L'enjeu de notre dernier "Concours de circonstances" - celui qui célébrait les 200.000 visites du blog - était de nous faire part d'un coup de coeur de lecture. La gagnante incontestée en est Adrienne qui nous livre un vrai et beau coup de coeur,
Adrienne est l'heureuse attributaire du dernier roman d'Agathe Gosse, Les hommes que Rosa aimait, paru aux Editions Luce Wilquin. (oct.2010)
Je vous invite à consulter son blog: http://adrienne.skynetblogs.be
Et vous donne rendez-vous à la Foire du Livre de Bruxelles.
Le coup de coeur d'Adrienne:
Je lis "Tempo di Roma", d'Alexis Curvers, écrivais-je sur le blog d'une autre lectrice en réponse à sa question hebdomadaire: "Et vous, que lisez-vous?"
- Je ne connais pas cet auteur, m'a-t-elle répondu.
- Normal, lui ai-je dit, il est Belge ;-) Et pourtant, et pourtant... quel beau livre!
La première édition a paru chez Laffont en 1957. Depuis presque cinq ans, je cherchais ce titre et voilà que je l'ai enfin trouvé, ultime exemplaire dans les rayonnages de la belle librairie Tropismes à Bruxelles.
Tout est déjà dans les premières lignes: l'amour de l'Italie en général et de Rome en particulier, la belgitude et assez de tension entre ce qui est dit et non dit pour avoir une furieuse envie de lire la suite... Voici l'incipit:
"D'une façon, j'aurais mieux fait de rester à Milan. Il est vrai qu'alors il serait arrivé d'autres choses: c'est ce qu'on oublie toujours. A Milan, je serais probablement en prison. Mais mon coeur ne serait pas mordu affreusement comme il l'est aujourd'hui. On peut dire même, évidemment, que j'aurais mieux fait de rester dans mon pays, chez ma mère. Sans doute aurais-je fini par m'habituer à ce qu'on appelle la sagesse, aux fourneaux astiqués, aux pommes de terre frites et à la bière (...). A Milan, c'était bien: il y avait le soleil, la couleur, la beauté monumentale, des jardins arrangés en vue du plaisir, mais tout de même une espèce de sens pratique et des cabinets généralement propres. La police avait fort à faire (...) J'avais été jeté là par hasard, par la guerre qui m'avait promené presque par toute l'Europe, tantôt prisonnier, tantôt volontaire, le plus souvent ne sachant au juste lequel des deux ni dans quel camp. Il ne m'échappait pas que les idées trop nettes émoussent l'instinct de conservation et sont une entrave pour la liberté. Mon indécision m'ayant porté bonheur, je cessai de rougir d'elle dès qu'elle eut découvert en Italie ses titres de noblesse en même temps que sa terre promise."
Le narrateur quitte donc Milan, assis à l'arrière de la motocyclette d'un certain Ambruccio qui l'emmène à Rome par maints détours. Ils arrivent ainsi un beau matin sur le Monte Mario:
"- Et qu'est-ce que c'est que ce patelin qu'on aperçoit dans le fond? Il [Ambruccio] s'arrêta et, très grand seigneur, avec un geste de présentation, déclara: - C'est Rome." (page 47) Comme il n'a pas de permis de séjour, il n'ose s'aventurer dans la ville et préfère attendre à la Porta del Popolo qu'une opportunité se présente. C'est sa connaissance de l'allemand qui lui offre son premier job: il fera le guide touristique pour un groupe de Suisses, découvrant ainsi Rome en bus en même temps qu'eux. "Puis nous tournâmes autour d'une sorte d'immense terrain de football abandonné, dont il semblait que des spectateurs furieux eussent anéanti les tribunes et sauvagement piétiné la surface; après quoi la police en avait ordonné la fermeture définitive et l'herbe folle avait tout recouvert. C'était le Circo Massimo." (p.73)
- Tu me donnes envie de le lire, me dit ma blogamie.
Voilà qui me réjouit! Ainsi, le nom d'Alexis Curvers ne lui fera plus penser à des boîtes de rangement en plastique ;-)"
Signé: Adrienne
Alexis Curvers, "Tempo di Roma", Labor littérature, Espace Nord, Luc Pire 2007, pages 19-20