François Hollande a réussi son coup en proposant de taxer à 75% les revenus supérieurs à 1 million d'euros par foyer fiscal : il fait le buzz et centre (pour le moment) le débat sur la fiscalité. Peu importe pour lui que cela se soit fait dans l’improvisation la plus complète, au point de confondre les revenus annuels et mensuels et de surprendre son entourage le plus proche. Non, ce qui compte c’est de reprendre la main dans le débat et de sortir la grosse matraque fiscale. D'ailleurs, cette surenchère fonctionne tellement bien qu'on attend maintenant qu'un candidat propose de taxer les très hauts revenus à 105% ! L’idée serait simple : au-delà d’un certain niveau de revenus, on prend tout (expression chère à Mélenchon) et en plus on fait payer une amende pour avoir eu des revenus « indécents » (pour reprendre l’expression de Hollande).
Plus sérieusement, que penser de la proposition de François Hollande ?
D’abord, il faut souligner le très faible rendement d’une telle mesure. D’après Bercy, cela pourrait concerner 3 000 foyers fiscaux. Michel Sapin, évalue les recettes possibles à environ 200 millions d’euros par an. Ce montant est très faible au regard des 90 milliards de déficit et ne changerait rien à nos comptes publics dégradés. Par ailleurs, l’évaluation de ces recettes me semble largement surestimée. Oui parce-que celle-ci part du principe que les personnes concernées resteront en France. Il est permis d’en douter car avec un taux marginal supérieur à 75%, notre pays serait de loin celui qui taxe le plus. Loin devant la Suède (56,5%), le Royaume-Uni (50%) ou l’Allemagne (45%). Ajoutons à ce fait l’ISF qui n’existe plus qu’en France ou presque. Il est fort probable que cette mesure ferait fuir une bonne partie des contribuables concernés. Cette délocalisation des gros contribuables est plus facile que jamais. Les grandes entreprises ont des filiales partout, il est facile de faire payer ces cadres de haut niveau par une de celles-ci. Bruxelles est à 1h de Paris, Londres guère plus loin…Je ne parle même pas des artistes ou des sportifs pour qui le changement de pays de résidence est encore plus simple.
Du coup, si l’impôt pèse non plus sur 3000 foyers fiscaux mais sur la moitié, les recettes brutes pourraient tourner autour de 100 millions d’euros. Mais là encore, le calcul est incomplet. Oui car il faut déduire de ces 100 millions la perte de revenus fiscaux liée au départ des personnes qui auront quitté la France et qui étaient de gros contribuables. On peut donc penser qu’une telle mesure aurait un impact nul voire négatif pour les comptes publics de notre pays. On comprend que Jérôme Cahuzac soit resté dubitatif à l’annonce de la proposition.
Si économiquement, cette mesure n’apporte rien, politiquement, il est possible qu’elle apporte quelque chose au candidat Hollande. En effet, on a réussi à faire croire aux Français que les riches étaient le problème numéro 1 de notre pays. On arrive à faire croire que l’enrichissement, ou le super enrichissement des uns, est la cause du moindre enrichissement des autres. Ils font figure de boucs émissaires idéaux. Les coupables que le peuple a besoin d’identifier. Nous sommes un peuple révolutionnaire et on aime châtier les coupables. Mais au fait, ils sont coupables de quoi ? En réalité, avec une mesure de ce type, on retrouve les fondamentaux de la gauche française : l’impôt punitif.
On doit punir le riche, mais le riche va partir. Ce qui est amusant, c’est d’entendre certains discours qui expliquent que les personnes concernées devraient rester sous prétexte de solidarité et de patriotisme. En fait, elles se font dévaliser par l’Etat, et elles devraient l’accepter avec le sourire…