Prothèse de hanche ASR : prochain scandale sanitaire ?

Publié le 28 février 2012 par Frédéric Duval-Levesque

Après le scandale des prothèses mammaires fruduleuses, c’est peut-être le début d’une affaire de prothèses de hanches défectueuses.

Une enquête menée conjointement par le BMJ et la BBC révèle un risque d’intoxication métallique lié à certaines prothèses de hanche, remettant une nouvelle fois en cause la sécurité des dispositifs médicaux.

Après les prothèses PIP, les prothèses de hanches ASR risque de causer du souci aux autorité sanitaires. «Plusieurs centaines de milliers de personnes dans le monde pourraient avoir été exposées à des taux dangereusement élevés de métaux toxiques via des prothèse de hanche défectueuse », alertent en effet le BMJ et la BBC dans un communiqué publié mardi.

Des risques potentiels locaux et systémiques

L’enquête menée conjointement par les deux médias pointe notamment, pour certaines prothèses de type “métal sur métal”, un risque potentiel de diffusion locale d’ions cobalt et chrome dans les tissus avoisinants. Avec à la clef, « des réactions locales qui détruisent le muscle et l’os et peuvent laisser des séquelles à long terme ». Par ailleurs, « des études ont montré que les ions métalliques pourraient passer dans le système sanguin, et diffuser aux ganglions lymphatiques, à la rate, au foie et aux reins, avant d’être éliminés dans les urines » indique le communiqué. Enfin, plusieurs travaux suggèrent un risque génotoxique « préoccupant ».

Selon le BMJ, ces risques seraient connus et documentés depuis plusieurs décennies, mais auraient été passés sous silence par certains fabricants et mal appréhendés par les autorités sanitaires concernées. Les auteurs dénoncent notamment l’attentisme observé vis à vis des prothèses ASR, commercialisées entre 2003 et 2010 par DePuy Orthopaedics. Ces modèles ont la particularité d’associer un couple métal sur métal, un dispositif réputé plus résistant que les autres associations à base de céramique, mais qui a l’inconvénient, du fait des frottements, de libérer des ions métalliques.

Plusieurs millions de personnes exposées

« Dès 2006, les preuves de fortes concentrations de métaux chez les patients porteurs de prothèses ASR se sont accumulées, mais il a fallu attendre quatre ans supplémentaires pour que le régulateur britannique, la MHRA, émette une alerte officielle de sécurité et que la prothèse soit retirée du marché ». En France, le quotidien le Figaro indique de son côté que ces prothèses ont continué à être vendues jusqu’en juillet 2010 .

Au total, plusieurs millions de personnes pourraient avoir été exposées, soit « davantage de monde que dans le scandale des prothèse mammaires » souligne le BMJ.

«La pose de prothèses de hanche est une des grandes réussites de la médecine moderne», écrit le Dr Fiona Godlee, rédactrice en chef du BMJ. «Mais la combinaison d’une régulation inappropriée et d’un mercantilisme sans limite a causé un mal réel et potentiel pour un grand nombre de patients à travers le monde », dénonce la journaliste. «Ils auraient du être informés des risques, comme les fabricants et les autorités de régulation l’étaient, mais on ne leur a rien dit

Les prothèses de hanche, comme les implants mammaires, font partie des dispositifs médicaux et ne sont donc pas soumises aux mêmes contraintes que les médicaments pour leur mise sur le marché.

Références: legeneraliste.fr, Bénédicte Gatin,  photo : ©SPL/PHANIE