Deep end, un film de Jerzy Skolimowski (1970)

Publié le 28 février 2012 par Fromtheavenue
 
Un film de 1970 ressorti en copie neuve le 13 juillet 2011.
Adolescent de 15 ans, Mike se rend à son tout premier jour de travail : il vient d'être embauché dans un établissement de bains publics de l'East End londonien. Sur place, sa collègue Susan est chargée de lui présenter les lieux. Le jeune homme est tout de suite attiré par cette jolie rousse plus âgée que lui. Alors qu'il découvre une atmosphère étrange autour de la piscine, Mike doit faire face aux avances d'une cliente échaudée. Peu à peu, Susan joue avec l'inexpérience du garçon, profitant de son admiration candide pour le faire plonger dans une dangeruese spirale de fantasmes et d'obsession.(Carlotta)

L'édition collector du DVD propose plusieurs suppléments :
. POINT DE DÉPART : LE TOURNAGE DU FILM "DEEP END" DE JERZY SKOLIMOWSKI (2011 – Couleurs – 75 mn)
Ce documentaire inédit revient sur la production de Deep End, au gré d’entretiens avec l’équipe du film, dont le réalisateur et les deux acteurs principaux. Chacun à leur façon, ils expliquent à quel point Deep End incarne le Swinging London... ou plutôt son pendant négatif.
. "DEEP END" : SOUVENIRS DES SCÈNES COUPÉES (12 mn)Jerzy Skolimowski, John Moulder-Brown et Barrie Vince reviennent sur les scènes du film qui semblent perdues à jamais, y compris une fin alternative.
. BANDE-ANNONCE 2011. "DEEP END", C’EST MOI ! (4 mn)
Étienne Daho rend hommage à Deep End. Une lecture de l’article qu’il a rédigé pour Libération lors de la ressortie du film en salles.

J’ai vu Deep End pour la première fois dans un cinéma d’art et essai à Rennes en 1972, à l’âge de 15 ans. J’ai été touché au-delà de tout et je me suis totalement identifié au personnage de Mike, joué par John Moulder-Brown. Deep End est le film chéri, celui qui vous construit, celui qu’on pense être le seul à avoir capté. J’ai eu une copie pirate pendant des années, un poster du film dans mon salon et j’ai tenté systématiquement de le faire découvrir et aimer aux personnes qui ont compté pour moi. Genre de test infaillible de compatibilité.
La ressortie de ce film était un événement attendu et nous étions quelques-uns à trépigner, même si la rareté protégeait son aspect confidentiel et secret. Invité par Mathilde de Carlotta [distributeur du film, ndlr], je suis allé à cette projection à laquelle devaient assister le réalisateur Jerzy Skolimowski, mais aussi ses acteurs Jane Asher et John Moulder-Brown, tellement idéalisés dans ma tête qu’ils ne semblaient pas exister dans la vraie vie. Pourtant ils sont là, ils respirent le même air que moi au même moment. Ils n’ont pas changé. C’est une copie neuve et je n’ai pas revu le film en salle depuis 1972. Appréhension, générique. Quel est le grand mystère qui fait qu’une œuvre vous bouleverse, trouve ce petit endroit secret en vous qui vous fait dire : ce livre, ce film, ce disque, c’est complètement moi.
Qu’est ce qui m’a touché dans Deep End ? L’écriture imprévisible, comme dans la vraie vie, cocasse et tragique ? L’identification à l’absolutisme de l’adolescent timide, obsessionnel et idéaliste ? La déception, l’idée que le désir c’est mieux avant qu’on ne concrétise… L’amour physique est sans issue ? Les couleurs seventies, les mouvements de caméra qui tourbillonnent autour des acteurs ? La musique de Can et la chanson de Cat Stevens But I Might Die Tonight ? L’imper jaune et les cheveux orange de Jane Asher dans la neige, superbe ? Le diamant, la bouilloire, la fin sublime et surréaliste, la silhouette en carton de Jane Asher dans la piscine ? Les corps nus dans l’eau ? La scène des hot-dogs ? Les seconds rôles, tous bien ? Qui ne s’est jamais fait serrer par une Milf ressemblant à Diana Dors ? Moi, c’était à Manchester, 15 ans. Le son envoûtant de la piscine aux atmosphères lourdes qui sèment le trouble ?
Bon, Deep End, c’est toujours moi. Je ressors de la projection renversé comme au premier jour. On me propose de rencontre Skolimowski. Trop de choses à lui dire qu’il vaut mieux que je garde pour moi et qui lui auront sûrement été déjà rabâchées mille fois. Je décline. Autour de moi, j’entends dire : "Ah ce film, c’est mon préféré, c’est moi." Ah bon, eux aussi ? Je me sens asocial. Je retourne voir le documentaire sur le film, hyper bien. En sortant de la projection, je croise John Moulder-Brown dans la rue. Démentiel. Nos regards se croisent, il me sourit, je lui tends la main. Entre deux banalités, je marmonne qu’il a été mon ado modèle et qu’il a changé ma vie, que Deep End, c’est moi, etc. Nous sommes pris en photo. Elle est floue et parfaite.(Libération)