Mont-Ruflet
poème-feuilleton d’Ivar Ch’Vavar
34e épisode
Résumé de l’épisode précédent : Tout le bois se marre bien, jusqu’au plus petit insecte. Mais Alice, culbutée, est entrée dans son rêve, qui la mène d’un seul bond devant la porte du salon – derrière laquelle l’attend son Prince Charmant.
Salon où l’gominé le bellâtre l’attend dans son uniforme blanc...
Reflets sucrés, épaulettes poudrées, scintillantes, en prince héri
Tier d’un état pâtissier, il sourit – elle sourit, glisse, glisse sur le
Précieux parquet et n’a d’yeux que pour le volumineux paquet (1720)
Que la culotte de soie moule. Hum. Sur le sommet d’un terrier,
Vieux terrier plus élevé que les autres, Huit-Reflets a sorti fébri
Lement sa lorgnette pour suivre toutes les phases de la course...
Il voit tout très bien : un coude pointu qui sort du tissu, un peu
De la sclérotique d’un œil ; une tresse, blonde à damner, qui se
Défait, puis flotte avec horreur dans l’air ; la lunule d’un ongle,
Et, cerise sur le gâteau, le lobe très charnu d’une oreille (quelle
Envie, on a ! de le pincer et le rouler entre le pouce et le majeur
De sa main droite à soi ! – « Purée ! pense Huit-Reflets, troublé
Je suis à tel point, que j’en oublie que je n’ai pas de main. ») Oh, (1730)
Quand la bande surgit de derrière les troncs pourris du chablis
Quand Schmitt pousse son brame engoncé,et court dans la fou
Gère sans rien voir masqué de cerf...Quand Argo et Guy bondi
SSent comme des ouistitis et que les gnomes de Thierry vont di
Sparaître dans la fumée de vesse-de-loup de leur Moyen Âge...
Dans sa lorgnette il le voit très bien, Huit-Reflets, que l’Alice, el
Le ne voit pas ça ; rien de ça. Elle ne sent pas leur odeur, ni leur
Ardeur, elle n’entend pas ça... Ne sent pas qu’elle est crochée et
Renversée et pincée partout par de gros doigts sales. On l’écarte
On la trousse jusqu’aux dessous de bras. Même elle ne sent pas (1740)
Sous elle, ne perçoit pas le tremblement, le secouement furieux
Du sol quand la bête aveugle est tirée jusqu’à elle elle n’entend
Pas l’atroce et nasal tonitruement... Ni elle n’est touchée, par le
Membre monstrueux, bras ou branche-de-ventre tout entortillé
De veines bleues et violettes qu’on guide entre ses cuisses ‒ qui
La pénètre jusqu’au pancréas, non : nenni ! Mais elle a passé les
Grilles, elle foule les allées de sable fraîchement mouillé et ratis
Sé, elle a enjambé les tulipes des parterres ; elle a couru, légère,
Légère, sur les terrasses et les perrons, et là, sous les lustres de l
A salle de bal... alors qu’on jette confetti et pétales, dans le gros (1750)
Paquet des rires et des oh! et des ah ! dans l’étincellement des o
Pales et des topazes, le froufroutement des robes tournantes pl
Eines de cheveux d’ange et de sucre-glace ; dans la lumière des
Mille miroirs et mille lumières,il est là, le Prince Charmant. Lui
Sourit. Elle sent alors toutes ses douleurs, qu’avec Joie ! Elle est
Blonde aux yeux bleus très clairs, lui est couvert de sucre-glace
Depuis la tête jusques aux pieds. Et d’une légère suée. Elle sour
It en chantonnant, elle n’a d’yeux que pour la grosse bosse que
L’on voit sur la culotte qui chatoie. – Qu’elle la regarde juste u !
Ne seconde de plus... et l’étoffe se fend, se déchire en étoile et l’ (1760)
Énorme chose jaillit et se déploie ; fracasse un lustre dans la ge
Lée tremblante des rires et des oh ! et des ah !... et Alice joint les
Mains et bat des paumes et trépigne et sautille et urine de joie !
On la saupoudre de sucre-glace on la claque de crème chantilly
Et de moka.
Et pourquoi le poète aujourd’hui ne raconterait-i
L pas des histoires ? des histoires du temps passé ; ou de temps
À venir ou de tout le temps ? Et pourquoi le poète, aujourd’hui,
Ne raconterait-il pas des histoires ? Inventées, ou dont l’authen
épisode 35 le mercredi 29 février 2012