse la relation entre Hoover et sa secrétaire personnelle Helen Gandy (magnifique Naomi Watts).
Cependant, tout n’est pas réussi dans J. Edgar. La faute principalement au scénario de Dustin Lance Black (Milk), qui se prend parfois un peu les pieds dans le choix des événements à présenter. Le film passe ainsi beaucoup trop de temps sur certains événements (l’enlèvement du bébé Lindbergh) pour en zapper d’autres un peu trop rapidement (l’assassinat de Kennedy, la lutte contre la mafia). A cause de ce déséquilibre, le film a parfois un rythme en dents de scie. Mais là où le film se plante totalement, c’est dans l’étude de l’homosexualité refoulée du personnage. J. Edgar insiste lourdement sur cet aspect de la personnalité de Hoover, de manière parfois assez caricaturale (la dispute entre Hoover et Clyde Tolson, qui se termine en baiser volé, est un sommet de ridicule), à tel point que cela en devient presque gênant, tant on a peu l’habitude de voir Eastwood céder ainsi à la surenchère.
Reste tout de même que l’interprétation habitée d’un DiCaprio impérial permet souvent de faire passer la pilule, et qu’Eastwood réussit ponctuellement à retrouver son génie (l’émouvante scène où, après la mort de sa mère, Hoover se pare de ses habits avant d’éclater en sanglots). Dommage cependant que J. Edgar ne réussisse que rarement à atteindre ces sommets. On aurait tant aimé que la rencontre Eastwood-DiCaprio soit un feu d’artifice…
Note : 6/10
USA, 2011
Réalisation : Clint Eastwood
Scénario : Dustin Lance Black
Avec : Leonardo DiCaprio, Naomi Watts, Armie Hammer, Judi Dench
La Dame en Noir (The Woman in Black)
Résumé: Dépressif depuis le décès de sa femme, morte en donnant naissance à son fils, Arthur Kipps (Daniel Radcliffe) perd pied petit à petit. Son patron lui assigne une mission de la dernière chance : s’occuper de la succession de la propriété d’une riche veuve venant de décéder. Arrivé sur place, Kipps se heurte à l’hostilité des locaux, qui sont persuadés qu’une malédiction plane autour de la demeure, et qu’il va réveiller le terrifiant fantôme de la « Dame en Noir ».
Après la réussite éclatante du tétanisant Eden Lake, le second film de James Watkins était forcément très attendu, et ce à plus d’un titre. Le réalisateur devait prouver qu’il était capable de transformer l’essai, signer le retour de la fameuse maison de production Hammer aux sources de l’épouvante gothique, tout en permettant à Daniel Radcliffe de montrer qu’il est capable de jouer autre chose que les petits sorciers binoclards. Bref, c’était un défi assez imposant qui attendait le jeune réalisateur.
Le scénario de La Dame en Noir, adapté d’un roman de Susan Hill (Je suis le Seigneur du Château), est écrit par Jane Goldman, scénariste fétiche de Matthew Vaughn (on lui doit notamment les scripts des excellents Kick-Ass, Stardust et X-Men Le Commencement). Un scénario qui ne brille pas vraiment par son originalité, mixant les poncifs de l’épouvante gothique (grande maison isolée et inquiétante, autochtones peu accueillants, héros venu de la grande ville qui n’écoute pas les mises en garde…) aux grandes lignes de l’intrigue de Ring (SPOILER même jusqu’à son dénouement en deux temps voyant le héros puni malgré ses efforts FIN SPOILER). Bref, les amateurs d’histoires de fantômes revanchards ne devraient pas être dépaysés et arriver à prévoir facilement tous les rebondissements du film.
Cependant, ce canevas classique est le terreau idéal pour James Watkins qui, après avoir tâté du survival hargneux, semble tout autant à son aise dans le registre de la montée graduelle de la tension. Le réalisateur prend le temps d’installer une ambiance pesante (le film a un rythme assez lent), tirant parti de son impressionnant décor (la grande maison au centre du film est isolée sur une île accessible uniquement à marée basse) et évitant la surenchère (les apparitions de la terrifiante dame en noir sont d’abord très espacées, et Watkins évite de trop la dévoiler). Le résultat, c’est que malgré son déroulement balisé, La Dame en Noir arrive souvent à réellement effrayer et qu’il est difficile de garder son calme devant certaines scènes (l’apparition à la Suspiria d’un visage hurlant derrière une vitre, le son crispant d’un fauteuil à bascule qui bouge tout seul, une chambre remplie d’automates s’animant brusquement…). La photographie magnifique du film renforce encore le sentiment d’oppression lorsque le héros visite la demeure, la gestion des ombres s’avérant particulièrement réussie.
A vrai dire, la seule ombre au tableau reste l’interprétation assez plate de Daniel Radcliffe. Certes, son personnage est quasi-suicidaire, mais l’acteur traverse le film avec une moue constante qui empêche de s’attacher à lui. On a souvent l’impression que les événements glissent sur lui (ce qui est une fois encore certainement en partie voulu), à tel point qu’il est parfois difficile de trembler pour lui. Dommage, car l’émouvante scène d’introduction donnait l’espoir que l’acteur allait se montrer convainquant.
Sans être exempt de quelques défauts, et malgré un acteur principal peu crédible, La Dame en Noir, grâce au savoir-faire de son réalisateur, remporte son pari de ressusciter l’épouvante gothique et annonce une bien belle renaissance pour la Hammer.
Note : 7.5/10
Royaume-Uni, 2012
Réalisation: James Watkins
Scénario: Jane Goldman
Avec: Daniel Radcliffe, Janet McTeer, Ciarán Hinds