L'ESPACE DU SON III
Revue L'Espace du Son III
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En 1988 et 1991, les volumes I et II de la revue LIEN consacrés aux relations Espace-Son, exploraient, sous la direction de
Francis Dhomont, un territoire encore relativement vierge.
Depuis lors, les recherches technologiques (l’accès plus démocratique aux interfaces audionumériques multicanales par
exemple), les textes théoriques et analytiques, les œuvres ont fait flores. Le troisième volume est donc une suite, un état des lieux réalisé quasi un quart de siècle plus tard. Où en sommes
nous? Qu’est-ce qui a changé? D’abord, on s’interroge sur la pertinence des mots choisis qui qualifient cette relation nouvelle du son, de la musique à l’espace. Une enquête statistique tente
d’en objectiver les ressources. Se pose ensuite la question de la représentation spatiale et du mouvement entre autres aux fins d’analyse des œuvres qui les intègrent comme nouveau paramètre
musical.
Suivent quelques exemples de pratiques sur le terrain, comme l’organisation de concerts, l’édition multicanale, les nouveaux
outils pour la composition et la projection spatiale en concert.
Cependant il est un point essentiel à débattre : que percevons-nous par l’écoute spatiale, et comment? Si elle résulte
d’intentions d’écoutes particulières, quelles sont-elles? Ne serait-ce pas une illusion perceptive ? La musique multicanale appelle de nouveaux critères d’évaluation expérimentale de la
perception auditive, entre autres celle de l’espace en hauteur. L’écoute de l’espace elle-même peut être déviée par des prothèses. Et puis, nos capacités à percevoir des mouvements
complexes sont-elles illimitées? Ne vaut-il pas mieux n’utiliser de toutes les possibilités offertes par les outils actuels que celles réellement perceptibles « plutôt que d’égarer l’écoute dans
une complexité qu’elle ne déchiffre plus » (F.Dhomont)?
Se dégage alors progressivement une réflexion à la fois théorique - l’espace fait désormais partie intégrante de l’entité
sonore enregistrée (réel), composée (simulé), projetée en concert (interprété) -, et pratique à partir de l’expérience compositionnelle en studio et en concert , et de l’analyse d’œuvres à l’aune
des différentes catégories théoriques déjà établies.
Mais la réponse à la question de François Bayle « où (en) sommes nous » se trouve lovée au creux des œuvres elles-mêmes,
surtout quand l’auteur y porte un regard rétrospectif, vue d’ensemble à partir de la longue-vue spatiale, ou quand il décrit par le menu les conditions techniques innovantes de séances de
prises de son, de tournage et de projection spatiale, et qu’enfin il s’interroge sur les fonctions musicales stricto sensu de l’espace dans l’ensemble de ses œuvres.
...tant de points de vues et d’œuvres qui prouvent, si cela est encore nécessaire, que l’incontournable dimension spatiale de
la musique échappe aujourd’hui à la phase de recherche fondamentale dans le laboratoire-creuset des musiques acousmatiques. Elle atteint le stade de la recherche appliquée dans plusieurs autres
disciplines : musicologie, sociologie de la musique, sciences cognitives, esthétique, technologie, analyse d’œuvres...
L’acousmatique reste au cœur de l’actualité de la recherche et y répond par des œuvres pérennes. Prenons ce pari sur
l’avenir.
Annette Vande Gorne