Airbus Corporate Jets : le vrai haut de gamme.
C’est un sigle réservé aux initiés, ACJ, Airbus Corporate Jet. Une appellation qui peut s’accoler à n’importe quel type d’avion de la gamme européenne, A380 inclus. Le marché relève évidemment du très haut de gamme et évolue dans la plus grande discrétion : inutile de demander aux équipes commerciales toulousaines de citer des noms de clients. Cela ne se fait pas.
Un marché de niche ? Il s’agit de s’entendre sur les mots : depuis qu’il a abordé ce secteur, Airbus a vendu 170 appareils à usage privé, dont 110 «monocouloirs», principalement des A318 et A319, rebaptisés pour la circonstance ACJ318 et ACJ319. Ils sont généralement aménagés avec un nombre réduit de sièges, de 19 à 50, selon les modèles et l’usage qui en est fait. Ils offrent un grand confort, plus souvent fonctionnel que très luxueux, et sont au service des grands de ce monde, ceux qui brassent des affaires ou portent à bout de bras le destin de la planète.
Le plus petit des ACJ, le 318, est affiché à un peu moins de 68 millions de dollars, aménagement de la cabine inclus, une spécialité délicate dans laquelle excelle Lufthansa Technik. Ledit 318, qui fut un moment baptisé Elite, ce qui se passe de commentaires, se vend bien alors que sa carrière en tant qu’avion de ligne n’a jamais vraiment décollé. Il n’en resterait plus qu’un seul à livrer, même s’il figure toujours en bonne place dans le catalogue de l’avionneur, la carrière de l‘ACJ318 restant prometteuse. Tous deux sont assemblés dans les usines de Hambourg d’Airbus.
Il arrive que la carrière commerciale d’un avion connaisse des rebondissements inattendus. Ainsi, aussitôt reconnus les mérites de l’A320, qui a connu d’entrée le succès, dans la seconde moitié des années 80, Airbus a imaginé d’en dériver une version de capacité moindre, l’A319, capable d’accueillir 149 passagers en classe unique. A l’époque, le constructeur avait éprouvé de sérieuses difficultés à convaincre ses partenaires, notamment Aerospatiale, lesquels ne croyaient pas aux mérites de cette «intrapolation». Ils finirent par céder, l’A319 connut (et continue de connaître) un franc succès, notamment auprès des compagnies à bas tarifs.
La discussion se répéta en 1999, année de lancement du petit A318, un 107 places, flanqué à partir de 2005 d’une version Corporate Jet, capable de franchir une étape de 7.400 km. Du coup, Airbus a abordé une clientèle nouvelle, très disputée, que visent les Boeing Business Jet (version «affaires» du 737), Embraer Lineage, Gulfstream Global Express, etc. En version Business, l’ACJ318 va non seulement très loin mais il s’accommode de pistes courtes, au point d’être compatible avec les contraintes opérationnelles de London City Airport, une piste en plein centre de la capitale britannique.
C’est bien un marché de niche, concède David Velupillai, directeur du marketing. Encore convient-il de s’entendre sur les véritables dimensions de ladite niche qui apporte un complément activité qui est loin d’être négligeable. Du coup, alors que l’A318 est durement concurrencé par de nouveaux entrants proposés par Bombardier, Sukhoi et d’autres, la version ACJ318 vit sa vie, au cœur d’un autre monde, celui de l’aviation d’affaires de très haut de gamme. Un monde de VIP qui apprécie modérément qu’on s’intéresse à lui, qui n’affiche guère d’intérêt pour l’aviation à proprement parler mais cherche tout simplement une efficacité optimale. C’est, en apparence tout au moins, ainsi simple que cela.
Pierre Sparaco - AeroMorning