Il ne faut plus chercher la moins mauvaise manière d’augmenter les impôts, mais décider comment au plus vite réduire les dépenses publiques. C’est ce que nous rappelle l’exemple canadien.
Par David Descôteaux, de Montréal, Québec.
Un débat fait rage en ce moment, chers concitoyens. L’enjeu est grand : il s’agit de trouver la façon la plus « intelligente » pour le gouvernement de siphonner les cennes qui vous reste dans les poches.D’un côté, Luc Godbout, respecté fiscaliste et professeur d’université. Pour lui, mieux vaut hausser les taxes à la consommation, comme la TVQ, que de hausser les impôts. Études à l’appui, il démontre que c’est moins dommageable pour l’économie. Pourquoi ? Notamment parce que des impôts trop élevés découragent le travail et l’investissement. Pourquoi faire du temps supplémentaire, par exemple, si vous devez donner près de la moitié de vos gains au gouvernement ? Hausser la TVQ au lieu des impôts serait donc une façon plus « intelligente » de taxer.
Scandaleux, rétorque le professeur Léo-Paul Lauzon, nouveau blogueur au Journal (bienvenu Léo-Paul !) Hausser les taxes au lieu des impôts est inéquitable et accentue les inégalités économiques. Cela privilégie les nantis et les compagnies. Surtout quand on inclut dans l’équation les gains en capitaux et les passe-passe des entreprises pour payer moins d’impôt.
À première vue, difficile d’être en désaccord avec l’un ou l’autre. Peut-on vraiment en demander plus aux citoyens de la classe moyenne ? Eux qui sont attaqués de toute part : taxes sur l’essence, hausse de 27 % de la TVQ en deux ans (comme le souligne avec justesse M. Lauzon), bientôt l’Hydro, immatriculation, taxe santé, taxe sur les taxes… Et pourtant, les effets dont M. Godbout parle sont bien réels à long terme, et vont nuire à l’économie.
Les dépenses, stupide !
Ce clin d’œil au slogan de la campagne de Bill Clinton (It’s the economy, stupid) mériterait qu’un parti politique du Québec s’y intéresse. Car il est là le problème : on s’obstine sur la façon la plus « équitable » d’aller fouiller plus profond dans les poches des citoyens. Mais ce faisant, on dévie l’attention d’où elle devrait être : une sérieuse remise en question des dépenses du gouvernement. Chaque camp a ses idées de réformes, mais où est la volonté politique de couper quoi que ce soit ?
Ça me fait penser à un jeu de mon enfance : « Opération ». Vous et vos amis deviez aller chercher des petits objets dans les cavités d’un patient avec des petites pinces, tout en évitant de toucher les bords. Sinon, c’était le choc électrique ! (enfin… le bruit d’un choc.) À chaque budget, nos décideurs se demandent comment mieux fouiller dans le contribuable sans qu’il ne s’en rende trop compte. Pour qu’il puisse rester là, comme un con, pendant qu’on continue de lui sortir tout ce qu’il a dans le ventre.
On cherche les manières les plus « efficaces » ou « intelligentes » de financer un panier de services toujours croissant, sans jamais oser collectivement revoir le contenu de ce panier. Sans toucher aux vaches sacrées de l’État, ses bonis, ses dépenses folles ou ses dépassements de coûts.
Et chaque jour, on invente de nouvelles dépenses. Il y aura des élections bientôt, paraît-il. Vous allez entendre toute sorte de promesses. Comment va-t-on les payer ? En partie avec la carte de crédit, que nos enfants rembourseront plus tard. Pour l’autre partie, on va faire un joyeux débat dans quelques années : des nouvelles taxes, ou de nouveaux impôts ?
On tourne en rond. À quand un débat sur quoi couper, et quoi garder ?
—